Je suis très loin d’être une experte, mais j’adore faire des recherches sur l’histoire des comics et notamment sur le parcours des auteurs les plus emblématiques. Après être tombée sur un dessin de Joe Chuster alors que j’écrivais un billet pour mon Blog Têtue, je me suis aperçue que sa carrière ne s’était pas arrêtée à la co-création du plus célèbre des super-héros.
Pour la petite histoire, Superman fut au centre d’une querelle juridique (et ce n’est toujours pas terminé) entre ses deux auteurs Joe Chuster et Jerry Siegel, et la maison d’édition dans laquelle le personnage a toujours été publié : DC. Un premier procès eut lieu en 1947 où Chuster et Siegel réclamaient un peu plus des 130 $ obtenus pour la vente de leur bébé à l’éditeur américain en 1938. Ce n’est qu’à partir des années 70 (grâce à Neil Adams, entre autre) que les deux comparses obtiendront une rente de 35.000 $ par an, juste pour la forme.
Après leur séparation, Chuster continua sa carrière de dessinateur sur des comics érotiques publiés dans la revue Nights of Horror, un magazine qui durera 16 numéros et qui vit le jour en 1954 dans la pure tradition des illustrations coquines spécialisées dans le SM et le bondage.Ces planches, dessinées sous le pseudonyme de JOSH (pour Joseph Shuster) tombèrent dans l’oubli jusqu’à ce qu’elles soient retrouvées, compilées et publiées par Craig Yoe dans un livre intitulé Secret Identity : The Fetish Art of « Superman’s » Co-creator Joe Shuster.
Datant de 2009 et comprenant 160 pages, Secret Identity qui contient une préface de Stan Lee, s’avère être plus qu’un recueil d’illustrations rares provenant d’un auteur notoire et historique de l’industrie des comics.
En effet, au delà des références aux personnages issus de l’univers de Superman revisités sous un œil nouveau et pour le moins original, ce livre est aussi le témoignage d’une époque sombre concernant la liberté d’expression et la censure, en parlant du fait divers des Brooklyn Thrill Killers, un groupe de délinquants dont les exactions firent grand bruit en 1954 et dont Fredric Wertham (l’instigateur du Comic Code) va prendre comme principal exemple pour prouver l’influence néfaste des comics sur la jeunesse.
Secret Identity : The Fetish Art of « Superman’s » Co-creator Joe Shuster, est donc un livre double emploi qui au delà du bel objet qui collecte des illustrations destinées à un public amateur, est aussi le témoignage d’une époque, où les auteurs n’étaient pas des super stars comme aujourd’hui, mais des artistes sous le joug des éditeurs et de la censure, travaillant sur des titres moins glorieux pour vivre et exister après l’œuvre de leur vie.