Difficile l'exercice du second opus (enfin, si on considère que The Fame Monster n'était qu'un EP)... Même si Lady GaGa a une base de fans impressionnante, elle a aussi beaucoup de détracteurs: les fans des autres popstars, Britney Spears et Madonna en tête, ainsi que pas mal d'intellos de la musique, qui la considère comme une arriviste sans talent. Le talent, elle en a un minimum, c'est évident. Après pour le reste, est-ce de la chance, de la réelle folie, du marketing ou de l'innovation? C'est sans doute un mélange des trois.
Born This Way, qui s'est écoulé à plus de 2 millions d'exemplaires dans le monde dès sa première semaine, mais qui commence déjà à dégringoler, vaut-il le coup? On connaît déjà le titre éponyme que beaucoup considère comme un hymne LGBT. Clientélisme ou réel appel militant? Sans doute un peu des deux, mais la chanson, même si elle est beaucoup basée sur Express Yourself de Madonna est efficace et plaisante. Le titre avait notamment surpris par le changement d'ambiance musicale, plus dark. Il faut dire que le producteur DJ White Shadow n'a rien à voir avec RedOne. Ce dernier est par contre à la production de Judas, le second single qui utilise une métaphore Jésus/Judas afin de traiter d'une histoire de trahison amoureuse. Le pseudo-blasphème musical est très bruyant, peut être prenant mais reste quand même décevant. C'est même au final l'un des plus mauvais titres de l'album... Les deux premiers singles marquent le pas: le son a changé, on est déjà loin maintenant de The Fame. Lady GaGa est devenue plus Goth (en surface du moins), plus sombre.
Le disque s'ouvre sur Marry The Night, du producteur Garibay avec qui la star avait déjà travaillé sur le titre Dance In The Dark. Le titre d'ouverture contient de l'orgue et parle de mariage. La messe est dire: elle s'inspire donc de la religion, qui revient quand même souvent dans l'album, comme Madonna l'a fait à plusieurs reprises pendant sa carrière. Le titre est pop, facile, pas très innovant, mais passe bien. Il se rapproche un peu de Hair, single promotionnel, même si c'est RedOne qui signe ce titre là. Mais de Hair, on ne retiendra que la mélodie car les paroles ne volent pas très haut. Lady GaGa y chante que quand elle était jeune, ses cheveux étaient sa seule façon d'être libre... On excusera ces paroles philosophiques grâce à un refrain ultra-accrocheur et un break qui rend hommage aux années 80 et 90 avec un gros snare qui incitera facilement la foule d'un stade tout entier à taper dans les mains. Highway Unicorn (Road To Love) utilise la même technique et le titre s'en sort pas mal, même s'il est parfois un peu bruyant. Le refrain en revanche est un des meilleurs de l'album, imparable.
Government Hooker et Scheiße sont deux bonnes surprises. Les deux titres avaient déjà été remixés et utilisés par Thierry Mugler afin de créer un buzz autour de la sortie de l'album. L'intro du premier est singulière et le riff electro sur lequel le morceau est construit est intéressant. Le titre n'a pas la structure d'un titre pop habituel, c'est ce qui le rend original. Quant au second dont on ne traduira pas le titre ici, il débute par une boucle scandée en Allemand, langue volontairement disgracieuse qui délivre ici quand même un petit effet notoire. L'instrumental, produit par RedOne, change de ce que le producteur nous a habitué à entendre, et c'est pas plus mal car à force de travailler partout et à tout va, on n'apprécie plus du tout son style.
The Edge Of Glory, troisième single, vient clore l'album et est réussi malgré l'utilisation risquée de sonorités très rétros. Décidément le vintage revient réellement à la mode. Le titre est également très appréciable en version acoustique. Le refrain est puissant, et le long break agrémenté de saxophone montre qu'au-delà de l'aspect sonore saturé et synthétique présent tout au long de l'album, Lady GaGa a un réel amour pour les vrais instruments de musique. You and I, la seule ballade, au piano évidemment, montre que la jeune artiste, du haut de ses 25 années, maîtrise le principe de la chanson pop, même si le tout reste quand même un peu trop cliché.
Electric Chapel et Heavy Metal Lover sont de bons titres, mais les sonorités utilisées et la production des morceaux risqueraient de dérouter un trop grand nombre de gens s'ils étaient exploités comme single...
Americano risque d'en surprendre certains. Comme à chaque fois, on a le droit à un titre en espagnol: il faut bien séduire le marché sud-Américain... Le morceau est assez étrange, un genre de ballade uptempo rappelant l'univers épique des western, ou Teeth sur le dernier album. La voix est travaillée de manière très spéciale et le résultat pourrait provoquer des maux de tête...Bloody Mary est sympa mais sans plus: le titre rappelle trop parfois le So Happy I Could Die sur The Fame Monster. Bad Kids n'est pas non plus exceptionnel. Le titre est même assez mal produit. Enfin, pour ceux qui hésite à acheter la version deluxe contenant les 3 titres bonus, économisez votre argent...
C'est donc un album au résultat mitigé que la nouvelle superstar de la pop mondiale nous offre ici. On pourrait le résumer par la locution "Oui, mais...". Certes, il y a une cohésion certaine dans l'album et un véritable projet artistique. Mais attendait-on réellement de quelqu'un de GaGa un retour en arrière, un hommage au passé? On aurait sans doute préféré qu'elle nous transporte dans le futur plutôt que de tenter de moderniser des sons qui ont fait le succès des deux dernières décennies du XXème siècle. Mais il faut dire que l'album a été enregistré, écrit et composé pendant sa longue tournée The Monster Ball Tour et que l'artiste n'a donc pas vraiment eu le temps de se poser tranquillement pour nous offrir quelque chose de vraiment transcendant. On associe donc facilement certains nouveaux morceaux à d'autres sur l'album précédent... Le tout est donc sympa, mais on reste sur notre faim...
13,5/20