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Sésame et sandwiches
Avec cette succession de lose improbable depuis près d'un an, avec en prélude cette annulation in extremis du concert des Besnard Lakes de Marseille suivie du plan moisi "Je vous mets sur la liste des invités mais le Cargo de Nuit n'en saura jamais rien" qui nous priva de la prestation attendue de la divine Me'Shell Ndegeocello l'hiver dernier, qu'allait-il donc nous arriver cette fois-ci, pour la prestation conjointe des glaswegians impavides de Mogwai et des non moins impavides bristoliens de Portishead ?
Support band
Premier élément de réponse : un mur d'eau ininterrompu survenu dès l'aube nous fit derechef redouter le pire ! Le concert plein air tant attendu n'allait-il pas être bêtement renvoyé aux calendes grecques ? Déjà Beauf avait donné la tendance en paumant un sésame et en oubliant ses sandwiches.....
Car finalement, le concert allait avoir lieu, le déluge de Laudes ayant finalement laissé place à un soleil radieux et même pas étouffant, comble de la tradition estivale nîmoise !
Ouvrant les hostilités dans ce très bel écrin que sont les Arènes, les écossais de Mogwai qui eux, c'est sûr, peuvent aller faire leurs courses dans n'importe quel supermarché sans risquer d'y être repérés ; le non-look atteignant chez ces gens-là son art le plus noble ! Qu'importe, le support-band de Portishead - à moins que ce ne soit l'inverse- est toujours le même : le micro est soigneusement ignoré, à l'exception du sympatoche "Merci, thank you, we are Mogwai from Glasgow" qui ponctue quasi tous les titres - les rares vocaux étant échantillonés et passés aux filtres du synthé.
Que dire de ce combo qui n'ait déjà été dit ? Qu'il est à peu près aussi vain de programmer leurs plâneries post-rock en plein jour qu'il ne l'est, au hasard, d'écouter un de leurs disques en entier sans bâiller ! Tels oripeaux sonores réclamant il est vrai une sorte de transe collective auquel seul le crépuscule sait rendre justice.
Il n'empêche, pour "Hunted A Freak", "I'm Jim Morrison, I'm Dead" et les meilleurs moments de Rock Action (2001), l'on se rend bien compte que Mogwai est ce qui se pouvait se trouver de mieux comme première partie (mais en était-ce vraiment une, encore une fois ?!), quand on sait que les boys ont toujours 2,3 morceaux fantastiques à chacune de leurs livraisons !
Et puis, on aurait pu se coltiner Placebo.....
Total du set ? Une heure et demie en gros, avec un choix de morceaux assez pertinent dans l'ensemble.
Ecrin sonore
Place maintenant aux Portishead. Je ne suis pas un fan hardcore du groupe des Cornouailles, car je trouve leur son chétif sur disque. Ceux-ci, généralement plus inégaux qu'on ne le dit, sont définitivement estampillés trip-hop et n'ont donc pas forcément bien vieilli. Third(2008) en revanche, soutient la comparaison, mais je n'y ai retrouvé ni la qualité de Dummy (1994), ni de Portishead (1997), et ce malgré un brelan de morceaux parfait.
C'est d'ailleurs l'un deux qui ouvre magistralement le set, ce "Silence", qui tel "Cowboys" dix ans plus tôt, et déjà placé en ouverture, se révèle redoutable d'efficacité. Un savant mélange d'images arty et de vues distordues du groupe nous permet de distinguer que les musiciens sont au nombre de six. Et que non, le gars au fond, n'est pas un deuxième batteur, mais bien Geoff Barrow, qui se partage entre les percus et ses platines. Enfin, pas vraiment puisque le nerd ne rappe que trop peu, ses scratches étant par exemples absents de "Glory Box" ou de "Wandering Star", joué de façon dépouillée et un peu mièvre, sans rythmiques !
Pour le reste, le set fait la parle belle à Third, dont certains morceaux prennent clairement une envergure ("Hunter" en est un parfait exemple) ; dommage seulement que le seul titre -ou quasi- non joué de l'album soit l'une de ses plus indéniables réussites, j'ai nommé "Plastic" !
Beth Gibbons a le charisme d'une huitre, mais ça on le savait, elle réussit quand même à faire passer de l'émotion sur l'écrin sonore que lui délivrent ses acolytes sur "Mysterons" et "Roads".
Cheveux de paille et wah wah étincelante
A propos d'écrin sonore, et outre la section rythmique très à la hauteur, comment ne pas souligner le rôle de celui qui tient le rôle d'épicentre de Portishead, sans lequel la voix blanche et les cheveux de paille de sa chanteuse paraîtraient bien fades, qui à force de nous répéter qu'elle est seule, que la vie est triste et que personne ne l'aime, finit invariablement par faire rire !
Adrian Hutley, puisque c'est de lui qu'il s'agit, a un pur son de guitare ; ce mec joue juste, égrène les notes avec parcimonie, et fait frissonner le public de sa wah wah étincelante. Pour qui a jamais rêvé de voir en Cauet le guitar hero ultime, c'est chose faite ! Forcément quand il s 'efface complètement (comme sur "Wandering Star"), ça n'est pas pareil !
Sinon, pas de nouveau morceau -malgré la rumeur, il n'y aura pas de nouveau Portishead cette année- le deuxième album fut savamment laissé de côté - quid de "All Mine", "Seven Months" et surtout "Half Day Closing", inexpliquablement ignoré ? - au profit de titres plus mineurs comme "Over", et le contenu deDummy releva du minimum syndical
En fait, le vrai bémol, ce fut ce rappel au bout d'une petite heure et quart ! Alors OK on a eu droit à un "Roads" d'anthologie mais le groupe a immédiatement conclu son set sous une lumière blanche et crue par un "We Carry On" étiré de façon un peu trop complaisante pendant que Beth Gibbons allait claquer la bise au premier rang !
Alors un set d'une heure et demie et d'une petite quinzaine de morceaux, soit autant que pour le groupe de première partie, ça fait chiche : avec la crise du disque où l'on sait la propension des groupes à privilégier le live pour vivre décemment de leur art, ceux-ci pourraient penser aux cochons de payants extatiques qui forcément, et pour 50 euros, en auraient facilement pris pour une heure supplémentaire !