Vintage: Achille M.
Jeudi 7 fevrier 2008
Achille mon cousin, il n’y pas que ton talon qui était fragile, ta jambe droite était comme une adolescente rebelle, cherchant sans cesse son indépendance, ne te laissant que la nuit pour l’oublier.
Tu allais pourtant aux champs, tu vendais aussi des ignames et du poisson fumé, tu riais surtout de tout comme pour exorciser cette douleur, ce handicap jamais évoqué mais si souvent blâmé.
C’était en Côte d’ivoire, dans les années 80, le pays crachait à l’occident son cacao et ses ananas dans un tourbillon de corruption et de passe-droits qui balayait sur son passage le jeune paysan que tu étais.
Pourtant tu t’es bien battu Achille, ne comptant que sur ta verve et ton courage tu rêvais de venir en France et je me plais parfois à imaginer quel immigré tu aurais été, quel français tu aurais pu devenir.
Tu n’as pas connu le net bien sur , tu ne savais même pas lire mais tu trouvais toujours le camarade nécessaire pour m’écrire quelques mots.
Mais tu es mort Achille, sans doute comme tu es né, seul, délaissé, peut être même affamé, pourrais-je me pardonner un jour ma confortable passivité.
Achille mon cousin, il est grand temps aujourd’hui de te considérer comme un frère.
Publié le 25 septembre 2006