J'aurais pu sans problème végéter à Sihanoukville jusqu'à expiration de mon visa... C'eût été tellement facile... mais tellement peu stimulant. De plus, j'aurais risqué de terminer en grillade de luxe sur la plage : « buy big giant mollusque BBQ, today only, very rare ! »
Je n'ai plus guère d’énergie, autant physiquement que moralement. Espérons que ce soit dû au climat uniquement. J'ai quand même réussi à m'extirper de ma chaise longue 5 minutes pour aller acheter un ticket de bus (et même comparer les prix) pour Chi Pat, village prometteur (d’après la description du guide), me disant qu'il n'y aurait rien de tel qu'un peu d'aventure pour me rebooster un peu.
Ça l'a été, l'aventure, mais pas franchement celle à laquelle je m'attendais.
C'est dans ce petit éco-village que j'ai compris dans ma chair (voire dans mes os) ce qu’était vraiment la saison des pluies.
Un peu comme « bienvenue chez les Chtis » : dès que je suis montée à l’arrière de la mobylette (unique moyen de locomotion pour rallier Chi Pat à partir d'Andaung Toeuk où m'a déposée le bus, le cargo de marchandises ne circulant plus depuis que la route a été « aménagée »), des trombes d'eau ont commencé à tomber. Moi qui ne suis pas rassurée à mobylette, en temps normal, imaginez sous la pluie battante sur un chemin de terre...
Enfin bon, je suis arrivée saine et sauve (toujours sur la pluie).
l'entrée du village à un moment (béni) où il ne pleuvait pas
Là, je m'inscris pour une rando le lendemain, me disant (ô combien naïvemement) que le temps ne pourrait être que meilleur.
J'ai somnolé pendant 3 heures en attendant que ça se calme, bercée par le bruit des gouttes sur le toit de mon rustique bungalow, et j'ai enfin pu aller faire un tour à vélo en fin d’après-midi. J'ai slalomé entre les vaches,
les poules et les flaques d'eau,
répondu aux coucous enthousiastes des petits nenfants
mais n'ai pas rendu la pareille aux petits cochons insolents qui me montraient leurs fesses.
J'ignorais alors que cette balade allait constituer le plus beau moment de mon séjour à Chi Pat.
Le soir, j'ai attendu en vain la compagnie au « local pub »
composé en tout et pour tout d'une table en bois sur une terrasse même pas éclairée (mais abritée, plût à Bouddha), à laquelle je me suis installée avec mon bouquin et ma lampe frontale, mes plus fidèles amis
à l’entrée de ma « guesthouse » (où j’étais la seule guest, par ailleurs).
Le lendemain matin, je me lève aux aurores pour ma rando. Le but était censé en être un point d'eau où on pouvait apercevoir des animaux venant s'abreuver. J'avais carrément mon guide perso... qui m'annonce au bout de 2 minutes qu'en cette saison, on n'allait probablement voir aucun animal puisqu'il leur suffit de tirer la langue pour s'hydrater.
Z'auraient pas pu me le dire la veille à l'office de tourisme ?! Je me serais plutôt inscrite à l’activité pêche au homard si j'avais su, ou encore à la visite des cascades !
Comme un malheur n'arrive jamais seul, la pluie a commencé à tomber peu après notre départ... et n'a pas cessé une minute jusqu'à notre retour 7h plus tard, 3 heures aller, 3 heures retour, avec une pause-déjeuner (heureusement à l'abri) pendant laquelle on était censé voir des animaux... tu parles, on a vu en tout et pour tout 3 pauvres canards...
Le trajet retour a été pire que tout : après le crachin, la vieille saucée qui te trempe jusqu'aux os en 10 secondes. La plupart du temps, nous avions de l'eau jusqu'aux genoux alors que nous marchions dans des chemins... transformés en ruisseaux.
Je préférais encore ça aux tronçons en terre /cailloux humide, où miraculeusement je ne me suis étalée que 2 fois sans rien me casser. On a même traversé des ponts sous-aquatiques dans des petits lacs : je devinais la planche sous mes pieds (à 50 cm de profondeur) et n'avais plutôt pas intérêt à marcher à côté. Pas tant pour moi (je n’étais plus à ça près) que pour mon appareil photo tout nu (je ne lui ai toujours pas trouvé de housse).
Le tout a été ponctué par des pauses-désangsuation. Les saloperies traversaient même les chaussettes pour me bouffer les pieds, grimpaient jusqu'en haut de mon pantalon pour venir me croquer le bidon... J'ai fait preuve d'un stoïcisme qui ne me ressemble pas (disons que c’était plutôt de la résignation) : j'ai fini par abandonner totalement, me disant qu'il valait mieux attendre d’être sous la douche (froide, cela va sans dire) pour éradiquer méthodiquement cette vermine... j'en ai retrouve au-dessous du soutif (avec la moitié de la bête encore sous ma peau, l'autre moitié sur le tee-shirt), sous mon aisselle (décidément!)... brrrr, j'en frissonne encore.
Comble de l'ironie : maintenant que je tapote ce poste, le lendemain, il fait un soleil radieux...
ça fait 3 HEURES que j'attends mon bus
et je risque d'arriver trop tard à la frontière alors que mon visa expire aujourd'hui...
ARRRRRGGGGG.