Le cœur d’une fille est-il à ce point accroché à celui d’un garçon qu’elle se jettera dans la Seine s’il venait à la quitter ? Camille aura de ses gestes désespérés, mais jamais la caméra n’en fait des tonnes. L’ellipse naturellement entretenue par Mia Hansen-Løve est de tous les instants, grammaire bien particulière d’un cinéma français de plus en plus présent sur le devant de la scène.
J’ai souvent pensé aux tournures d’esprit de Christophe Honoré ou Antony Cordier dans cette façon de suivre tout en observant des personnages encore mal définis. Ils arpentent la vie et la vie leur glisse des peaux de banane.
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Ils avancent avec la tendresse candide d’une jeunesse encore pleine d’espoir. Lui, va partir, et elle, traverser le vide de quelques années, qu’un homme plus mûr réussira à lui faire oublier. Architecte, il enseigne dans l’établissement où Camille imagine des cités universitaires qui ressemblent à des monastères. Des lieux de solitude, de réclusion à l’image qu’elle s’est forgée depuis le départ de Sullivan(Sebastian Urzendowsky). On pourra trouver le cours très théorique, mais personnellement j’ai beaucoup apprécié cette approche des perspectives, ce regard sur la lumière, ou plus exactement la lueur, « et cette nécessité de construire à partir du noir ».
La parabole est parfaite pour une jeune fille à laquelle Lola Creton, prête ses plus beaux atours. Lumineuse, mélancolique, c’est un premier grand rôle pour la jeune comédienne, qui à l’image du film, ne fait pas dans la surenchère. Elle glisse sur le temps qui passe. Et bon gré, mal gré, elle sait comment le retenir. Cela se fait souvent dans la douleur, car rien ne dure disait l’écrivain québécois André Major « sauf les plaies secrètes qui vous guident ou vous égarent ».