LA PERMISSION DE MINUIT de Delphine Gleize

Publié le 08 juillet 2011 par Celine_diane

Xeroderma Pigmentosum, ou XP, est le nom d’une déficience génétique rare qui empêche les enfants malades d’être exposés aux rayons du soleil. C’est aussi le lien, latent, solide, puissant, qui unit Romain, 13 ans, "enfant de la lune" et David, la cinquantaine, professeur en dermatologie. C’est aussi, et Delphine Gleize, l’a bien compris, un beau sujet de cinéma. La maladie n’est jamais facile à traiter sur grand écran, il faut souvent éviter le misérabilisme, le pathos, le sinistre. En général, deux solutions : a) pencher pour la surenchère hystérique bouleversante (exemple : Les Corps impatients de Giannoli), ou, b) opter pour un traitement plus pudique, plus intériorisé. La réalisatrice, en choisissant le plan b, signe une œuvre superbe, psychologiquement très complexe, fouillée, pleine d’une subtilité magnifique et d’une intensité émotionnelle incroyable. Atout de taille: les interprètes irréprochables. Le formidable duo Lindon/Devos d’abord, qui se reforme pour la troisième fois après La Moustache et Ceux qui restent, et, surtout Quentin Challal, tête d’ange dissimulé sous de longs cheveux, attachant ado vampire qui rêve de faire l’amour, en pied-de-nez à cette mort, qui l’attend, en bout de course.
D’une beauté rare, La Permission de minuit est un sommet de profondeur et de justesse, qui dit tout en peu de mots, qui étreint tout avec naturel, qui filme le quotidien à bonne distance, qui contemple non-dits, froide réalité et personnages travaillés. Delphine Gleize chérit particulièrement la thématique de l’enfance (Carnages, L’homme qui rêvait d’un enfant), le rapport à l’autre, à l’espace. Son sujet, là, elle a envie de l’emmener vers des cimes nouvelles, des perspectives d’images inédites. Et cela se voit constamment. Dans le regard qu’elle pose sur cette belle amitié entre l’homme et le garçon. Dans la manière de caresser ces peaux, tour à tour menacées, caressées, abîmées, embrassées. Dans la façon qu’elle a, de libérer ses protagonistes de leurs entraves (leur chair, leur hôpital, leur métier, leur destin) pour les jeter plus loin, dans une liberté à conquérir, dans des lieux à investir (la rue comme menace, la grotte comme refuge). La gigantesque émotion qui s’en dégage est vraie, authentique, poignante. Raconté, La Permission de minuit a des allures de drame étouffant ; ressenti, il est sublime, hautement raffiné et véritablement … solaire.

Disponible en DVD depuis le 5 juillet.