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A propos d’Un amour de jeunesse de Mia Hansen-Love 3.5 out of 5 stars
Lola Créton, Magne Havard Brekke
A Paris, Camille, 15 ans, est folle amoureuse de Sullivan, un garçon de son âge. Après avoir passé l’été ensemble en Ardèche, Sullivan part en voyage en Amérique du Sud comme il l’avait annoncé à Camille. Mais au bout de quelques mois, il disparait de la vie de Camille qui tombe en dépression. Plusieurs années après, alors que Camille vit avec un architecte reconnu dont elle est amoureuse, Sullivan réapparait dans sa vie. Et avec lui, les sentiments amoureux de la jeune femme…
Le style très littéraire de Mia Hansen-Love confère à son troisième film (après Tout est pardonné, 2007 et Le père de mes enfants, 2009) des allures de roman initiatique construit en feuilletons. Dans ce dernier volet qu’Hansen-Love considère elle-même comme faisant partie d’une trilogie, une adolescente tombe désespérément amoureuse d’un garçon de son âge qui se sentant étouffé par cet amour, préfère disparaitre. On peut comprendre la soif de liberté et de voyager d’un jeune homme de 15 ans. Plus difficilement que Camille, 4 ans plus tard, soit toujours aussi éperdument amoureuse de lui.
Tout le film consiste en un portrait psychologique à la fois réaliste et intimiste d’une jeune femme qui se construit dans la souffrance et l’adversité amoureuses. Ambitieuse, Camille se fait remarquer par un professeur d’architecture beaucoup plus âgé qu’elle. Elle revit à son contact mais pense toujours à Sullivan.
Qui n’a pas connu de désillusions amoureuses à 15 ans ? Qui n’a pas eu un mal de chien à se remettre d’un échec sentimental qui coïncide aux premiers émois amoureux, la découverte de l’amour, ce sentiment inconnu qui vous submerge et vous inonde ? En même temps qu’elle tombe amoureuse pour la première fois de sa vie, Camille connait une terrible désillusion dont elle n’arrive pas à se remettre.
En même temps qu’elle goûte à cet éveil à la chair, à la sensualité, à la découverte de son corps, de celui de Sullivan, Camille fait ses premiers pas dans univers inconnu sensuel, aussi envoutant que cruel.
Cette découverte des sens, de son corps, de l’amour, Mia Hansen Love les filme avec une infinie sensibilité, rendant les scènes de retrouvailles avec Sullivan émouvantes comme celles où Camille doit endurer seule la désillusion injuste mais qui l’aidera à se construire. Formateur, le désenchantement amoureux ? Pas sûr qu’il n’apporte pas plutôt de la rancœur. Hansen-Love observe, patiente, le parcours de cette jeune femme (jouée par une extraordinaire Lola Créton) qui se construit dans la douleur mais aussi l’abnégation, le courage, la volonté…
Lola Créton, Sebastian Urzendowsky
Le film suit l’évolution de Camille à travers plusieurs âges. Il commence en 1999 (Camille a 15 ans) et se termine en 2007 lorsqu’elle en a 24 ou 25. Camille est une femme de son époque mais aussi d’un autre temps. Pleine de paradoxes, elle est ambitieuse et une architecte douée. En amour, c’est une sentimentale qui partage une naïveté amoureuse qui fait penser à celle de Madame Bovary. La construction du film évoque d’ailleurs celle du roman de Flaubert. Camille vit avec un architecte qu’elle aime mais plutôt comme un frère ou un ami envers elle serait infiniment reconnaissante. A vie en quelque sorte. Cet architecte (Magne Havard Brekke, sosie de Klaus Kinski) l’a à la fois encouragé à continuer dans l’architecture et redonné envie de se battre, de vivre.
Mais Camille reprend vite goût à son amant, dont elle ne se rend pas compte qu’il est volage et beaucoup moins amoureux qu’elle. L’amour rend aveugle, c’est bien connu. Mais Hansen Love se garde bien de tout jugement moral. Elle apprivoise le parcours de cette jeune femme avec un sens de l’observation aigu, une attention infinie portée à son actrice. Au lieu de naïveté, c’est davantage d’innocence auquel le personnage de Camille fait penser.
Malgré quelques longueurs et un Sebastian Urzendowsky (Sullivan) en dessous des autres acteurs, Un amour de jeunesse est un film teinté d’humour subtil (merci Valérie Bonneton), extrêmement sensible, loin des blockbusters et autres navets attendus cet été. Et dans ses dialogues, on se prend à repenser à Rohmer, mort l’année dernière (Conté d’été, 1996)…
www.youtube.com/watch?v=eNlFcUaC-Dk
Film français de Mia Hansen-Love avec Lola Créton, Sebastian Urzendowsky, Magne Havard Brekke, Valérie Bonneton (1 h 50)
Scénario : 3 out of 5 stars
Mise en scène : 3 out of 5 stars
Acteurs : 3.5 out of 5 stars
Dialogues : 4 out of 5 stars