Il faut dire que je n’avais pas trouvé de salle projetant Chaw avec des sous-titres anglais, contrairement aux deux films qui m’avaient finalement attiré dans leurs filets. Deux ans plus tard, voici que Chaw, contre toute attente, débarque en DVD en France, conservant au passage le titre coréen original qui désigne ce sanglier mangeur d’homme terrorisant une petite bourgade de la province coréenne. Deux flics originaires de Seoul, deux chasseurs expérimentés et une jeune écologiste rêvant de reconnaissance universitaire vont allier leurs forces pour mettre la main sur cette bête étrange qui attaque et dévore les gens du village.
Je ne mentirais pas en écrivant que j’ai pu imaginer que Chaw avait des chances d’être un bon p’tit nanar. Le film a beau avoir fait plus d’un million et demi d’entrées en salles en Corée, un film de sanglier mangeur d’hommes reste un film de sanglier mangeur d’hommes. Il n’est jamais évident de prévoir à l’avance le ton d’un film coréen, tant ceux-ci parviennent souvent à naviguer avec aisance entre le premier et le second degré, et la bonne nouvelle c’est que Chaw joue sans hésitation la carte du second degré. Le film a beau s’atteler soigneusement à son atmosphère de film fantastique tendance « je vais vous sortir un monstre qui va vous foutre les chocottes », il a bien conscience du piège que pourrait constituer un abus de sérieux, et préfère embrasser la légèreté.
La vision de ce sanglier géant et affamé de chair humaine n’est pas non plus la plus grande réussite visuelle qui soit (la séquence inattendue et étrangement drôle du sanglier de Welcome to Dongmakgol vient à l’esprit), mais en fin de compte, cela contribue à voir Chaw sous l’œil de l’humour, bien servi qu’il est par le jeu forcé adéquat de toutes ces têtes familières du cinéma coréen, notamment Yoon Jae-Moon du drama Iris et l’omniprésente Jung Yu-Mi, vue ces derniers mois dans deux Hong Sang Soo (Like you know it all et Oki’s Movie) et deux films présentés au Festival Franco-Coréen du Film 2010 (le délicieux Oishi Man et l’agaçant The Room Nearby).
J’ai beau préférer la salle au DVD, pour ces films coréens - et asiatiques en général - qui n’ont que peu de chance d’être exposés sur grand écran en France, le plaisir est grand de les voir officiellement à la portée des spectateurs français, même si ce n’est que sur petit écran. Et puis dans les prochains jours, J’ai rencontré le Diable et The Murderer sortent en salles, cela compensera largement. L’été sera au moins un peu coréen !