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EVA JOLY A, À DEMI, RAISON Le 14 juillet n’est plus qu’illusions; à nation de zombies, fête de fantômes
Publié le 16 juillet 2011 par Metamag
EVA JOLY A, À DEMI, RAISON
Le 14 juillet n’est plus qu’illusions; à nation de zombies, fête de fantômes
Posté par: www.metamag.fr
La médiatisation est telle que, pour que la télévision et les journaux signalent un événement ou une opinion, 'il faut "péter à table", au milieu des notables du plus haut grade.Ce que vient de faire Eva Joly, candidate à la présidentielle récemment élue par EEVL, en exprimant le souhait que le 14 juillet ne soit plus un défilé militaire, mais l'appropriation de la rue par le « bon peuple de France », toutes catégories (ou classes) mêlées, mélangées, métissées, rassemblées. Chacun choisira le qualificatif selon ses sentiments. Et tout le monde, après cette déclaration, de vociférer, de l’extrême droite à la gauche presque extrême, de la grande à la petite presse, contre l’outrage venant, qui plus est, et après tout d’une étrangère, qui agresse « notre » symbole, « notre » emblème, « notre » relique : le 14 juillet.
Eh bien, Eva (on ne l'appelle pas encore EJ) a raison ! Qu'est-ce encore que ce défilé militaire de quelques milliers de soldats et de quelques dizaines de matériels, rassemblés sur les Champs-Elysées, qui, à eux seuls, représentent une part notable du potentiel guerrier en état de marche, vestige de ce que fut la "Grande Nation"? L’aventure libyenne nous en rappelle chaque jour le contenu dérisoire et l’usage parcimonieux, sous la tutelle américaine qui nous dicte où nous devons frapper… quand nous avons des bombes.Le "14 juillet" , des vestiges de "la grande nation"
A quoi sert-il en effet ce défilé? Un peu à faire croire que nous sommes encore quelque chose ; un peu à justifier le paiement de la partie de l’impôt -de plus en plus réduite- consacrée à la Défense, un peu comme salon de vente à l'exportation (pas toujours facile, hein salauds de Brésiliens !) de ce que produit notre industrie de défense… Eva a raison, disais-je. Il faut supprimer le 14 juillet, dans sa partie militaire. Vain cocorico d’un coq déplumé et éclopé.
Nous avons même oublié le sens du 14 juillet
Rappelons d'abord que le 14 Juillet fut institué, en tant que fête nationale, en 1880, sur proposition d'un député du nom de Benjamin-Raspail. Il voulait, ainsi, célébrer non pas, comme on le croit tant, la prise de la Bastille par quelques centaines de boutiquiers, forteresse à moitié désaffectée, gardée par un quarteron de soldats à la retraite ou unijambistes. Mais rappeler la Fête de la Fédération du 14 juillet 1790, qui célébrait l'union du Peuple de France et de son Roi. La fête de la Nation: c'est à dire la fête de tous ceux qui sont issus de la même matrice, dans le sens grec et romain dont les Jacobins se voulaient être les enfants, quand nous le sommes aujourd’hui de Washington.14 juillet 1880 : la fête de la NationL'institution du 14 juillet comme fête nationale, en 1880, devait cimenter une République (troisième du nom) encore fragile, après les années équivoques, d'un point de vue institutionnel, qui avaient suivi la chute de l'Empire. Elle se voulait aussi, ne l’oublions pas, comme une célébration, rassemblant tous les Français, autour de leur Armée, dans l'esprit de la revanche, après la perte de l'Alsace-Lorraine.On sait, aujourd'hui, que ces bons et nobles sentiments, issus du nationalisme jacobin et universaliste, ont conduit aux massacres du vingtième siècle (dont, Français et Européens, nous ne nous sommes pas relevés) et aux impasses de la seconde colonisation.Le défilé militaire du 14 juillet est donc devenu parfaitement anachronique. Il ne sert qu'à masquer les haillons dont se couvrent la "Grande Nation." C'est le défilé des oripeaux de la grandeur passée. Et, en plus, y a-t-il même une nation, puisque ouverte sur le grand large du commerce et du trafic des hommes, les individus, qui l'habitent, ne sont plus issus de la même matrice? Défilés populaires à Cuba ou en Corée (civils en uniformes) au siècle du communisme triomphant
Mais qu’en est-il, alors, de la solution de remplacement, évoquée par Eva Joly, de faire défiler les enfants, les habitants des quartiers ? Ou que sais-je encore? N'est-ce pas utopique ? On sait qu'au 14 juillet les écoles sont vides, les grandes transhumances vers les plages largement entamées. Où trouver les "défileurs"? Dans les banlieues ? Mais ne faudra-t-il pas payer, de quelque manière, ce service : vitrines, subventions? Triste réalisme !et à Moscou (hommage au petit père des peuples) ou en Corée du Nord
Et puis, cette idée d'Eva fait furieusement penser (le bon temps pour Robert Hue et Marie Georges !) à ces défilés du « peuple », que l'on voyait, après le passage des chars et des fusées, au siècle du communisme triomphant. La Place-Rouge, la Place Tien-An-Men, la Place de la Révolution à La Havane, tout comme à Hanoï ou à Pyongyang-Yang, envahies par des colonnes de vétérans décorés, d'ouvriers méritants, de fillettes en jupettes avec leurs couettes, de garçonnets au foulard rouge, tout ce monde agitant de petits drapeaux sous le sourire, ravi, d’apparatchiks séniles.
Non Eva, tu es encore trop jeune pour être sur une tribune, avec tes petites lunettes rouges. Tu viens du froid, certes! Mais on espère que tu n'est pas passée par Moscou, il y a une trentaine d'années.
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