Jacques Vigne donne ici quelques conseils pratiques, sur la pratique et à l'attention des thérapeuthes. Mais tout un chacun sera aussi prendre ses conseils pour soi...
"Nous arrivons à la conclusion de cet article – pour le lire en entier, cliquez ici - sur la manière dont la sagesse peut soulager, voire guérir la souffrance psychotique. C'est le moment d'insister sur l'importance de la pratique pour les thérapeutes qui veulent avoir une approche spirituelle de la psychose. Il ne s'agit pas de devenir moine ou ermite dans une grotte, mais d'avoir l'habitude de s'asseoir régulièrement, peut-être deux fois par jour, et de faire dès que possible des périodes de retraite où l'on essaie d’être assis en méditation pendant le plus clair de la journée. Lire seulement deux ou trois livres de mystiques qui racontent leurs expériences et ensuite écrire soi-même un article ou un livre dessus en jargon psychanalytique ne fera pas l'affaire. C'est essayer de se faire croire qu'on peut tout comprendre avec des instruments intellectuels tout à fait inadaptés, et, surtout, sans pratique spirituelle personnelle. C'est aussi essayer de monter au sommet de la montagne mystique en traînant au pied le gros boulet de la psychopathologie. Si tant est qu'on réussisse même à commencer la montée, il y a toutes les chances de rechute en chemin. Je pensais déjà cela lorsque j'ai commencé à m'intéresser sérieusement à ces questions-là, avant même de débuter les études de psychiatrie il y a un quart de siècle, et je le pense doublement maintenant.
Rappelons les bases d'une pratique spirituelle : une compréhension large du pourquoi de l'effort d'intériorisation, l'entraînement à la concentration, la stabilité du corps et la capacité de tenir le coup dans l'assise pendant des durées déterminées et ce de façon régulière, accompagnée de la ferme résolution d'améliorer sa vie globalement. S'asseoir régulièrement et expérimenter jour après jour par soi-même la difficulté qu'il y a à amener le mental au silence donne de l'humilité et du réalisme. On descend de son piédestal de psychothérapeute qui sait tout pour s'asseoir dans l'humilité du coussin de méditation.
En plus de cette pratique, un vrai contact avec des représentants avancés de traditions spirituelles est également important. S'il n'est pas là, les spécialistes de santé mentale risqueront fort de parler ou d’écrire sur la spiritualité de façon théorique, pour ne pas dire imaginaire. Heureusement, il y a des choses qui bougent dans ce sens, le Dalaï-lama a été invité à présider un congrès de neurosciences avec 30 000 scientifiques à Washington en octobre 2007, et il a eu toute une série de dialogues avec des savants, en particulier dans le domaine de la psychologie moderne, qui ont été publiés sous le titre par le Mind and Life Institute. (par exemple Healing Emotions).
De façon générale, il faut savoir que les théories psychologiques ont leur utilité, mais on ne doit pas croire qu'elles sont le propre de l'époque moderne, il y en a déjà eu beaucoup qui se sont succédées, qui ont eu leur heure de gloire et qui se sont évanouies comme brume au soleil. Du point de vue de la pratique spirituelle, elles n'apportent pas d'aide décisive. À ce propos, souvenons-nous, pour conclure, de cette image de Râmana Maharshi : il explique que le Soi est comme une salle immense, et que les théories psychologiques sont comme des paravents qu'on y installerait : certains préfèrent pousser ces paravents plus d'un côté, certains autres plus de l'autre, mais cela ne change rien au volume même de la salle."
Vigyânânanda (Jacques Vigne), Dhaulchina (Himlayas), novembre 2008
Source image : http://www.temoignages.re/petit-atelier-philo,50739.html
Source texte : VIGNE Jacques. - Ce en quoi la sagesse peut aider à sortir de la souffrance psychotique [en ligne] (page consultée le 14 juillet 2011). Adresse URL : Source image : http://www.temoignages.re/petit-atelier-philo,50739.html