Allons un peu plus loin sur les hypothèses de l’affaire A, comme m’y encouragent les récents commentaires sur le site et une discussion sur le forum France 2 de l’émission « Non élucidé ».
Dans l’article précédent, on avait évité de se servir de GoogleMaps, ce coup-ci, ça va être le passage obligé pour 2-3 précisions. Alors en avant : tapotons sur le clavier : « Rue Galos, Pau ». Ca y est ? Vous y êtes ? Bon, ne zoomez pas trop, on n’y va pas tout de suite.
D’abord, on part au nord-ouest, direction la rue Carnot, juste au niveau du croisement avec la rue Poincarré, un peu avant la place de la République. A est là, le 4 juin à 22h51. Bon, on descend maintenant, jusqu’à la place de la République. Imprégnez-vous des lieux, regardez les commerces (via satellite les noms apparaissent et sont plus fiables que les vues piétonnes qui ont 4 ou 5 ans, certains commerces ayant pu disparaître, être rachetés…).
Au croisement, deux possibilités : descendre la rue Carnot jusqu’au croisement avec la rue de la République (qui se prolonge par Galos – itinéraire G1) ou partir à gauche (je suis le trajet du cycliste qui descend plein sud ; sa gauche, par rapport à l’axe de la photo satellite est notre droite). Continuer tout droit, non seulement rallonge le trajet mais surtout implique de passer devant des commerces qui devraient être ouverts dans la nuit de samedi à dimanche et supposent que des gens passent : bars, hôtels,… Personne n’ayant vu A et celui-ci n’ayant aucune raison de rallonger son parcours, il est probable qu’il ne soit pas passé par là (G1 passe à la trappe).
A l’inverse, si on suit la place de la République en tournant à gauche, depuis Carnot, un seul commerce est croisé : un bar perdu dans un coin, seul, en bordure de route (à supposer qu’il existe toujours – une fois encore, la vue piétonne de Google n’est pas forcément fiable). Bref, deux nouvelles options s’offrent : prendre à droite la rue du Docteur Simian et arriver sur Galos juste après à gauche avant de remonter à gauche vers le point d’arrivée de A (on ne sait d’ailleurs pas à quelle hauteur de la place Samuel de Lestapis il est attendu) – itinéraire G2 – ou suivre les grands axes sur une centaine de mètres supplémentaire jusqu’à prendre à droite pour arriver à la place Samuel de Lestapis – itinéraire G3.
Le vélo de A est retrouvé à 15 ou 20 mètres du croisement entre la rue Galos et la place Samuel de Lestapis. Si vous zoomez depuis la vue satellitaire, vous verrez une voiture rouge garée au niveau du croisement, juste derrière, une grise. Il semblerait que le bâtiment derrière la voiture grise ait été rasé et que ce soit le terrain que l’on voit sur cette image :
Le premier bâtiment à gauche cache l’entrée de la place Samuel de Lestapis, et le bâtiment de verre en face est celui de Pyrénées Presse rue Despourrins. Le vélo, selon les informations de la presse, aurait été retrouvé ici même, attaché au panneau de stationnement.
A pied depuis La Poste de la rue Carnot, ce point est à 350-400m. Si l’on suit l’itinéraire en voiture, il faut suivre l’itinéraire G1 à cause des sens interdits : l’accès à la place Samuel de Lestapis est à sens unique. GoogleMaps propose 500m en tout, 2 minutes en voiture.
G2 à pied est l’affaire de 400m, 5 minutes (donc 2-3 minutes à vélo, de nuit, en y allant à son rythme). Idem pour G3.
Prenez la vue piétonne, mettez vous depuis la place de la République et la place Marguerite Laborde et regardez en contrebas vers ce que pourraient être G2 et G3. L’accès est dans les deux cas un sens interdit, mais G2 (par la rue Docteur Simian) offre une plus grande visibilité, donc plus de sécurité pour un piéton (quand bien même il s’agit d’une rue et qu’elle ne débouche pas sur une placette comme G3 – et donc que les véhicules y roulent un peu plus vite, mais y sont plus visibles).
La suite est un pur jeu de quitte ou double, un magistral coup de bluff pour moi qui suit planqué derrière mon PC et GoogleMaps : supposer que A a pris le chemin le plus pratique pour lui…
A est donc rentré chez lui en passant par la rue Docteur Simian, il est normal qu’il ait remonté la rue Galos. Son itinéraire est parfaitement légitime, et à plus forte raison si sa destination est au sud de la place Samuel de Lestapis.
Voilà mon postulat : l’itinéraire G2. Déductions : le crime a lieu sur une distance de 100-120m, à peine 70m à vol d’oiseau, quelque part entre le croisement rue Docteur Simian/rue Galos et la place Samuel de Lestapis. Au plus une minute à pied, une minute où tout se joue.
Mais cela va plus loin : avec mon postulat (mais cela est aussi bien valable pour G3), l’agresseur NE PEUT PAS aborder A en voiture (eh oui ! le coin est bourré de sens interdits !), sauf s’il est déjà en voiture rue Galos. Cela rend impossible un repérage récent, impossible une filature quelconque depuis la fête.
Si je suis les pistes de mon premier article sur l’affaire, je suppose qu’A a été abordé par un agresseur qu’il connaissait pour l’avoir croisé régulièrement, pour avoir peut-être parlé avec lui. C’est peut-être un voisin, un proche, un commerçant, etc. Une figure connue, probablement pas un intime (le M.O. est bien trop expéditif, bien trop violent, sans trace de remords, pour que ce soit un intime). Une figure connue, qui a parfaitement sa place dans ce cadre, dans la proximité immédiate des lieux.
Le cloisonnement des lieux, l’unique témoignage indiquant que le vélo réapparaît dans la journée et la prise de risque démesurée qu’implique un tel acte laissent supposer que le vélo n’a jamais quitté les lieux. Comme un lecteur de La septième nuit de Vala me l’a appris, le cadenas a été prêté par un ami un peu plus tôt (merci Welt pour l’info). Bref, A a son vélo sous la main au moment où il est abordé. Peut-être n’est-ce pas lui qui attache l’antivol, mais il en est aussi bien capable pour une quelconque raison.
Ce prétexte justement, qui fait qu’il s’arrête ou qu’il est abordé. Est-il descendu de vélo pour parcourir les derniers mètres ? A-t-il repéré quelque chose derrière la barrière que l’on voit sur la photo, dans ce qui semble être l’ancien emplacement d’un baraquement démoli ou égaré quelque chose ? Quelqu’un le salue-t-il avant de lui proposer de le suivre pour lui remettre quelque chose ou sous un prétexte quelconque ?
Laissons ces incertitudes ici, impossible de pousser plus loin. Passons à l’acte criminel en soi.
Ce que nous avons c’est une personne qui disparaît, sans que personne ne voit ni n’entende rien, dans une petite rue habitante, à une heure peu avancée de la nuit. Des immeubles de 2 à 5 étages autour, la plupart en ont trois. Les bruits y résonnent un minimum. Le coin est assez habité malgré quelques sites en travaux par endroits, des lampadaires situés à intervalles réguliers et probablement la lumière qui se réverbère sur les vitres de Pyrénées Presse rue Despourrins. Le temps ce samedi soir est peut-être un peu couvert, la température doit être encore assez agréable, mais peut-être pleut-il en début de matinée (Cf: ici et là)…
Avec ces données-là par rapport à l’éclairage et au voisinage, l’agression à proprement parler peut difficilement avoir lieu dans la rue, à moins d’assommer la victime d’un bon coup ou de la menacer (mais pour cela il faut dans tous les cas d’abord s’approcher d’elle). Sinon, il y a le risque du bruit, le risque de la visibilité. Une fois les conditions réunies, le meurtre à proprement parler est l’affaire de quelques minutes. Entre le moment où A est abordé et celui où il est exécuté et compte-tenu du M.O. qui privilégie a priori un rapport Post-Mortem à un rapport Ante-Mortem avec la victime, il ne s’est probablement pas écoulé plus d’une dizaine de minutes, une heure au plus.
Laissez-moi étayer… Pour commettre un meurtre, il faut un coupable, une victime, une scène de crime (qui peut être multiple comme ici entre le lieu d’agression et la zone de largage), une arme du crime (quitte à ce que ce soit des mains) et, plus que tout, un mobile.
Ici, le mobile n’est bien évidemment pas financier : même si A aurait pu être abordé pour trois sous ou pour obtenir ses clés, l’acharnement sur le corps et la méticulosité mise à le faire disparaître contredise un acte si banal.
Restent deux options : un acte de vengeance (pensez au cas Gregory par exemple) ou un acte à dominante sexuelle (pas forcément direct).
Une fois de plus, ce que nous savons sur le M.O. P-M nous incline à penser que c’est l’aspect sexuel qu’il faut privilégier (comme annoncé dans l’article précédent, un acte probablement plus en complément qu’en compensation à une sexualité ordinaire). Nous sommes loin d’une affaire dans le style Natascha Kampusch/Wolfgang Priklopil où l’enfant est un jouet sexuel de voyeuriste, une gamine de substitution que le criminel s’accapare. La destruction ordonnée du corps indique un attachement bien trop partiel au corps de l’enfant. Ici, ce qui prédomine dans l’acte criminel ne tient pas à son objet (la victime) mais à son M.O. L’acte est bien plus important que sa cible. Cela semble confirmé par le fémur retrouvé dont aucun journal n’indique qu’il aurait été lesté (peut-être toutefois y a-t-il rétention d’information). Souvenez-vous de janvier dernier et de l’affaire L à Pornic. Là, il y avait un rapport plus intime au corps à la fois A-M et P-M, le corps était ensuite découpé, lesté, et réparti sur différentes zones de largage. Si je ne me trompe pas, en tout 6 parties. Six parties LESTEES. Donc dont l’emplacement ne changerait pas. Donc où demeure un rapport symbolique si son meurtrier n’avait pas été arrêté, une possibilité de retrouver ce corps. Dans le cas de A, rien. Donc un désintérêt face au corps une fois l’acte criminel abouti. Le largage du corps est une pure procédure utilitaire. Ce qui ne l’est pas, c’est ce qui se passe avant. Le rapport avec A vivant, le meurtre de A, et la découpe du corps. S’il y a une signature précise au crime, elle est là, pas dans le rapport postérieur, pas dans le choix précis d’un lieu de largage. Le choix se fait par commodité ou par son côté pratique.
Or, pour revenir à la partie P-M de découpe du corps, la rigidité cadavérique est à prendre en compte, ainsi que des questions de commodité. A de très rares exceptions près (je pense en particulier à Jeffrey Dahmer auquel j’avais consacré de nombreux articles par rapport au documentaire de son jugement ou aux différents films qui lui sont consacrés), personne n’ayant commis un crime ne conservera un corps de taille normale (là aussi, les cas de bébés congelés font exception – mais cet acte est parfaitement légitime : comment se séparer du fruit de ses entrailles, même mort ? Le seul rapport possible est de lui offrir la vie éternelle) plus de 48h (rappelez-vous, je l’avais évoqué, un corps au bout de 48h, non seulement ça sent fort, mais ça change de couleur et ça enfle – pour le service des résurrection, merci de passer pile-poil au bout de 48h, soit au troisième jour, et merci Carl Gustav Jung pour l’explication !).
Pour sa part, la rigidité cadavérique se met en place après une heure : les muscles se contractent légèrement, le sang cesse de circuler efficacement, tout le corps se crispe. Pour effectuer un découpage, le couteau devient dérisoire, la scie passe encore, mais le travail devient difficile. Par contre, il y a moins de sang… Mais dans tous les cas, pour la découpe comme pour le transport du corps, cela suppose des moyens, des traces passives ou actives de sang : dans un coffre, sur une toile ou un drap, sur des sacs poubelle, etc.
Tout ça pour en arriver à une probabilité de plus (mais les analyses scientifiques menées par la police sur le fémur indiquent peut-être tout autre chose) selon laquelle du moment où A est abordé jusqu’à la fin du découpage, il ne s’est pas passé plus d’une heure ou deux, au grand maximum 3-4. Bref, tout est terminé, c’est le dimanche 5 juin, et il est moins de 4h du matin, probablement plutôt 1h ou 2h, en plein dans l’heure du crime parfaite (pour un cambriolage nocturne passez entre 1h00 et 5h00, c’est le moment favori : tout le monde dort, même les voisins).
Pour le largage, peu importe. Il peut suivre directement l’acte criminel… mais une nuit de week-end, sortir serait malvenu, le criminel a mieux fait d’attendre le lendemain soir, surtout si les parties du corps sont lâchées dans le Gave. Encore une fois, des questions pratiques par rapport au corps et par rapport à l’alerte qui est donnée le dimanche après-midi et s’amplifient en début de semaine me font supposer que tout le largage est opéré dans les 48h, c’est-à-dire que les pièces incriminantes ont disparu le mardi matin au lever du soleil.
Pour le reste, c’est à la police de confirmer ou d’infirmer mes théories et surtout de mettre la main sur le coupable.
Affaire… à suivre.