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tUnE-yArDs, c'est le projet musical mené par l'Américaine Merill Garbus. En 2011, elle publiait w h o k i l l son deuxième album studio porté par l'excellente chanson phare Bizness. En 10 morceaux et en 40 minutes, l'artiste nous délivre un mélange de musicalité, d'originalité, de simplicité et d'ambition assez impressionnant.
Tout d'abord, il semblerait que tUnE-yArDs, ce soit la rencontre entre les technologies musicales du XXIème siècle et d'une femme préhistorique. On se retrouve face à une artiste qui fait de la musique de manière très primitive (comprenez en poussant des cris, en faisant des grimaces , en maniant des rythmes tribaux) mais qui fait ça quasi-seule avec un simple sampleur vocal et un ukulélé comme orchestre. Le résultat ne peut être que surprenant. L'album jongle entre la world music, le funk et le R&B, le hip-hop ou encore un certain jazz. Souvent accompagnée d'une basse bien lourde ou de cuivres, w h o k i l l est superbement réussi même s'il vous faudra sans doute plusieurs écoutes pour bien vous en apercevoir.
Gangsta vous étonnera par son flow, son refrain pop et ses breaks. Le refrain de Bizness envahira votre tête. My Country fera bouger certainement vos pieds et vous donnera des envies de danse afro (c'est d'ailleurs le titre qui ouvre son album avec pertinence et détermination). Doorstep est une ritournelle prenante et si vous fermez les yeux, Powa et Wolly Wolly Gong vous feront sans doute voyager, ou du moins rêver.
C'est ce qui s'est passé hier soir dans une petite salle de l'Ancienne Belgique à Bruxelles où j'ai eu la chance de la voir se produire sur scène. En un peu plus qu'une heure, la (pas si) belle a enchaîné des acrobaties vocales et rythmiques surprenantes sans filet. Devant un public apparemment déjà conquis, elle a joué les morceaux de son dernier LP avec une voix puissante, excentrique mais maîtrisée.
Sa musicalité est tout de même impressionnante: même en criant ou en faisant des bruits peu courants avec sa bouche, en auto-amplifiant des boucles vocales enregistrées en live, elle arrive à créer sur chaque morceau une mélodie et une montée qui scotchent le public du début à la fin. Sur Es-So, You Yes You ou le très bon Killa notamment, la salle était rentrée dans une transe menée par un kick africain et quelques riffs entêtants et répétés de son tout petit instrument. Tout est si musical, et pourtant il n'y a presque rien: sa voix puissante qu'elle utilise comme un instrument, son ukulélé, un bassiste souvent et deux personnes aux cuivres parfois.
Comme je vous le disais, w h o k i l l est un voyage dans le temps vers la préhistoire et la chanteuse traite d'ailleurs dans son album de sujets tels que le genre, la sexualité, ou les couleurs de peau. Comme si deux hommes vivant dans des grottes se rencontraient et s'interroger sur la race humaine.
Après 2 rappels, Merill Garbus fut délivrée et put ainsi continuer sa tournée en Europe où je l'espère elle séduira de nombreuses autres tribus.