A propos de Le Moine de Dominik Moll 2 out of 5 stars
Vincent Cassel
En Espagne, au XVIIème siècle, un bébé est abandonné par un homme aux portes d’un couvent de Capucins. Baptisé Ambrosio par les moines qui l’ont adopté, l’enfant devient un moine fervent, adulé pour ses prêches. Mais l’arrivé d’un mystérieux novice masqué dans le couvent va semer le trouble dans l’esprit et le corps d’Ambrosio…
Le Moine est inspiré par le célèbre et sulfureux roman gothique éponyme (publié en 1796) de Matthew G. Lewis (1775-1818). C’est la troisième adaptation du roman de l’écrivain anglais après celles d’Ado Kyrou (1972, co-scénarisée par Luis Bunuel et Jean-Claude Carrière) et de Francisco Lara Polop (1990). Auparavant, Antonin Artaud en avait déjà livré une traduction écrite très personnelle en 1931 et même envisagé de le porter à l’écran.
De quoi parle Le Moine ? D’un orphelin élevé dans l’Espagne très catholique du XVIIème siècle et la foi stricte des Capucins. Ambrosio (Vincent Cassel), réputé pour son extrême rigueur voire son intransigeance religieuses, fait pourtant un rêve étrange au début du film. Un rêve prémonitoire dans lequel il entrevoit de dos une femme vêtue de rouge et qui prie à genoux. Lorsqu’il s’approche d’elle, il réalise qu’il est impossible de la toucher.
Joséphine Japy, Vincent Cassel
C’est l’apparition du Malin ou les premiers signes du doute dans la foi pourtant jugée irréprochable d’Ambrosio. Le moine espagnol, dont la sévérité (il a dénoncé une jeune sœur enceinte à l’abbesse, ce qui a entrainé sa mort) n’a d’égale que l’exigence de vertu qu’il s’est fixée, connaitra de plus en plus de tentation pour la chair. Y résister deviendra une souffrance insoutenable.
Dans cette nouvelle adaptation de Le Moine, outre l’ambiance fantastique qui règne dans le roman de l’écrivain anglais, on retrouve la charge violente de l’écrivain anglais contre l’hypocrisie de l’Eglise catholique et la violence faite aux femmes. La première heure est assez réussie parce qu’épurée visuellement. Fidèle au roman, Dominik Moll peut s’appuyer sur un excellent Vincent Cassel (irréprochable tout au long du film). A cette sobriété de moyens visuels correspond le soin extrême porté aux dialogues, très écrits.
Vincent Cassel, Sergi Lopez
Et puis, la seconde partie du film part dans tout à fait autre chose. Quelque chose de paradoxal. A partir du moment où Ambrosio succombe dans un quasi-délire (il a été piqué par un scorpion) et malgré lui à la chair, la mise en scène s’encombre d’effets visuels comme ces images en négatif (effet scanner) de corps qui se mélangent.
Dans une interview, Dominik Moll a confié qu’au-delà de la critique contre L’Eglise qui était formulée dans le livre, c’était l’ambiance romanesque, ce « mélange de romantisme et de fantastique, de thèmes oedipiens et faustiens, d’espagnolades et de tonalités shakespeariennes » qui l’avaient séduit. Difficile de retrouver cet engouement ou ce souffle dans sa mise en scène bardée certes de références picturales (la tisseuse de Vermeer notamment) mais cantonnée de plus en plus à une effusion spectaculaire d’artifices visuels. Les apparitions fantômatiques de Sœur Agnès (vision d’Ambrosio) ou ces images accélérées de nuages gris qui gonflent dans le ciel ont du mal à convaincre. Elles affaiblissent la tension et la dramaturgie du film. Au lieu de ces effets visuels un peu vains (parce que peu évocateurs), on aurait aimé que la réalisation s’appuie davantage sur ses acteurs, sur Cassel notamment, magistral malgré tout même si pas assez mis en valeur.
Le film avançant, on se prend de plus en plus à vouloir relire Le Moine. Où la morale de l’histoire est qu’au-delà de la tentation pour la chair, c’est surtout le doute progressif sur sa foi qui a perdu Ambrosio.
www.youtube.com/watch?v=P2ajCVye_Y0
Film français de Dominik Moll avec Vincent Cassel, Sergi lopez, Joséphine Japy. (1 h 41.)
Scénario : 2 out of 5 stars
Mise en scène : 1.5 out of 5 stars
Acteurs : 4 out of 5 stars
Dialogues : 3 out of 5 stars
Compositions d’Alberto Iglesias : 3 out of 5 stars