Finalement, il ne faut pas grand-chose pour résumer la mécanique de la série : Iznogoud le méchant Vizir tente par tous les moyens de prendre la place du calife. Au fil des histoires, le lecteur comprend très vite que le but n’est pas de savoir si le grand vizir va réussir son coup mais comment il va s’y prendre pour échouer et, le plus souvent, tomber dans ses propres pièges. Le calife déjoue quant à lui systématiquement et sans s’en rendre compte les stratagèmes mis en place par Iznogoud avec une bonhomie et une naïveté confondantes.
Pour varier les situations et ne pas donner l’impression de raconter toujours la même histoire, Goscinny s’appuie sur la richesse de l’univers dans lequel se déroule la série. Bagdad l’enchanteresse, la mystérieuse, regorge de Djinns, de magiciens et de marchands d’objets magiques qui permettent de renouveler à l’infini les vaines tentatives d’Iznogoud.
Avec son trait nerveux Tabary se régale à mettre en scène les improbables situations imaginées par son scénariste. Il compose à chaque nouvelle histoire des personnages secondaires aux trognes impayables qui participent grandement au ton humoristique de la série. D’ailleurs, pour ce qui est de l’humour, le scénariste n’est pas en reste. Il multiplie jeux de mots et calembours lamentables et il entoure son cher vizir d’une incroyable galerie d’imbéciles encore jamais vue en bande dessinée.
C'est en débarquant dans l'hebdomadaire Pilote en 1972 que la série, intitulée depuis ses débuts « Les aventures du calife Haroun El Poussah », change de nom pour devenir « Les aventures du grand vizir Iznogoud », faisant définitivement du vizir le personnage principal.
A la mort de Goscinny en 1977, Tabary reprend seul le flambeau. Aujourd’hui, ce sont ses trois enfants qui assurent la relève d’une série mythique où la méchanceté et les échecs perpétuels de l’infâme Iznogoud font sourire les lecteurs depuis 50 ans.
Plus grandes forces de cette série :
- C’est sans doute la première fois depuis les Pieds Nickelés qu’un héros de série n’est pas animé de louables intentions. On ne peut qu’être admiratif devant la volonté inusable de ce vizir qui restera sans doute un des plus grands « méchants » de l’histoire de la BD.
- Les calembours et autres jeux de mots, parfois très tirés par les cheveux mais qui sont la marque de la série.
- La richesse des personnages secondaires. Il y a bien sûr Dilat Larath, l’homme de main d’Iznogoud qui accomplit les basses besognes et ne cesse de prévenir son patron de l’échec à venir de ses manœuvres, mais il y a aussi tous les marchands, magiciens et autres colporteurs qui illuminent les histoires de leur vanité, de leur cupidité et le plus souvent de leur incommensurable stupidité.
- Le trait de Tabary qui se reconnaît au premier coup d'oeil et donne un charme indéfinissable à la série.
- L’inconscience béate du calife. Un personnage flegmatique qui ne brille pas par son intelligence et se révèle au final assez peu intéressant car il n’évolue pas du tout au fil des albums.
- Les histoires où Goscinny n’est pas au scénario sont souvent très faiblardes. Un constat qui s’impose avec les deux autres grandes séries de ce génie qui lui ont survécu (Astérix et Lucky Luke).
Extrait du tome 7 : une carotte pour Iznogoud
Carte d’identité de la série :
Auteurs : Jean Tabary et René Goscinny
Date de création : 1962
Nombre d'albums : 28 (série en cours)
Éditeur : Dargaud et Éditions Tabary