Les Highlanders ne sont pas immortels, mais ils reviennent d’entre les morts. Les dernières saisons avaient été une lente descente aux enfers dans les tréfonds du classement du super 14 (9e, 9e, 11e, 11e, 12e). L’été dernier n’annonçait guère un renouveau avec le départ d’Israel Dagg, la star naissante, qui allait tenter de se faire une place au soleil chez les Crusaders. Peu auraient misé sur une place de 8e pour la franchise d’Otago et du Southland, laissant échapper les play-offs dans les dernières journées.
Colin Slade
Pourtant, les Highlanders ont eu le nez creux à l’intersaison. Le travail accompli est d’abord l’œuvre de Jamie Joseph, ancien troisième ligne black (qui a aussi joué pour le Japon à la CdM 1999) et d’Otago, qui a pris les rênes de l’équipe l’été dernier, arrivant des Wellington Lions. Au niveau transferts, Berquist était également parti chez les Croisés pour être la doublure de Dan Carter, mais les Highlanders récupéraient en échange le prometteur ouvreur Colin Slade. Le dynamique ailier Kade Poki suivait le même chemin. Ils n’hésitèrent pas non plus à aller piocher dans les équipes d’ITM Cup, comme le polyvalent 5/8e Lima Sopoaga, son coéquipier à Wellington le centre Shaun Treeby, des joueurs que Jamie Joseph connaissait donc bien, ainsi que Matt Saunders, James Paterson ou encore Siale Piutau. Quelques joueurs plus expérimentés complétèrent le tableau, comme Mo Schwalger le talonneur samoan revenant d’Angleterre ou Jarred Hoeata le solide deuxième ligne en provenance des Chiefs. Il restait à trouver l’alchimie entre les anciens et les nouveaux pour redonner à ce groupe un esprit guerrier, digne des colons écossais qui peuplèrent la province et dont l’équipe tire son nom.
Jamie Mackintosh
Jamie Mckintosh prenait le capitanat, et le puissant pilier avait pour mission de conduire ses troupes vers un ciel meilleur. Dans cette tâche, les vieux briscards l’ont cette saison assisté de leur mieux. Adam Thomson, flanker à la tignasse blonde aperçu sous le maillot All blacks, démarrait sa saison en trombe, toujours aux quatre coins du terrain, inlassable plaqueur et gratteur. Jason Rutledge au talon retrouvait ses jambes de vingt ans, comme lors de son doublé face aux Brumbies. Jimmy Cowan a été le cerveau de cette équipe, un vrai numéro neuf incisif, malin et pénible pour ses adversaires. Ben Smith a justifié la confiance que le sélectionneur lui avait témoignée auparavant avec une saison de haute volée au poste d’arrière. Certains ont su hisser leur niveau de jeu, comme Bekhuis et le nouveau venu Hoeta en deuxième ligne, le flanker Soakai et le revanchard numéro huit Nasi Manu après une première saison ternie par une blessure, Kendrick Lynn au centre ou encore le jeune ouvreur-arrière Robbie Robinson. Les nouveaux se mirent au diapason, Sopoaga, Treeby, Poki, Piutau et Paterson (appelé avec les USA pour la CdM 2011) participant tous au renouveau dans le jeu et à l’audace retrouvée des Highlanders.
Bulls vs Highlanders, 3e journée
Jimmy Cowan
Mais plus que des performances individuelles, c’est l’esprit qui est à saluer du côté de Dunedin. Les Highlanders n’ont cette saison rien lâché, comme le prouve leur début de saison canon qui a surpris tout le monde. Une première victoire chez les Hurricanes, une seconde à domicile face aux Chiefs, et enfin cerise sur le gâteau celle chez le champion en titre, les Bulls, lors de la troisième journée. A chaque fois, les joueurs combattent de la première à la dernière minute, ne lâchant rien ni sur les rucks ni en défense, n’hésitant pas à jouer crânement leur chance dès qu’ils en ont l’occasion. Ils redescendront sur terre par la suite avec une défaite chez le finaliste de l’an passé, les Stormers, puis une correction à domicile encaissée face aux terribles Crusaders. Mais à l’heure de leur première journée de repos, à la sixième manche et au tiers du championnat, le bilan était globalement positif pour les Highlanders.
Tom Donnelly
Les journées suivantes étaient encore plus belles : deux victoires à l’arrachée face aux Brumbies et aux Cheetahs, une démonstration face aux Rebels, et le sommet sans doute de la saison, une revanche arrachée d’une main de maître dans l’antre des Crusaders lors de la 10e journée. Sommet, car les Highlanders ont atteint leur meilleur niveau et leur meilleur classement à ce moment là. Malheureusement, le souffle allait retomber. L’équipe connaîtra de nombreuses défaites jusqu’à la fin du championnat. On peut supposer que la cause est un essoufflement sur le plan physique, en partie imputable à un manque de solution dans le turn-over. Tom Donnelly par exemple était loin d’apporter en deuxième ligne ce qu’on peut attendre d’un joueur avec une quinzaine de sélections. Les trop nombreuses blessures de Slade et Sopoaga, qui obligeront même à rappeler le vétéran Tony Brown pour dépanner à l’ouverture, peuvent aussi expliquer que le ressort se soit cassé.
Crusaders vs Highlanders, 10e journée
Adam Thomson
Quoiqu’il en soit, même si les performances de la deuxième partie de saison n’ont pas répondu au niveau affiché lors de la première partie, les Highlanders ont prouvé qu’ils pouvaient faire bien mieux que ce qu’une trop longue agonie avait laissé croire. Les Highlanders ont retrouvé leur fierté, et c’est bien là l’essentiel. L’avenir s’annonce sous les meilleurs auspices, avec des jeunes joueurs qui pourraient porter la province de nouveau vers les play-offs, qui n’ont pas été atteints depuis 2002. Lima Sopoaga prouve actuellement avec les baby blacks qu’il a un gros potentiel en premier centre. Colin Slade est un back up potentiel de Carter pour les All Blacks en 2011. Il faudra qu’il laisse derrière lui ces blessures récurrentes pour assumer ce rôle. Confirmer ne sera pas évident l’an prochain, mais les Highlanders en ont de toute évidence le potentiel. Il faut souhaiter en tout cas à des joueurs comme Cowan, Thomson, Mackintosh, que leur saison les amènera dans le squad pour la Coupe du Monde, à domicile. Les légendes de la franchise comme Jeff Wilson, Anton Oliver, Carl Hayman ou Taine Randell ont peut être enfin trouvé de dignes successeurs.