Je passerai très vite sur le parallèle que l’on peut établir entre cet excellent film et le chef d’œuvre absolu de Sergio Leone « Il était une fois l’Amérique ». Il y a beaucoup d’accointances, me semble-t-il entre les deux films, notamment dans le prologue. Plusieurs pages seraient alors nécessaires pour en analyser les tenants et les aboutissants. Je vais donc au plus pressé pour dire tout le bien que je pense de « Sleepers » qui m’était complètement passé au-dessus, lors de sa sortie il y a une quinzaine d’années.
Malgré un casting prestigieux de comédiens déjà affûtés, alors que d’autres pointaient tranquillement le bout de leur nez. Un exemple avec Brad Pitt , déjà très fortiche dans l’art de disserter sur plusieurs gammes et des gamins tout aussi remarquables (Brad Renfro, Joseph Perrino,Jonathan Tucker, Geoffrey Wigdor ) embarqués dans une histoire vraie, dont l’écho doit encore se répercuter dans quelques centres de détentions pour ados.
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Dans l’un d’eux, au milieu des années soixante, quatre gamins du quartier populaire de Hell’s Kitchen de New York sont incarcérés à la suite d’une plaisanterie qui tourne au drame. Ce qu’ils vont y subir de la part de gardiens sadiques, et pervers , est inimaginable. A leur sortie de prison, leurs chemins se séparent, mais quand l’occasion de se venger se présente, ils ne vont pas hésiter.
J’arrête là le récit pour ne pas trop en dire sur une histoire qui va bien au-delà de la vengeance, pure et simple. Il s’agit d’une revanche sur la vie, patiemment élaborée par tout un système que le scénario de Lorenzo Carcaterra , l’auteur du livre, décortique de manière tout aussi « monstrueuse ». Aux instants de bonheur juvénile, succèdent le noir et blanc indistinct et furtif des temps de maltraitance. A l’évidence, Barry Levinson, qui co-signe le scénario, a su traduire en images et en son,toute la colère rentrée du roman, conférant à sa mise en scène un tempo édifiant.
Quatre gamins sympathiques emportés par un tourbillon de mauvaise vie...
Même les traditionnelles scènes de tribunal ont ici une toute autre allure. Il est vrai que les manigances du jeune procureur, qui accuse publiquement ses deux anciens copains du meurtre d’un des gardiens, ont de quoi déstabiliser le plus ardu des spectateurs. Ce sont des scènes magnifiques portées par un avocat pitoyable que Dustin Hoffman , sublime dans sa déchéance. Une marionnette aux mains de l’accusateur pour qui la vengeance est un plat qui se mange froid.
C’est l’une des très bonnes idées du scénario qui n’en manquent pas du tout, avec des personnages haut en couleur, que chaque acteur pose avec une efficacité redoutable. Kevin Bacon,le gardien tortionnaire est incroyablement tortionnaire, autant dans l’esprit que dans le geste. Et Robert De Niro , dans le rôle du curé de la paroisse de Hell’s Kitchen… Dès qu’il apparaît, sans rien dire ou si peu, il est déjà le père Bobby à qui bien évidemment on donnerait le bon dieu sans confession. Mais le diable n’est pas loin ….