Le contrôle par l’armée sur la nouvelle équation politique en Egypte se confirme, et l’étendue de sa mainmise se mesurera très bientôt à l’influence que les militaires auront sur la rédaction de la nouvelle constitution. Avec l’approbation des Etats-Unis, les militaire égyptiens devraient se voir investis par ce texte de la mission de protéger l’unité nationale et de garantir le caractère laïc de l’état.
Cette évolution de l’aprés-Moubarak est souvent décrite dans la presse internationale comme un scénario « à la turque », une option que le secrétaire d’état Hillary Clinton a récemment donné en exemple aux pays arabes. En évitant de rappeler que pendant longtemps la Turquie a été une dictature militaire et, qu’encore ajourd’hui, l’influence de l’armée dans les affaires de l’état est déterminante.
Aux yeux des Américains, les uniformes apparaissent en Egypte comme la meilleure parade contre l’influence des islamistes. L’engagement social des Frères Musulmans depuis des décennies auprès des plus défavorisés assure en effet leur popularite, et leur légitimité, dans un pays dont la moitié des 85 millions d’habitants vivent dans le plus grand dénuement. Et les Frères ont toutes les chances de voir leur poids politique confirmer par les urnes.
Les militaires égytiens, financés et entraînés depuis plus de 30 ans par les Etats Unis, ont été des protagonistes essentiels de ce qui fut décrit au début de l’année comme la « révolution égyptienne ». En prenant le parti de la foule, en refusant de tirer sur les manifestants et en se chargeant d’exfiltrer le président Moubarak vers Charm el Cheikh, ils ont procédé à un changement de régime, en évitant un bain de sang.
Depuis, une junte militaire gère la transition et est en train de préparer une nouvelle constitution. La crainte des milieux libéraux en Egypte est que les militaires préemptent les nouvelles institutions qui devraient voit le jour aprés des élections prévues en novembre et promulguent, sans attendre, une nouvelle Loi fondamentale qui protège leur rôle et leurs intérêts, notamment économiques.
Face à ce qui apparaît comme une poursuite par les militaires égyptiens de l’accaparement du pouvoir, Washington, grand artisan des changements de régimes dans le monde arabe, ne semble pas avoir de réticence. Au contraire, en donnant en exemple la Turquie, Washington ouvre la voie à une mise au pas des velléités populaires par des institutions militaires qui lui sont dévouées, comme en Egypte, mais aussi en Tunisie, en Jordanie, au Yémen et dans les états du Golfe.
The Daily Star