L'article manifeste Sur un art ignoré a beau avoir été publié à l'époque par les Cahiers du Cinéma avec bien des précautions, comme s'il s'agissait d'un brûlot "anti-cahiers", Mourlet insiste quant à lui sur la continuité qui le relie à Rohmer puis à André Bazin. Comme ces deux derniers, Mourlet a le constant souci ontologique du cinéma, et il explique comment il fut plus bazinien que Bazin lui-même, à rejeter Orson Welles au nom des positions (notamment sur le montage) du père des Cahiers. Plus profondément que cela, il nous semble que ce qui relie Mourlet à ces aînés est une vison du cinéma comme art impur : du côté de la cristallisation riche et vivante plutôt que du côté du signe aride et figé.
Au lieu de s'échiner à interpréter sa formule un peu alambiquée qui fut placée par Godard en exergue du Mépris, et prêtée à Bazin - "Le cinéma substitue à notre regard un monde qui s’accorde à nos désirs" - nous préférerons nous intéresser à sa vision harmonieuse au cinéma, à sa défense du découpage (prévu à l'avance, et en cela naturel au récit) contre le montage (soupçonné d'être là pour maquiller les ratés), ou encore à ses papier sur Fritz Lang, Joseph Losey et Jacques Tati. Prochaine étape, donc : se plonger dans l'édition livre de Sur un art ignoré, re-publié aux éditions Ramsay en 2008.