Après avoir minutieusement étudié le programme de l’édition 2011 de la manifestation parisienne, le premier film sur lequel j’ai jeté mon dévolu fut They call her Cleopatra Wong, un film d’exploitation fauché produit entre Singapour et les Philippines pour une bouchée de pain à la fin des seventies. C’est dans la petite salle 100 du Forum des Images que le film de Bobby Suarez (crédité sous le pseudo George Richardson à la réalisation) était projeté. Sur le papier, la projection d’une vieille série B asiatique. Dans les faits, un petit évènement rare, les projections de Cleopatra Wong sur grand écran n’étant pas légion, celle-ci se faisant carrément en présence de son actrice principale, Marrie Lee. Cette dernière a beau n’avoir jamais vraiment eu de carrière au-delà de son personnage de Cleopatra Wong, celui-ci devint culte en Asie et au-delà auprès des amateurs du genre, au point parait-il d’avoir tapé dans l’œil de Quentin Tarantino qui serait fan de la miss Wong jusqu’à en avoir une fresque sur un mur de sa maison et d’avoir un peu lorgné sur elle (entre autres) pour créer le personnage de The Bride aka Black Mamba dans Kill Bill.
Je m’attendais à voir Cleopatra Wong programmé dans l’une des deux grandes salles du Forum, mais finalement la salle 100 aura permis au film d’afficher quasi complet et d’offrir à Marrie Lee une salle comble à saluer. Au premier rang, l’homme aux sacs plastiques était là, égal à lui-même, avec cet air affairé et perdu qui lui est propre alors que de tous il est certainement, toujours, le moins perdu. Après une courte introduction au cours de laquelle elle nous assura qu’elle serait présente en fin de projection pour nous raconter souvenirs et anecdotes et répondre à nos questions, elle se glissa donc sur un siège du rang devant le mien, pile devant mes camarades de Made in Asie qui en étaient aussi contents que moi.
Vous l’aurez compris, le scénario est bien fumeux comme on les aime dans les bonnes vieilles séries B d’exploitation (ou dans leur récent hommage Black Dynamite !), et visuellement, tout est réuni pour que le charme soit rehaussé par un doux n’importe quoi jubilatoire, des accents américains improbables des personnages asiatiques qui parlent tous bien anglais aux bruitages forcés absolument délicieux, des dialogues branlants tellement pas drôles qu’ils le deviennent à ces acrobaties parfois proprement ahurissantes (tiens, je vais sauter par-dessus le mur de quatre mètres de haut – sans élan ! – pour échapper aux méchants ! Facile !). Et qu’on ne s’y trompe pas, Marrie Lee riait tout autant que les spectateurs devant le spectacle souvent réjouissant, il est vrai pas gâté par un format vidéo tronquant l’image et donnant l’impression que le cadreur était bourré lors du tournage.
Après ce petit moment de joie, Cleopatra Wong herself se présentait donc devant nous pour nous raconter ses souvenirs d’aventures, ses cascades mortelles, et sans oublier au passage faire un peu de promo pour Singapour, à venir visiter absolument selon elle.