L’or rouge du Garlaban

Publié le 08 juillet 2011 par Thierry Gil @daubagnealalune

Un Aubagnais renoue avec la tradition des cultivars, ces champs de safran cultivés autrefois en Provence

Originaire du Moyen-Orient, le safran demeure l’épice la plus chère au monde. Est-ce pour cette raison que, selon certaines sources, son nom viendrait du persan zarparan, zar signifiant « or » et par signifiant « plume », ou « stigmate », ou plus simplement à cause de la tonalité jaune-or qu’il donne aux plats confectionnés ? Quelque soit son origine, ses caractéristiques font du safran un ingrédient fortement prisé pour de nombreuses spécialités culinaires dans le monde entier. Depuis plusieurs années des Provençaux se sont lancés dans la production de cette épice – dont les champs indiens firent verser des larmes à Alexandre Le Grand raconte la légende – renouant ainsi avec une tradition ancienne dans notre région qui fut l’un des plus gros producteurs entre le 14ème et le 18ème siècle. Parmi ces chercheurs d’or : Pierre Rodeville, un Aubagnais qui possède plusieurs hectares de terres agricoles au sud-ouest de la commune. Plus connu pour son engagement politique – il est adjoint au maire d’Aubagne – ou pour sa passion pour l’Histoire contemporaine et l’édition – il a notamment publié plusieurs ouvrages sur les « gens d’ici » – Pierre Rodeville est un homme qui croque la vie à pleines dents en dépit d’un accident de moto qui le priva très jeune de l’usage de ses jambes. C’est aussi un homme qui ne renonce jamais à ses rêves. Celui de redonner vie à des terres en jachère depuis 1982 chatouillait patiemment et méthodiquement le fond de son âme d’épicurien depuis des années.

Le safran est affaire de connaisseur

En 2008, Pierre et son épouse Gaëlle se lancent enfin dans l’aventure et choisissent de planter des bulbes de safran dont la culture n’exige pas beaucoup d’eau. Ils glanent des informations ici et là, auprès de cultivateurs, et bénéficient de l’aide d’un technicien agricole à leurs débuts : « La culture du safran, explique Pierre, ne demande pas une expertise extraordinaire. En revanche, ça prend beaucoup de temps. Il faut au moins une heure de travail pour obtenir un seul gramme de safran ». Plantées en août, les fleurs de safran donnent leur récolte d’or rouge à l’automne. La production ici est artisanale et familiale. Les 35000 bulbes plantés ont donné environ 300g de safran et l’objectif est d’atteindre le kilo d’ici 2015. C’est peu et beaucoup à la fois quand on sait que le prix moyen d’un gramme de safran est de 30 euros. Pour le couple qui vient de créer la marque Les Arômes du Garlaban, l’essentiel n’est pas là. Si l’activité doit être rémunératrice, elle ne doit pas oblitérer le plaisir qu’elle procure. On devine dans les propos de Pierre une certaine fierté : « Le safran prend son arôme particulier en fonction des conditions géo-climatiques et à la façon de le sécher. C’est un tour de mains. Chaque cultivateur à le sien » et, sans parler de « fièvre » qui guetterait le chercheur d’or, les prémices d’une passion addictive : «  Le safran est affaire de connaisseur. Il est essentiellement utilisé avec le poisson ou avec la paëlla. Après il faut être un vrai amateur pour pouvoir l’utiliser. Tu ne vas pas naturellement vers le safran parce que c’est relativement cher ». Pour partager leur nouvelle passion, Pierre et Gaëlle ont fait le choix d’offrir au public des produits dérivés, des confitures d’oranges et de pommes, mais aussi de poireaux et de poivrons qu’ils vendent dans les salons gastronomiques et sur les étals des marchés. C’est là que vous avez une chance de les rencontrer. A Aubagne les arômes de safran se mêlent désormais aux senteurs du marché provençal.

En savoir plus : www.safrandugarlaban.fr