Dans le cadre de mon travail sur la Rochelle, nous avons eu la chance lundi soir d’assister à une petite animation autour de « Aimé-Benjamin Fleuriau » et de sa famille organisée par l’équipe du syndicat d’initiative de La Rochelle.
Le principe est le suivant : Mr Fleuriau « reçoit » en son hôtel particulier une trentaine de ses amis qui, sur présentation d’un « sauf-conduit » (obtenu à l’office de tourisme) ont la chance de pénétrer dans les salles majestueuses de l’une des plus belles demeures construites au XVIII° siècle à La Rochelle. D’y être reçu avec courtoisie et d’écouter le discours généreux de ce Mr Fleuriau (il a sa rue à La Rochelle, et son hôtel porte à présent le nom de « musée du Nouveau-Monde ») qui a tendance à raconter sa vie, et c’est bien cela que l’on veut entendre !
Mr Fleuriau est un homme cultivé qui connaît l’art d’entretenir ses hôtes et toute sa maison est « tenue » pour cela. Son domestique, sa femme, ses filles... C’est un mondain, qui reçoit de façon impromptue Mr le Maire, qui disserte avec lui et son épouse au sujet des philosophes et des problèmes moraux que pose la pratique de la traite d’esclaves... Car Fleuriau, fils d’un raffineur rochelais ruiné, s’est lancé dans sa jeunesse le défi de refaire la fortune du père. La seule chance de réaliser son pari a été de prendre la mer et de partir à l’aventure pour l’ile de Saint-Domingue où un oncle à lui travaillait dans un domaine d’exploitation de canne à sucre. C’est là qu’il a pris la succession et qu’il a exploité le commerce du « bois d’ébène »... Système très rémunérateur dont il a su « abuser » puisqu’au bout d’une vingtaine d’années il est revenu à La Rochelle et s’est acheté ce bel hôtel particulier, s’est marié, a fondé une famille (bien qu’il ait eu déjà à Saint-Domingue onze enfants avec une « indigène » dont sa jeune épouse de plus de vingt ans sa cadette ne cesse de se moquer). Le temps de la prospérité est revenu dans la maison Fleuriau.
Lorsque ses visiteurs arrivent sur le seuil, Aimé-Benjamin cesse de jouer du clavecin, accueille, fait offrir du chocolat, montre ses peintures, tapisseries, parquets, horloges, présente ses deux filles occupées à lire, son épouse occupée de philosophie et aimant (un peu trop à son goût) la discussion, fait conduire dans quelques-unes des nombreuses pièces, puis conclut la promenade par une petite pièce musicale jouée dans le jardin (troublée malgré tout par le passage de carosses un peu volumineux). On entre en plein jour par la rue Fleuriau. Après le moment de harpe, devant l’hôtel légèrement éclairé, on passe dans la rue Gargoulleau, et c’et un ravissement qui se prolonge dans la rue blanchie par le soleil couchant.