C’était il y a quelques semaines. La place Saint-Pierre était noire de monde ! Il s’agissait pour les “supporters” du pape de défendre son droit à la liberté de parole après l’annulation de sa visite à l’université La Sapienza à Rome. La contestation à la Sapienza, la plus importante université d’Italie avec 130.000 étudiants, était née parmi les enseignants du département de physique qui jugeaient “incongrue”, au nom de la laïcité, la décision du recteur d’inviter le pape à l’inauguration de l’année académique.
Il est certain qu’un pape s’exprimant dans une université n’a pas à imposer une quelconque foi à autrui … Comment imposer d’ailleurs un tel sentiment ? Mais cette foi fait partie d’un patrimoine de l’humanité au même titre que d’autres et l’on ne voit pas très bien pourquoi des étudiants n’auraient pas à en connaître les réalités et les fondements.
La quasi totalité du monde politique italien a dénoncé l’intolérance dont a fait l’objet le pape de la part d’anticléricaux. La visite avait été jugée incongrue par 67 enseignants sur…5.000 et un petite minorité d’étudiants sur les 150.000 que compte l’université.
De la même manière il devrait être possible à des représentants de l’Islam, des Boudhistes, des Juifs, de toutes les religions et philosophies … de venir s’exprimer devant des étudiants qui par définition ont a étudier, comprendre et analyser. Ce sectarisme à l’égard d’une des religions va ainsi compromettre toutes les autres tentatives qui pourraient se faire jour. Ce laïcisme exacerbé et aveugle ne peut que renforcer les incompréhensions et les sectarismes. C’est un mauvais coup porté à l’Université, lieu de toutes les confrontations et comparaisons d’idées.
Devant les 100.000 personnes venues le soutenir, dimanche 20 janvier, sur la place Saint-Pierre, Benoît XVI a expliqué que le climat qui s’était créé avait rendu inopportune sa visite. Les champions de la laïcité mal comprise ne se rendent pas compte à quel point ils sont dépassés. Ils offrent ainsi une publicité inespérée à ceux-là même qu’ils cherchent à combattre.
Les “Lumières” que l’on invoque sans cesse, n’avaient pas peur de ces débats ni d’aborder ces sujets. Il n’y a qu’une seule menace à l’époque du “tout info” du “buzz” du “net” pour tous, celle du repli et du refus du dialogue. Il n’y a plus de “sanctuaire”. Permettre à “l’adversaire supposé” de s’exprimer est sans doute le meilleur moyen de “le combattre”; si tel est l’enjeu que se fixent les “barbus de 19005″.
Et pendant ce temps là, notre Nicolas Sarkozy, lui, continue sa promenade religieuse incongrue pour un chef de l’Etat. Ainsi tout se mélange, d’un côté des affirmations mal venues de la part d’un chef “d’Etat laïc”, de l’autre l’ostracisme d’enseignants nostalgiques d’une “guerre” gagnée depuis longtemps. On commence à percevoir ainsi les dangers d’un retour de ce type de débats plus ou moins “promotionnels” et sans réel fondement : réinventer des clivages disparus.
Sarkozy et Dieu
LE MONDE | 14.02.08
[Il ressemble à tous ces gens qui passent par “des moments où on y croit et des moments où on n’y croit pas, où on y croit moins ou plus du tout.” Il n’en dit jamais plus sur ce chapitre. C’est la part de mystère et d’ombre que cultive cet homme réputé exhibitionniste, par goût du paradoxe ou pour brouiller les pistes.
Il est fasciné par les religieux, imams, rabbins ou prêtres, parce qu’ils ont en eux quelque chose de radical et de mystérieux. Il l’est par tous ceux qui aspirent à un dépassement d’eux-mêmes. Sa “candeur de gamin” devant les champions et les stars fait sourire, mais “avec Dieu, il a le top du top, le champion des champions”, s’amuse Tillinac.]