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La naissance d'une nation: Marie

Par Anne Onyme

naissancedunenation2Pierre Caron
Série La naissance d'une nation t.2
Bibliothèque Québécoise
498 pages

CoupdeCoeur

Résumé:

Héritière, en caractère et en fortune, de Vadeboncoeur, son grand-père et héros du premier volet de la série, Marie devient femme fort convoitée suite à la fuite de son mari dans les Îles françaises. Après la Grande Paix de Montréal, signée avec les peuples autochtones en l701, la colonie peut enfin prendre son essor économique et notre héroïne devient un des personnages incontournables de cette aventure. Mais elle ne peut rien contre l’antagonisme qui brûle entre la France et l’Angleterre, cette dernière ambitionnant de conquérir la Nouvelle-France. C’est cette montée vers l‘affrontement des Hauteurs d’Abraham, le 14 septembre l759 (ici relatée dans le détail), qui est racontée au quotidien des personnages de ce roman, dont l’un, Pierre-François, le fils de Marie, justement, participera à la célèbre bataille.

Mon commentaire:

Marie est la petite-fille de Vadeboncoeur, rencontré dans le premier tome de cette trilogie intitulé Thérèse. Sa naissance extraordinaire sur un morceau de glace à la dérive, son caractère enjoué et différent, ses jeux de garçon et son habitude de se promener partout pieds nus font d'elle une légende en Nouvelle-France. Surnommée Marie-Godine à cause de propension à perdre ses chaussures et à aller pieds nus, elle est connue dans toute la Nouvelle-France. Incapable de supporter le serrement des souliers à ses pieds, elle se présente pieds nus à un bal et le sera la plupart du temps au cours de sa vie, ce qui fait sourire les gens du coin, même le gouverneur!

Le premier tome de la série nous présentait la naissance de la Nouvelle-France et l'établissement des premiers colons avec tout ce qu'implique la vie rude sous notre climat. Ce second volume s'attarde principalement sur la période allant de 1711 à 1756. Les québécois vivaient tranquillement. Les guerres indiennes étaient choses du passé depuis qu'un traité de paix avait été entendu entre les nations. Par contre, la France abandonne maintenant de plus en plus sa colonie, sans lui donner le titre de province de France ou même de pays. Incapables d'être autonomes car on leur coupe l'herbe sous le pied, les colons se sentent délaissés et isolés. La menace anglaise plane sur le pays et le roman se termine sur la célèbre bataille des Plaines d'Abraham où les français doivent capituler devant les anglais.

Ce second tome aborde plusieurs thèmes intéressants de l'histoire. Les relations avec les amérindiens sont à leur meilleur depuis l'installation des premiers arrivants. Pour la première fois de l'histoire de la Nouvelle-France, des postes de dirigeants sont occupés par des personnes nées dans le Nouveau Monde. Le fossé entre les français de France et les canadiens-français commence à se creuser de plus en plus. Pour la France, les colons n'ont plus le même intérêt à leurs yeux. On se moque un peu d'eux, qui sont perçus comme des gens peu instruits, grossiers et s'exprimant différemment. Les québécois trouvent les français hautains et suffisants. On sent de plus en plus la distance entre les deux peuples, pourtant issus du même pays...

La menace anglaise n'aide en rien les anglais vivant en Nouvelle-France. Le personnage d'Olivier dans le roman a pour femme Jane, une anglaise d'origine. Ayant tout fait pour s'adapter à la Nouvelle-France, Jane fut étudiante des ursulines, une épouse aimante et une mère accomplie. Dans la bourgeoisie, tout ce que l'on retient d'elle ce sont ses origines anglaises. Elle vit quotidiennement le rejet et est ostracisée par ses voisins. La relation entre les canadiens-français et les anglais est abordée de différentes façons, que ce soit dans la vie quotidienne ou au niveau politique et militaire.

Il se produit plusieurs événements dans ce roman qui s'étale sur de nombreuses années. Pour Vadeboncoeur, l'autonomie de la Nouvelle-France passe par sa capacité à sortir de son isolement l'hiver. Son chantier naval va bon train et il partira en expédition afin de tenter de donner une certaine liberté à son pays, pays qu'il aime d'amour et auquel il a toujours cru. Plusieurs passages sont très émouvants. Son amitié avec Mitionemeg est toujours aussi forte et très touchante. Les liens entre les canadiens-français et les amérindiens sont plus serrés que jamais pour toutes sortes de raisons, jusqu'à que les anglais s'allient avec les iroquois pour contrer les francophones. On a le sentiment de revenir au tout début de la nation, excepté que maintenant, les enjeux sont différents.

Amitié, amours contrariées, sagesse, loyauté, ce second roman déborde d'événements et de personnages inoubliables, tout en retraçant une partie de notre histoire qui a contribuée à faire de notre nation ce qu'elle est aujourd'hui. Marie est un roman de qualité, incontournable pour comprendre qui nous sommes et d'où nous venons.

Quelques extraits:

"Aujourd'hui, j'ai enterré ma fille, mon dernier enfant, et on nous attend dans la salle commune pour baptiser ma petite-fille: l'avenir n'est jamais loin du passé. Il faut croire en la force du destin et puisque celui de ce pays est de survivre, il survivra." p.86

"J'ai appris de mon père qu'en France on appelle "été de la Saint-Martin" cet été court et soudain qui perce l'automne au mois d'octobre. Dans notre pays, pour nous souvenir que la paix demeure et demeurera possible entre nos peuples, nous l'appellerons l'"été des indiens"... p.148

"Ceux qui ont fondé ce pays ont choisi d'être braves avant d'être raisonnables et, aujourd'hui encore, lorsqu'on regarde en arrière, on parle de leur "folle entreprise"." p.216

"...il y a des odeurs de guerre jusque sur le cap, et je vois le matin où éclatera l'affrontement définitif. Tout y tend, s'en approche. Tous y pensent. Sans répit. D'un enfant qu'il était il y a si peu, ce pays est devenu trop rapidement un adulte tendu. Mais à bien y réfléchir, il ne pouvait en être autrement: ses richesses naturelles excitent la convoitise. Et la bête alléchée est anglaise." p.360


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