En DVD : Gargantuesque, pantagruélique, rabelaisien... des adjectifs qui évoquent copieux banquets et rires grivois. Pour autant, ils définissent mal François Rabelais, médecin et écrivain de la Renaissance à qui l'on doit Pantagruel (1532) et Gargantua (1534). Diffusée récemment sur France 2 et éditée en vidéo par France Télévisions Distribution, une fiction française en deux parties lui rend hommage : La très excellente et divertissante histoire de François Rabelais. L'auteur y est incarné par deux comédiens au top, Eric Elmosnino et Michel Aumont.
Réalisé par Hervé Baslé, le téléfilm présente toutes les caractéristiques de la fiction française de service public : reconstitution soignée, décors, costumes et photo de toute beauté, rythme posé au service d'une histoire bien construite, dialogues ciselés. La mise en scène évite l'écueil de l'académisme, grâce à quelques jolies trouvailles visuelles. Bon, les travellings apportent certes du mouvement mais ils manquent paradoxalement de fluidité. Tout cela est un peu trop travaillé : les effets de caméra, les mouvements de foules... la spontanéité fait un peu défaut et fige l'ensemble. Les deux parties manquent un poil de rythme. Mais, heureusement, pas au point de plomber l'ensemble.
Old School et nouvelle vague
Surtout que les comédiens sont "très excellents et divertissants". En premier lieu, ceux qui interprètent Rabelais à différents âges de sa vie. Formidable dans Gainsbourg : Vie héroïque, Elmosnino apporte un naturel bienvenu et fait ressortir tout le côté rebelle, voire déconneur de l'écrivain-médecin. Dans sa bouche, les dialogues très littéraires, limite poétiques, sont aussi compréhensibles que les propos d'aujourd'hui. A l'inverse, Michel Aumont en fait ressortir la beauté sophistiquée. Une opposition de styles qui pour autant sert le personnage. Ce sont eux, Elmosnino et Chaumont, qui nous emportent et nous donnent envie de poursuivre ce voyage dans la France du XVe siècle. Et ils sont bien aidés par le reste du casting qui mêle vedettes confirmées (Bernadette Lafont, Roger Dumas, Patrick Catalifo...) et jeunes espoirs (Benjamin Egner, Anne Azoulay...). Sans oublier l'hilarante prestation de quatre "Deschiens" en moines ripailleurs : Philippe Duquesne, Bruno Lochet, Olivier Saladin et Olivier Broche.
J'ai pris plaisir à regarder ces deux parties de 110 minutes, complétées par un making of classique. Le téléfilm aurait peut-être gagné à être un peu moins sage dans sa forme, il n'en reste pas moins une belle production télévisuelle. Et il a le mérite d'associer à Rabelais le qualificatif adéquat : humaniste.
Anderton