Lundi, Nicolas Sarkozy ne travaillait pas. Il était au Fort de Brégançon. Il faudra attendre 4 jours pour qu'un journal, le Parisien, publie un cliché faussement volé du couple présidentiel marchant vers l'eau. Carla le ventre arrondi, Nicolas la chemise ouverte.
Mardi, Sarkozy s'est pris pour Pompidou. Il était parti dans le Cantal, à Montboudif, prononcer un vibrant hommage pour le centième anniversaire de l'ancien président. En ces temps de crise monétaire (le Portugal venait d'être à son tour dégradé par Moody's), économique (notre déficit commercial atteindra un niveau record cette année), sociale (le chômage a grimpé de 152.000 personnes en un an), ou internationale (massacres en Syrie, combats en Libye), il y avait bien d'autres sujets que cet anniversaire dont tout le monde se fiche.
L'important, pour le candidat, était ailleurs : c'était l'occasion, pour Sarkozy, de se dresser l'autoportrait, celui d'un homme qui aurait « fait des fautes comme tout le monde », qui aurait remis « la France au travail », un homme cultivé qui « traversa des épreuves terribles, se battit contre les préjugés, contre la calomnie », passionné par « la vie quotidienne » qui « regardait toujours la politique comme une question de civilisation »; un homme « étranger à l'esprit de système ».
Jeudi, le Monarque tenait conseil. Il a quelques nouveaux ministres à conseiller. Pas question, leur dit-il, de prendre des vacances. Un ministre doit être toujours sur le pont. Pour sa part, le Monarque repart dès jeudi soir pour trois belles journées de repos. En juillet, Sarkozy adopte la semaine de 4 jours. Que les autres bossent ! Lui a tant donné !
Jeudi, Sarkozy regretta d'avoir laissé la Cour des Comptes aussi indépendante. Sur le coup, c'était une bonne idée d'ouverture que d'avoir placé Didier Migaud, ancien président (socialiste) de la Commission des Finances de l'Assemblée, comme premier magistrat de la Cour. Sarkozy pensait piéger son monde, en laissant un socialiste s'agiter sur quelques dossiers thématiques mineurs illustratifs de la "gabegie" des dépenses publiques. Malheureusement, la Cour est une institution moins malléable que cela. Quand elle parlait de la dérive de nos comptes publics, le Monarque faisait mine d'ignorer la critique. La Grande Crise de 2008 lui servait de prétexte admirable. Qu'importe si la Cour relevait que la dégradation du déficit budgétaire de 2007 à 2010 provient aux deux tiers des mesures fiscales de Sarkozy et pour un tiers seulement de la récession.
Jeudi dernier, le coup fut plus sévère. Une véritable catastrophe ! Une centaine de conseillers de la Cour des comptes avaient planché, des mois durant, sur la gestion et l'organisation des forces de sécurité. Le sujet est sensible, puisque la lutte contre la délinquance est l'ADN politique du Monarque. Et les conclusions, factuelles, de la Cour furent terribles.
Les Sages dénoncent les faiblesses du pilotage ( « manque de maîtrise des moyens budgétaires et humains à l’échelon local »), les résultats statistiques contradictoires (entre les statistiques de l'ONDPR et les enquêtes de « victimation »), la réduction des effectifs (« une augmentation des effectifs suivie d’une égale diminution » entre 2002 et 2010) et des moyens matériels consacrés à la lutte contre la délinquance (- 25% en 2010 sur le fonctionnement de la police après deux années de vaches maigres!); et, last but not least, l'inadéquation des allocations de moyens sur le territoire : certaines communes sont moins dotées que d'autres malgré un taux de délinquance plus important. La Cour fut également surprise de constater qu'un programme de 300 millions d'euros d'équipement en video-surveillance ait été décidé sans aucune étude préalable d'efficacité ; qu'à un instant T, seuls 5,5% des effectifs policiers étaient sur la voix publique.
A l'Elysée, on envoya les ministres et les responsables de l'UMP, un à un, répliquer dans les médias. Guéant accusa la Cour d'« un nombre important d'inexactitudes, d'erreurs d'analyse, d'oublis et d'appréciations manquant parfois d'objectivité » ; Copé a qualifié le rapport d'idéologique; Valérie Pécresse a récusé le droit à la Cour de juger d'une politique (ce qu'elle n'avait pourtant pas fait). Lionnel Luca, l'un des leaders du groupe groupusculaire Droite Populaire, au sein de l'UMP, dénonça la légitimité des Sages à s'intéresser à un tel sujet. L'homme venait d'abandonner ses mandats à l'UMP, avant de revenir contre la promesse de l'organisation d'une autre convention à l'automne prochain. Seul Patrick Ollier, ministre des relations avec le Parlement, et compagnon de Michèle Alliot-Marie, a applaudit « un travail honnête (...) et rigoureux ».
Nicolas Sarkozy était, lui, en déplacement à Crozon, pour quelques heures de visite expresse et une table ronde, évidemment filmée, sur la défense du littoral. Il avait le visage marqué, le corps encore agité de tics. Etait-ce de la rage contenue ? Il promit 6 parcs marins d'ici 2012. Il refusa d'accuser les agriculteurs locaux de toute responsabilité dans la prolifération d'algues vertes.Il lâcha une sale formule, dont il a l'habitude, contre les écologistes. « Les intégristes... je ne sais pas si c'est l'effet médiatisation... mais on n'entend parler que d'eux.» NKM, sa ministre-alibi de l'Ecologie, assise à ses côtés, ne disait pas.
Jeudi 7 juillet, l'UMP de Jean-François Copé organisait une nouvelle opération de communication, une « convention sur les défis de l'immigration ». A peine 300 personnes s'étaient massées salle Victor Hugo à l'Assemblée nationale. Claude Guéant brilla par son discours, le ministre avait repris ses accents frontistes, jugeant « irresponsable » de pas « juguler » l'immigration... légale. Il faut des efforts surhumains, ce Guéant, pour tenter d'inquiéter l'électeur à propos de l'immigration. Le sujet est plus porteur que la sécurité, n'est-ce pas ?
L'UMP avait publié ses 23 propositions sur le sujet. Y en avait-il une originale ou novatrice, après bientôt 10 ans de gestion UMPiste ? Non. La langue y était de bois: « taxe sur les transactions financières pour financer le développement économique », « renforcement des contrôles », « renforcer les capacités des centres de rétention administrative », etc. Le climat fut pourtant houleux. Il y avait des relents du débat sur l'identité nationale. Quelques militants étaient visiblement exaspérés, prêts à siffler les plus modérés des orateurs.
En ces temps de Berezina, une fraction de la droite recomplexée par 4 années de mandature sarkozyenne s'est redécouvre « gaulliste sociale ». Christian Estrosi explique sur les ondes qu'il trouve sans intérêt les conventions de son ancien ami Copé. Jeannette Boughrab, secrétaire d'Etat à la jeunesse, confie sur i-Télé qu'elle arrêtera peut être la politique car elle préfère retourner dans son placard du conseil d'Etat. Et Henri Guaino essaye de trouver quelques crédits à la présidence Sarkozy dans ... la suppression du bouclier fiscal.
Saviez-vous que la France compte 12% de ménages surendettés supplémentaires cette année ? Il y a un an,Christine Lagarde nous vantait ses grandes mesures. Cette semaine, elle tenait sa première conférence de presse au poste de directrice générale du FMI. L'ancienne ministre n'était donc plus là pour commenter ces mauvais résultats de Sarkofrance. Certains attendent qu'un autre passé la rattrape. Dans l'affaire du Crédit Lyonnais contre Bernard Tapie, la directrice du FMI a obtenu un nouveau sursis. La Cour de Justice de la République, qui devait statuer ce vendredi sur l'ouverture ou non d'une instruction, a reporté sa décision au 4 août. L'un de ses membres (l'épouse du socialiste Pierre Joxe) s'est tardivement récusé et son remplaçant connaît mal le dossier...
Vendredi, le Monarque était déjà reparti en Falcon présidentiel rejoindre sa douce. On avait compris que certaines affaires ne le lâcheraient pas. « L'ami Guy », comme le qualifiait Sarkozy, avait finalement été mis en examen mercredi, pour « recel d'abus de confiance » et pour la détention de tableaux que la justice soupçonne d'avoir été volés. Guy Wildenstein, collectionneur d'art et grand ami du Monarque, est aussi responsable de l'UMP pour la Côte Est des Etats-Unis.
Plus grave encore, le domicile d'un ancien collaborateur de Nicolas Sarkozy lui-même avait été perquisitionné dans l'affaire de Karachi, mardi dernier. On ne l'apprit que vendredi. Thierry Gaubert, ancien secrétaire général de la mairie de Neuilly, était chef adjoint de cabinet de Sarkozy au ministère du budget, de 1993 à 1995. C'était aussi un ami de Ziad Takieddine, ... l'un des deux intermédiaires imposés par le gouvernement Balladur dans la vente des sous-marins au Pakistan... Les juges Le Loire et Van Ruymbeke cherchent des preuves du financement politique illégal de la campagne d'Edouard Balladur via ces ventes d'armes.
Ami sarkozyste, prépare-toi.
La campagne sera rude.