Je n’ai plus la même fréquence de post qu’il y a quelques temps. Trop de travail, trop de pression, trop de responsabilités… Bon ok, trop de soleil, trop de pression (mais pas la même) et trop de canal St Martin.
Du coup, je ne vous ai pas parlé de la dernière campagne Citroën pour la DS4 sortie en fanfare il y a quelques jours !
Je disais il y a quelques posts que de nombreuses publicités sont avant tout une idée créative. Et bien je trouve ici que c’est d’abord un réel parti pris de planning stratégique.
Bon, des publicités (ou plutôt des marques) qui se la jouent anti-conformistes, c’est loin d’être nouveau (même s’il faut admettre que ce n’est pas très fréquent). Mais là, Citroën va au bout de l’idée.
D’habitude, on a une marque qui se proclame anti-conformiste et qui nous dit, en substance, dites oui à mon mode de valeurs (non conventionnelle).
C’est là toute la subtilité : dire oui en faisant l’éloge du non. Pour être plus clair, en voici un exemple un peu caricatural :
Bon, cet pub est un peu particulière mais elle montre l’idée globale. Le produit est toujours “good”. En publicité commerciale, les marques veulent engager le consommateur en le ralliant à leur idéologie. Le “oui” (qui se traduit par l’acte d’achat) étant le symbole (métaphorique) de l’adhésion du consommateur à la marque. En résumé, même les marques anti-conformistes prônent le “oui” dans un discours qui donne (se mettre dans la peau d’un dir comm pour lire cette phrase) : “dites non au conformisme et oui à moi !!!”
Il arrive pourtant que le non soit utilisé en pub : pour les grandes causes. Le non est le symbole de la révolte, de l’engagement humain et humanitaire. Contre le SIDA, contre la faim, la pauvreté, la famine… Pendant longtemps, les publicités “non profit” ont été porteuses du “non”, signe d’un engagement personnel pour une cause.
Mais avec la montée des sollicitations des associations, et parce que le discours politiquo-engagé a lassé, les associations ont, elles aussi, fait évoluer leurs discours vers le oui (pas toutes bien sûr). Fini l’engagement profond, la révolte ou la culpabilisation. Les associations ont essayé de minimiser le problème pour mieux mettre en valeur les efforts et les résultats obtenus grâce à la mobilisation. (démarche active plus proche du oui que révoltante et culpabilisant, plus proche du non)
Pour en revenir à Citroën, la publicité est audacieuse car elle affirme ce “non”, si distinctif en publicité (et particulièrement en pub commerciale), jusqu’au bout.
Je ne cesse de le répéter, mais nous sommes plus que jamais dans une époque où les marques véhiculent un système de normes et de valeurs auxquels les consommateurs s’identifient ou non. Toutes les marques ont un système qui leur est propre. Mais leur point commun est qu’il est systématiquement dans l’approbation. Ici, la marque adopte consciemment un système de négation. Acheter la DS4, c’est revêtir le “non” : donc une certaine forme de contestation, d’impertinence, de transgression.
Étrange paradoxe que d’acheter un produit pour dire non. L’acte d’achat est le symbole du “oui” (approbation de l’univers de la marque) et là, il permet d’acheter des valeurs de transgression. C’est, je trouve, très subtile.
Mais au delà de ça, la contestation que soutient Citroën est-elle pertinente ?
C’est en tout cas un positionnement très intelligent.
il me semble bien que oui, et que la marque aux chevrons réussit un tour de force incroyable : elle gomme 30 ans d’image désuète et gagne, en quelques années, en dynamisme et là, en 3 campagnes (DS3 + DS4), des valeurs très fortes et surtout très distinctives ! Citroën se construit un capital image.
La contestation est une tendance de fond.
La contestation n’est pas nouvelle (particulièrement en France).. Mais l’avènement de l’internet est pour moi le reflet de l’importance de cette tendance tant au niveau national qu’international.
L’étymologie du terme internet propose “utopie”. L’internet est avant tout une terre vierge et inédite pour les scientifiques, les activistes politiques et les hackers qui leur a permis de se déployer dans la marge.
Né dans les années 60 en Californie (laboratoire des mouvements contestataires et communautaires), l’internet d’aujourd’hui conserve son statut et son rôle de marginal dans une perpétuelle opposition (voir Wikileaks et l’utilisation des réseaux sociaux dans le printemps arabe).
Je pense donc que la contestation est une valeur forte dont tout le monde à conscience. Savoir contester est souvent perçu (dans les cas où la contestation est utilisée à bon escient) comme un signe de force de caractère, de charisme. Et au contraire nous avons l’habitude de fustiger les moutons (magnifique première image de la pub DS4 d’ailleurs) que l’on peut parfois être en société. Nous acceptons tout et n’importe quoi, car la norme ou la facilité nous l’impose. La contestation à un coté très romanesque.
Voilà pour le planning.
Pour la créa, ben…
J’aime beaucoup. Dynamique, rythmée… la prod est bonne. L’illustration est vraiment bien également. On oscille entre un mode retro / régressif associé au oui et des images modernes et une musique tendance, associées à la voiture. Tout cela pour nous laisser la magnifique impression que dire non est un avenir : l’avenir de celui qui se prend en main. (À noter que les situations où l’on dit oui ont été minutieusement choisies : travail, amour, pouvoir)
Bon, une mauvaise note quand même ?
Le coté très moralisateur de la pub, à la limite de l’agression, pourra, peut-être, choquer quelques personnes. Après tout, cela peut laisser l’impression que la marque nous impose de dire non. Et si nous disions non au non ? (oula, il se perd le mec !)
En tout cas, force est de constater que la pub est immanquable en télé. Une excellente opé de Citroën en définitive.