Le quatrième volume de l'Appel du peuple a été dédicacé hier à Yaoundé.Cinq volumes déjà, et rien de particulier à noter dans la série de « Paul Biya, l'Appel du peuple. » Le cinquième volume n'a pas dérogé à la règle. Les mêmes textes venant des militants et sympathisants du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (Rdpc), parfois dissimulés sous diverses appellations et qualités. Artistes, simples militants, cadres du parti, étudiants, tradi-praticiens, universitaires, chefs traditionnels, associations de parents d'élèves, et autres, se sont donné rendez-vous dans cet autre volume, à travers 159 motions rédigées en français et en anglais, regroupées dans cinq centres d'intérêt : «supporters say no giving-up», «Remerciements et gratitude», «Peace and stability», «garantir le respect de la chose publique» et «les nouvelles perspectives économiques».Et comme dans les précédentes éditions, le Premier ministre signe le prologue dans les deux langues officielles du pays, alors que René Sadi, le secrétaire général du rassemblement démocratique du peuple camerounais (Rdpc) reste à la préface. Jaques Fame Ndongo et Elvis Ngolle Ngolle sont à l'introduction générale, pendant que Marie Claire Nnana et Shey Peter Mabu, respectivement directeur général et directeur général adjoint de la Sopécam, éditrice du livre, signent le Post-scriptum. De même que Paul Biya est l'auteur de l'épilogue. Cloîtré dans ce mutisme et ce suspens qu'il continue d'entretenir, depuis des années déjà, Paul Biya voit publier en guise de réponse la lettre qu'il a écrite au peuple camerounais le 03 novembre 2009, à la veille de la célébration de ses 27 ans de magistrature suprême. Il y déclare qu'il «entend les appels et motions de soutien que vous ne cessez de m'adresser depuis peu».
Chasse aux grandes puissances
Mais il apparaît entre les 470 pages, une contextualisation des lignes de front. Au-delà des simples motions et appels construits sur la même base, pour pratiquement le même message, les auteurs des hors-texte et des para-textes axent leurs propos sur une ligne de fond qui épouse le contexte international. Cette chasse aux grandes puissances tapies derrière la communauté internationale, contre ceux qu'ils jugent comme des dictateurs.
Dans son prologue, Yang Philemon, le Premier ministre, pose que «les motions de soutien affirment publiquement que les Camerounais refusent la violence, l'insurrection ou les activités criminelles, comme moyens efficaces pour apporter des changements économiques ou démocratiques». Annonçant que le livre «prouve de manière particulière que dans un pays d'hommes et de femmes libres, la liberté de soutenir des candidats à des postes politiques est un droit inaliénable protégé par notre constitution». Sans référence, mais convaincu. Enseignant aux lecteurs que «la démocratie n'est pas un événement instantané. C'est un processus qui nécessite de la patience, du courage et de la détermination». Et, «les camerounais savent que des choix peu judicieux peuvent détruire des sociétés, des nations, voire des civilisations». Or Paul Biya est le seul à pouvoir garantir tout cela, croient tous les intervenants de la cérémonie d'hier. Et les sollicitations du peuple sont pour Marie Claire Nnana, «un acte de foi en l'avenir». Pour Yang Philemon, déjà, «en acceptant d'être candidat, le président Paul Biya amplifiera l'appel retentissant émanant avec insistance de ses concitoyens». Et «tous les Camerounais sont conscients du fait que l'histoire nous donnera raison, étant donné que nous choisissons le dirigeant au moment adéquat», croit-il.
Tobie Ndi
Dans un contexte marqué par un débat sur l'éligibilité du président sortant, René Sadi estime que «le vitalité de la controverse politique au Cameroun confirme la maturité grandissante de notre société». Fame Ndongo qui campe sur l'argumentation, la liberté et la foi des signataires, est convaincu qu'ils ne se trompent pas sur le candidat qui vaincra à la présidentielle à venir. Alors que le Sg/Rdpc appelle à la prudence : «ces vagues d'appels ne doivent pas nous endormir... rien n'est gagné d'avance», avoue le Sg du parti au pouvoir. Pour ragaillardir ses camarades dont certains commencent à regarder autrement.
Là où un cadre de ce parti n'hésite pas à inviter ses camarades à considérer le plaidoyer du jeune Tobie Ndi qui, en se relançant dans la course pour un nouveau défi face à Biya à la tête du part, souhaite une révision de ces textes, afin que le président du parti ne soit plus forcément le candidat à l'élection présidentielle. «Imaginez un seul instant que le président soit hors course», lance d'ailleurs Tobie Ndi. Mais déjà, Sadi a prévenu : «les jauges de la légitimité ne sont plus à rechercher ni dans les diatribes de l'opposition qui est dans son rôle, ni dans la virulence d'un courant du discours médiatique qui exerce sa mission critique, encore moins dans le propos libre et souvent précipité de tel observateur étranger qui applique, sans recul, des grilles de lecture inadaptées au contexte camerounais». Un peu comme une leçon à la nouvelle «communauté internationale».