Après une bronca d’ouverture avignonnaise désormais traditionnelle, le Ministre de la Culture a convoqué la presse le 8 juillet
dernier pour lui présenter son « Plan d’actions pour le Spectacle Vivant ». Un calendrier qui ne laissait rien au hasard en cette
année pré-électorale ou les déclarations sur la culture vont plus souvent relever pour les candidats en lice du passage obligé
que d’un véritable intérêt pour les politiques culturelles. Rappelons à ce sujet que dans les 30 propositions pour un changement
en 2012 du Parti Socialiste, le mot culture n’apparait qu’au détour de la proposition 19 : « Nous développerons l’enseignement et
l’accès à la culture », ce qui fait un peu juste. Dans ces conditions que penser de la proposition de Martine Aubry, candidate à la
primaire socialiste, d’augmenter le budget de la culture de 50%, proposition aussitôt dénoncée par François Hollande.
En 4 objectifs et 10 mesures avec 12 millions d’euros, Frédéric Mitterrand accouche donc de quelques mesurettes et conforte
des financements déjà existants en guise de « plan d’action » !
Tout d’abord, il promet 12 millions d’euros répartis sur 3 ans (entre 2011 et 2013) soit 4 millions /an …
(on est loin des 15 millions d’euros de mesures nouvelles sur une seule année qui étaient venus clôturer les légendaires
Entretiens de Valois de 2009) Car au Ministère de la Culture ( comme ailleurs ) l’heure est au régime minceur de la RGPP.
Une pseudo manne financière dont la faible augmentation compense à peine l’inflation et arrive après 2 années de stagnation
budgétaire pour le spectacle vivant (2010 et 2011).
Et à y regarder de plus près …seulement 1,26 millions d’euros sont prévus pour 2011 …les 7,3 millions n’arrivant que sur
l’année 2013, après l’échéance électorale présidentielle…pas folle la guêpe !
Lorsqu’on analyse en détail les 10 mesures de Frédéric Mitterrand , on comprend très vite qu’il s’agit en fait de consolider la
culture d’excellence, avec en particulier un soutien renforcé aux Scènes Nationales (point n° tout en continuant à aggraver la
logique d’une culture à deux vitesse avec d’un côté le renforcement d’une culture d’état et de l’autre l’abandon de tout un pan de
la culture à ce qu’il convient d’intituler pudiquement les pratiques amateurs.( petites compagnies théâtrales, ateliers de pratiques
artistiques n’ouvrant plus de droits aux intermittents du spectacle qui les animent, cultures émergentes non prises en compte
etc…) Le projet de création de troupes permanentes dans les Centres Dramatiques et Chorégraphiques Nationaux (point n° 2)
est sur ce plan tout à fait exemplaire de la volonté du Ministre de préserver un périmètre restreint de la culture d’état. D’ailleurs
Frédéric Mitterrand est très clair sur ce point : la création de ces compagnies permanentes est directement associé dans son
esprit à la poursuivre de la structuration de l’emploi artistique. Lorsque par ailleurs, le Ministre continue de mentir en prétendant
qu’il a sauvegardé l’intermittence on comprend que tout cela s’inscrit dans un projet politique global ultra libéral dans lequel on
conserve un peu de culture pour amuser les cadres moyens et on laisse le reste à la loi des marchés.
Vient ensuite une aide au « réseau » des lieux circassiens et des arts de la rue ainsi qu’une consolidation des mesures déjà
prise pour les SMAC ( cf le plan de développement des SMAC d’avril 2011). Mais ne nous y trompons pas, il s’agit plus là d’un
saupoudrage mis en place pour faire avaler la pilule d’une politique globale de désengagement de l’état que d’une véritable
volonté politique d’ouverture sur les pratiques émergentes (voir le mouvement de luttes en cours dans les DRAC aujourd’hui par
exemple).
Nouveau gadget , la création d’un fonds national d’aide à « l’innovation artistique », soit 1,5 millions d’euros distribuables sur la
base d’appel à projet annuel, pour soutenir tout ce qui n’entre pas dans les catégories habituelles (théâtre, danse, cirque,
marionnettes, arts numériques). Il serait d’ailleurs intéressant sur ce point d’interroger la notion d’appel à projets. Car une
nouvelle fois, ne nous trompons pas, il y a tout lieu de penser que les valeurs qui régiront ces appels à projets ne seront pas la
créativité et l’innovation, mais bien plutôt la rentabilité économique et le conformisme artistique.
Quand à l’aide annoncée pour « la création française à l’étranger » (création de bureaux spécialisés de production et de diffusion
à l’international), il faudrait qu’elle repose sur des conventions établies entre les Affaires étrangères et la Culture, pour qu’elle
une réelle crédibilité !
Bref, rien de bien nouveau dans le « plan d’actions » du Ministre ….
en fait, un plan … « plan-plan » !
SUD CULTURE , le 15 juillet 2011