J'ai pris un énorme plaisir à lire le roman "Touriste" de Julien BLANC-GRAS. D'ailleurs est-ce vraiment un roman ou des moments de vie bien vécues par ce journaliste tant les situations sont criantes, et d'"authenticité" et d'humeur particulière?
Le narrateur nous amène épisode par épisode sur des continents différents. L'importance est donné aux hommes, autochtones ou touristes, aux situations et quiproquos avec l'étranger, et non aux monuments et ou "appels touristiques".
Le propos est efficace, plein d'humour, de pertinence, d'un grain de folie aussi et de beaucoup, beaucoup de rêve en marche. La géographie comme un rêve d'enfant et cette volonté de la vivre, d'aller ailleurs pour découvrir où habitent les autres individus, est ici présentée sous son aspect la plus dynamique. Nous sommes en immersion, loin des chemins balisés et des formules de groupe.
Il y a déjà cet enfant, ce jeune homme et ses rêves: de la géographie vivante, de l'escapade. Le partir comme une aventure mais aussi une façon de vivre. Le voyage qui forme la jeunesse n'est pas ici le moteur... ou pas tant. Les voyages d'étudiant, ceux d'exploration ou de défis sont ici relégués, pour d'autres. Oui, ce fut un peu de cela mais surtout une envie de découvrir les hommes beaucoup plus que de se former, une irrésistible envie de mouvement, de sortir de chez soi, de liberté.
Le livre surfe aussi sur la veine écologique, bobo et spirituel sans s'y embourber... parce que l'auteur se joue de la recherche de sens mais marque plus une attirance pour l'itinérance à la rencontre des autres. L’humanitaire, les temples et ashrams, la spiritualité d'un sport... tout prête à sourire mais aussi à réflexion.
La liberté de circulation des hommes, le rapport à l'immigré, à l'autre, au sans papier. Le rapport au travail et ce que l'on veut montrer de son pays apparaissent entre les lignes: de la dignité humaine, de la survie, de la sécurité (ou non). Par le biais de ce roman, de ce narrateur journaliste, nous avons quelques aspects d'initiatives locales mais ce sont juste des rencontres, des instants "t".
Mais c'est aussi une approche du tourisme, du nomade aux premiers voyages sans raisons économiques. Et ce que le tourisme est devenu: un sport de masse, une affaire de gros sous. L'auteur prend un malin plaisir à nous montrer l'ironie des situations : les attrapes touristes, les magouilles, le manque d'authenticité, les reconstitution pour appâter le client, les lieux isolés où l'on rencontre... les touristes.
Alors oui un roman émouvant, ironique, cinglant quelque fois mais surtout très très attachant.