En l'espace de quelques heures, ce qu'il convient désormais d'appeler l'affaire DSK a singulièrement changé de tournure. Celle qui n'était jusqu'alors qu'une modeste femme de ménage prise dans une histoire qui la dépasse, est devenue subitement suspecte de tous les maux. Menteuse, soupçonnée d'escroquerie, de victime, elle est en passe de devenir coupable.
Mais coupable de quoi ? Certes, pour obtenir le droit d'asile aux Etats-Unis, elle a menti sur son passé. Mais combien sont poussés à faire ainsi pour échapper à la misérable existence qui les attend inexorablement en Afrique. Comme des milliers d'autres, elle a tout tenté pour s'offrir un avenir meilleur. Elle aurait des relations avec des personnes peu recommandables, des quasi mafieux ? Mais combien de milliers de réfugiés, aux Etats-Unis ou ailleurs sont obligés de tomber dans l'illégalité pour s'en sortir, et cette illégalité et souvent préférable à la vie dans leur pays d'origine. Le parcours de Nafissatou Diallo ressemble à celui de millions de miséreux partout dans le monde. Est-ce pour autant, parce qu'elle a menti auparavant, qu'elle n'est plus une victime crédible ? Ainsi, même si aujourd'hui elle dit la vérité, elle pourrait être privée du procés qu'elle devrait avoir, simplement parce que son passé la rattrape. Dans ce pays si pieux, elle n'aurait pas droit au pardon et à la rédemption ?
Face à elle, on a un homme, DSK, qui a occupé de grands postes internationaux. Un homme non seulement riche, mais qui a aussi de puissantes relations. Coupables ou non, personne ne le sait à l'heure actuelle. Mais peu importe pour lui, il se sert de sa fortune (celle de sa femme pour être exact), non pas pour prouver son innocence, mais pour trouver des failles dans le passé de Mme Diallo. Et des failles, il y en a, ce sont celles de l'exploitation de la misère du monde par quelques uns, un peu plus puissants et riches que les autres.
A partir de maintenant, on voit bien que les dès sont pipés. Qu'il soit coupable ou innocent, DSK aura toujours les moyens de discréditer son adversaire et d'éviter ainsi un procès. Mais ce n'est pas pour autant qu'elle n'a pas été victime. La principale raison de son manque de crédibilité à un nom, la pauvreté. Et si un procès équitable et juste ne devait jamais avoir lieu, cela s'appellerait une injustice.
La maxime n'a jamais été autant d'actualité : Selon que vous serez puissant ou misérable, les jugements de cour vour rendront blanc ou noir.