Yves Zogbo Junior est, depuis quelques jours, dans son pays en Côte d`Ivoire. Après près de sept (07) ans passés en exil. Une aventure que l`ex vedette de la Rti raconte dans cette interview. L`animateur fait aussi la lumière sur ce qui est appelé " L`affaire Blé Goudé", sa maladie et ceux qui lui sont venus en aide. L`homme de culture, toujours dans cette interview, parle de ses rapports avec le président Bédié et ce qu`il lui reproche. Mais aussi de ce qu`il compte faire pour la nouvelle Côte d`Ivoire.
M. Yves Zogbo Junior, vous revenez en Côte d`Ivoire après plusieurs années d`exil, peut-on savoir les raisons de cette longue absence de votre pays ?Il faut dire que j`étais dans une période assez trouble entre le coup d`Etat du général Guéi jusqu`à l`avènement au pouvoir du président Gbagbo. J`ai été victime de plusieurs attaques. La goutte d`eau qui fait déborder le vase, c`est que la dernière attaque a coûté la vie à un élément qui était commis à ma sécurité. C`était le trop plein. Je n`ai pas cherché à savoir d`où tout cela venait d`autant plus que les attaques précédentes n`avaient pas connu de responsabilités directes malgré les enquêtes. Je me suis dit, trop c`est trop, je prends du recul. Je suis allé à Cotonou. De ce pays, les choses se sont envenimées parce que mon passage avait entraîné une tonne de rumeurs. J`ai donc continué.
Que disaient ces rumeurs ?Des milliards de dollars, je ne sais pas. Bref une chose est sûre, je reste quelqu`un qui ne fonctionne pas sur les choses du passé. Je sais que les Ivoiriens ont tendance à adorer tout ce qui est derrière. Mais vu ce que j`ai enduré et que je ne souhaite à personne, je préfère parler de perspectives. C`est la chose pour moi la plus importante.
S’agissant de ces rumeurs, on a parlé de problèmes que vous auriez eus avec Blé Goudé ?Ça aussi, ça reste dans les rumeurs parce que je n`ai jamais entendu de problèmes avec Blé Goudé. Venant de Blé Goudé. J`ai entendu parler de problème de la rumeur. Et comme je n`ai jamais considéré la rumeur, je reste dans la logique de la rumeur. Le jour où une tierce personne se pointera devant moi avec une pièce formelle, elle aura la réponse formelle. Je sais ce que la rumeur a coûté à certaines personnalités de ce pays et j`ai le dos très large pour supporter ces genres de quolibets et avancer.
Des problèmes d`argent, vous en n`avez jamais eus avec Blé Goudé ?Blé Goudé vous a parlé de démêlés avec moi dans votre journal ? Je vous ramène la question et j`attends votre réponse.
Pas directement.Bon pas directement aussi. Donc je reste toujours dans la rumeur.
Durant ce temps d`exil, que faisait Yves Zogbo Junior comme activité ?D`abord j`arrive à Cotonou. C`est un pays que je ne connaissais pas. Il fallait s`inscrire dans un tissu tout nouveau. J`ai la chance de rencontrer le président Koné Dossongui qui me met en contact avec une de ses structures qu`il était en train de monter. J`ai commencé à travailler avec lui sur le plan des évènementiels, de la communication. Organiser plusieurs manifestations pour implanter la marque. Et puis le Bénin étant un peu restreint en terme de perspectives professionnelles, mes amitiés avec certains amis dans les pays comme la Rdc ou le Congo Brazzaville m`ont fait envisager d`autres projets. C`est la raison pour laquelle, j`ai quitté Cotonou pour aller vers d`autres cieux, découvrir certains pays qui m`ont beaucoup apporté auxquels j`ai apporté ce que je savais faire. Et puis je suis tombé malade.
Et c`est comme cela que vous vous êtes retrouvé en France ?D`abord j`étais en Rdc, après, je me retrouve au Congo Brazzaville pour la campagne du président Sassou N`guesso. C`est après sa campagne que je suis tombé malade. Je ne tombe pas malade donc je ne pars pas hospitalisé en France. En France, j`y allais me reposer après la campagne. C`est donc de l`aéroport que j`ai eu l`idée de faire un contrôle de santé. J`arrive au contrôle, le médecin m`explique toutes les pathologies qui me traversent. Automatiquement, je passe à l`hospitalisation. Ça a duré.
Ça va mieux maintenant ?Grâce à Dieu. Si vous m`aviez vu il y a encore une année, je crois que vous auriez eu peur. Mais les prières, le soutien de beaucoup d`Ivoiriens, la médecine ont fait qu`aujourd`hui, on peut reprendre du poil de la bête et travailler.
De votre lit d`hôpital, vous avez suivi la crise ivoirienne.Oui. Mais je ne suis pas un novice de la crise. J`ai été chargé de mission du président Bédié. Donc je pense, par rapport à beaucoup d`autres personnes, que c`est ce qui fait qu`à un moment donné, tu te dis quand cette crise va s`arrêter. On est en plein, activité avec le président Bédié quand le coup d`Etat est survenu. Il faut la gérer, ensuite, il faut gérer la période de la transition militaire. Dedans, on était en pleine activité. C`est-à-dire tout en apparaissant à la télé, sur les podiums, la nuit, on fait de la politique. Après, il y a eu l`avènement du président Gbagbo ; après, il y a eu la première rébellion. Bref, la crise ivoirienne, je l`ai suivie jusqu`à un moment où j`ai dit trop, c`est trop. C`était un peu fatigant. C`est pourquoi, quand on ramène le problème à Blé Goudé, je dis non. Quand le 24 décembre de 99 à 11 heures, un char vient me chercher chez moi à la maison avec des militaires direction Bassam pour m`exécuter. On est en 99. Et que par la grâce de Dieu, n`ayant pas de guide de communication, ils se disputent de la véracité de l`ordre d`exécution. On me ramène vers la ville. Il n`y a pas de Blé Goudé. Ça veut dire que depuis là, je constitue peut-être un problème. C`est pour cela que je souhaiterais qu`on ramène les choses à ce qui peut nous faire avancer. Parce que je reste convaincu que même si on doit une centaine de milliards, est-ce que ça vaut la peine de tuer des personnes ? Je ne crois pas. Mon départ de la Côte d`Ivoire a fait l`objet de beaucoup de rumeurs. Mais je tiens à dire, j`étais fatigué. Trop, c`était trop. A force d`avoir des amis partout, on veut t`identifier dans chaque clan. Moi, je refuse d`appartenir à une chapelle politique parce que je pense que ce sont les Ivoiriens qui ont décidé de faire de moi un homme de communication. Et si je peux utiliser ce talent pour rassembler, pourquoi est-ce que je devrais diviser? Je ne peux pas me le permettre. J`ai connu, à un moment difficile de ma vie, des personnes comme le Premier ministre Soro Guillaume quand j`étais chargé de mission du président Bédié.
Quel était votre travail ?Les nuits, c`est moi qui affrontais les cités universitaires pour me battre pour ne pas qu`il y ait des grèves. Ce Premier ministre est encore vivant, il peut en témoigner. A la même période, quand les Charles Blé Goudé sortent du lot, c`est encore moi qui négocie avec les étudiants. Mon rôle, c`était de jouer le rôle d`aîné au niveau des jeunes en leur apportant des solutions là où nos doyens voyaient forcément une confrontation.
Dites-nous, quelles sont les relations qui vous lient aujourd`hui au président Bédié? Et comment avez-vous jugé son combat lors de cette crise ?Je l`ai toujours dit. Une des rares personnes qui m`accueille dans son bureau un jour et qui me dit " Yves, tout ce que je te demande, c`est de servir d`interface entre les jeunes frères pour diluer les négociations entre l`administration politique et la jeunesse ". C`était une marque de confiance. Le président Bédié est un père pour moi. Il m`a toujours aidé, il m`a toujours assisté. Me demander de le juger, je ne peux pas. Je fais partie de sa famille. Quand je suis tombé malade, j`ai eu l`agréable surprise d`être assisté par Mme Henriette Bédié. En dehors de cela, on a des liens de famille. Vous savez, on ne peut pas faire de reproche à son père cependant, ce que je reproche au président Bédié, c`est son trop plein de confiance. Quand il était aux affaires, ce qui lui a joué le mauvais tour, c`est le trop plein de confiance aux personnes qui avaient en charge certains portefeuilles. De fois je me disais comment on peut être aussi convaincu des capacités de certaines personnes sans forcément les contrôler. Mais pour moi, il reste toujours un homme de valeur, un homme de principe.
Yves Zogbo Junior revient au pays, quel rôle va-t-il jouer dans cette nouvelle Côte d`Ivoire ?On va renouer avec les Ivoiriens. J`ai souhaité dire merci aux Ivoiriens pour leur soutien pendant cette période difficile que j`ai traversée. Le rôle que je peux jouer, c`est ce que j`ai toujours fait. C`est-à-dire expliquer aux Ivoiriens qu`on a un seul pays, une seule nation. Si donc entre nous, on ne peut pas se parler, c`est qu`on n`a rien compris. La vie est tellement courte, j`en sais quelque chose, et donc il faut la vivre pleinement avec ses convictions. Mais tout en respectant les points de vue de chacun. Vu ce qu`on a traversé, quand je regarde les Ivoiriens, je sens la déprime sur le visage. Ils ne veulent plus entendre parler de guerre. Donc si on peut tout faire pour repartir de plus belle, arrangeons-nous pour le faire. Mon rôle, je ne viens pas en demandeur. Je suis Ivoirien, je connais mes capacités et les Ivoiriens les connaissent aussi. Tout ce qu`on me proposera et qui ira dans le sens de l`unité et de la réconciliation, je fonctionne à bras ouverts.
Il semble que vous êtes annoncé à la primature ou au ministère de l`Intérieur auprès de votre ami Hamed Bakayoko ?(Rires) Non. Je vous rassure. La chance que j`ai, c`est que j`ai un père qui s`appelle Henri Konan Bédié. Un aîné, Alassane Ouattara qui, depuis dix (10), quinze (15), ans nous a fait confiance, Hamed Bakayoko et moi en nous aidant. Aujourd`hui, Radio Nostalgie est une fierté. Le Premier ministre, pareil, est un frère. Je peux l`approcher sans pour autant faire partie du cabinet. Je crois que je me hasarderais à rester dans le privé, dans le culturel. Je ne suis pas rentré par rapport à un poste.
Avez-vous des contacts avec le président de la République ?Oui. Non seulement avec lui mais avec celle qu`on appelle notre grande sœur, Mme Ouattara Dominique. Le président Ouattara, quand il était au Fmi, m`a dit une fois, " je pense que tu as quelque chose à apporter à la jeunesse ivoirienne. Ne l`oublie jamais et évite d`appartenir à un parti politique ". Je retiens cela.
Vous avez servi tous les régimes, tous les présidents. Ça ne vous gêne pas ?Peut-être parce que j`ai apporté quelque chose à tous les présidents. Si Yves était un militant avec mille (1000) cartes de partis, ça aurait pu gêner. Je sers où on m`appelle pour servir. Parce que si j`étais nul, on ne m`aurait pas fait appel.
Yves, un homme de culture. Alors comment vous voyez la culture ivoirienne ?C`est le facteur déterminant de ce qui va asseoir la Côte d`Ivoire de demain. Celle de la réconciliation. C`est pour ça que j`applaudis l`arrivée dans le ministère du ministre Bandama Maurice. Les hommes de compétence qui savent se faire entourer, obtiennent les résultats qu`il faut. Pour moi, la culture, je reste convaincu, sera décisive à l`appel de la réconciliation de notre pays.
Interview réalisée par Djè Kmcathycelio@yahoo.fr