Tourné au milieu des années 60, Blow up d’Antonioni consacre la photographie… Représentation du réel ou de l’illusion ?
Le titre de ce film de 1966 signifie « agrandissement », en anglais. L’histoire repose en effet sur les négatifs de photos prises par le personnage principal, dans un parc.
Le détail qui tue
Britannique, photographe de mode, le héros s’amuse à immortaliser la rencontre d’un couple dans un square, a priori illégitime. De retour dans son loft et atelier, il zoome sur l’arrière-plan – on est en 1966, les techniquessont manuelles et nécessitent un savoir-faire – et découvre qu’il a assisté à un meurtre. Le long-métrage prend alors un virage serré, mêlant illusion et réalité.
Antonioni fabrique un thriller résolument moderne, avec un petit goût de la cultissime série Chapeau melon et bottes de cuir : psychédélique mais sérieux ; étrange mais concret ; angoissant mais pas effrayant.
L’ambiance décalée emporte le spectateur dans un tourbillon, initié par une toute jeune Jane Birkin qui incarne son premier rôle au cinéma. Jeune fille écervelée, elle atterrit avec une copine chez le photographe(jamais aucun prénom ne sera cité, le réalisateur préfère garder ses personnages anonymes).
Anecdotique, mais pas érotique
S’en suit une scène coquine, sans être ni érotique ni vulgaire, où les deux nymphettes androgynes terminent totalement à poil. C’est la première fois qu’une femme apparaît entièrement nue dans un film grand public ; le pubis et la poitrine sont à l’écran et choquent ainsi la société anglo-saxonne de la fin des sixties. Souvent cité comme scène d’orgie, ce passage est plutôt un chahut enfantin à la sortie de l’adolescence. Ne vous attendez pas à une partouze porno !
Enfin, notez l’apparition furtive de Jimmy Page (Led Zeppelin) et Jeff Beck, lorsque le photographe traverse la foule d’un concert des Yardbirds, groupe de rock créé par ces deux « guitar heroes »1.
Bénédicte Crabouillet
1. Un guitar hero (« héro de la guitare »), titre non officiel décerné à certains guitaristes de légende. Il s’agit d’artistes alliant virtuosité technique et génie mélodique (Angus Young, Kurt Cobain, Jimmy Page, Jeff Beck, Jimi Hendrix, Eric Clapton…)
Blow up, de Michelangelo Antonioni, 1966, avec David Hemmings, Vanessa Redgrave, Sarah Miles…
La bande-annonce en anglais :