Cette ville d’Italie du Nord est essentiellement connue pour avoir été le théâtre (fictif) de la tragique histoire de Roméo et Juliette, contée par Shakespeare. Est-il besoin de l’énoncer ? Le jeune Roméo Montaigu tombe éperdument amoureux de la belle Juliette Capulet, fille du clan ennemi. Les deux amants ne peuvent être réunis que dans la mort …
Romeo and Juliet, Sir Franck Dicksee, 1884, (pouvant s’apparenter au style préraphaélite)
Pour rendre ce mythe un peu plus réel, les autorités de la ville ont désigné, au XIXème, une maison construite au XIIème et appartenant originellement à la famille Dal Cappello comme étant celle des Capulet (probablement en raison de la consonance des noms). Ce choix est également justifié par le fait que Shakespeare ait situé l’’action de « Roméo et Juliette » dans la Vérone des Scaligeri, une puissante famille ayant régné de 1262 à 1387.
Le célèbre balcon, escaladé dans une scène très connue par un Roméo se languissant de Juliette, n’a été ajouté à l’édifice que bien plus tard, entre 1936 et 1940. Mon romantisme a également pâtit du fait que ledit balcon aurait été à l'origine, selon toute vraisemblance, un sarcophage.
Lieu incontournable pour les amoureux, la bâtisse est entièrement recouverte de graffitis multicolores laissés par ces derniers telles des invocations à l’amour éternel, gribouillis pourtant fort inesthétiques et nuisant au charme certain de l’endroit. Quoique, si l'on y pense bien, il y a là un des plus touchants témoignages d'un sentiment qui, par sa rareté et sa beauté, ne peut être blâmé sans qu'il y ait une part de mauvaise foi chez l'accusateur...
Néanmoins, le manque de temps nous a empêchés de visiter l’intérieur de la construction, remplie de meubles du XVIème et XVIIème siècles, de tableaux ayant pour thématique le célèbre drame ainsi que des costumes d’époque.
Enfin, au fond de la cour intérieure se trouve une statue de Juliette en bronze. Une superstition affirme que les couples doivent lui toucher le sein droit, ce qui leur apporterait un amour impérissable et bienheureux.
Penchons-nous cependant brièvement sur son créateur, William Shakespeare, considéré comme le plus grand dramaturge de la culture anglo-saxonne. Né en 1594 et issu de la bourgeoisie de la petite ville de Stratford-upon-Avon, il peut s’adonner aux études pendant quelques années, avant d’épouser précipitamment Anne Hathaway. Si la première période de sa vie demeure secrète, il est possible de retrouver sa trace en 1592. On sait qu’à partir de cette date, il s’est illustré au théâtre, notamment grâce à la protection du comte de Southampton. S’il collabore avec Christopher Marlowe et Ben Jonson, l'écrivain joue surtout ses propres pièces à la cour d'Elisabeth Ière et de Jacques Ier, ainsi qu’au célèbre théâtre du Globe. Il en devient d’ailleurs actionnaire en 1608, ce qui lui permet d’améliorer son niveau de vie et d’être plus indépendant. Il met fin à sa carrière quatre ans plus tard, et s’éteint le 23 avril 1616. Son œuvre est un monument de la littérature, et inclut des chefs-d’œuvre absolus tels que « Roméo et Juliette » (1595), « Hamlet »(1603), « Le Roi Lear »(1604) ou « Macbeth »(1606).
Seul portrait de Shakespeare réalisé de son vivant, datant probablement de 1610, soit 6 ans avant sa mort.
Dès lors, la pièce de théâtre déclenche les passions chez les spectateurs qui l'idolâtrent et l'érigent au statut de légende, comme chez les artistes, pour qui elle est une inépuisable source d'inspiration. Le compositeur russe Serge Prokofiev (1891-1953) a écrit une musique inspirée de cette œuvre en 1935 ; Hector Berlioz a également retranscrit la pièce dans le langage universel des sonorités. Ces orchestrations ont été reprises par de nombreux chorégraphes qui ont pu exercer leur créativité en créant de sublimes pas-de-deux : parmi les plus célèbres figurent Frederick Ashton, John Cranko, John Neumeier … La plus connue des versions reste celle de Kenneth MacMillan (ici dansée par Angel Corella et Alessandra Ferri).
Hormis les évidentes adaptations cinématographiques reprenant le texte et modernisant la mise en scène (cf. la version avec DiCaprio et Danes), je tiens à signaler une reprise bien plus singulière : la comédie musicale de Leonard Bernstein et Jerome Robbins qui, portée à l’écran, a remporté pas moins de 10 Oscars. Il s’agit bien entendu de « West Side Story ».
« L’amour est une fumée faite de la vapeur des soupirs » : la légende Shakespearienne du sentiment impossible mais éternel n’est pas prête de s’éteindre…