Écrit par La Nouvelle Expression
A l'entame de son mandat, Paul Biya annonçait que ce septennat permettrait à son pays d'atteindre une croissance à deux chiffres. Il est certain que depuis, il a dû déchanter. Le Cameroun pourrait atteindre en 2012, un taux de croissance de son produit intérieur brut de l'ordre de 4,5%, soit un point de plus que cette année 2011. La faute probablement à la crise internationale de 2008 qui a eu des effets ravageurs sur plusieurs pans de l'économie nationale. Le pétrole, le bois, l'aluminium, le coton, le caoutchouc, la banane et le secteur ferroviaire ont été sévèrement affectés.Les choses vont donc bien mieux après la crise, comme en atteste Mauro Mecani, chef de mission du Fonds monétaire international pour le Cameroun. « La reprise économique camerounaise est en train de se consolider sur une base élargie à la plupart des secteurs, après l'impact de la crise financière mondiale de 2008-09. Ceci grâce au prompt appui des autorités aux secteurs qui étaient en détresse et à une demande extérieure plus forte pour les produits d'exportation du Cameroun. L'inflation est restée contenue jusqu'ici, en raison de l'abondance des récoltes nationales, de la réduction de la taxation à l'importation de plusieurs produits alimentaires, et de la politique de subvention aux prix des produits pétroliers », analyse ce cadre du Fmi.
Globalement donc, les finances publiques se redressent avec l'apurement des arriérés intérieurs, et la confiance revient, comme en témoigne le succès de l'emprunt obligataire de 200 milliards lancé en fin d'année dernière par l'Etat. Fort de cette réussite d'ailleurs, le gouvernement a déjà annoncé un autre emprunt de 150 milliards cette année, en même temps que l'émission de bons du trésor.
Stratégie décennale
C'est sur cet élan que se met en œuvre la stratégie décennale de développement contenue dans le Document de Stratégie pour la Croissance et l'Emploi (Dsce), désormais reconnu comme cadre de référence de l'action gouvernementale jusqu'en 2020. Dans le nouveau schéma, il s'agit d'abord de créer abondamment la richesse en stimulant la croissance, puis de la redistribuer à travers une politique volontariste de promotion de l'emploi et des revenus dans le cadre de la mise en œuvre du DSCE. Les objectifs de ce DSCE consistent, pour l'essentiel, à porter la croissance à 7% en moyenne annuelle dans la période 2010-2019 ; ramener le sous-emploi de 75% autour de 40% en 2019 avec la création de dizaines de milliers d'emplois formels par an dans les dix prochaines années ; à ramener le taux de pauvreté monétaire de 39,9% en 2007 à moins de 25% en 2019 et à réaliser, à l'horizon 2019, l'ensemble des Objectifs du millénaire pour le développement (OMD).
Tous ces objectifs sont possibles, assure Louis Paul Motazé, le ministre de l'économie et géniteur du DSCE qui note que «cette année, le Cameroun sera un vaste chantier, qui devra mobiliser d'énormes ressources financières, matérielles et humaines, et contribuera à la relance de la croissance et de l'emploi. On assistera au démarrage de plusieurs grands travaux d'infrastructures routières, ferroviaires, portuaires, énergétiques et à la relance des produits de rente, dont le cacao et la banane d'exportation. Nous essayons aussi de relancer les cultures vivrières comme le riz, le maïs, les tubercules ... Enfin, nous comptons investir massivement dans les filières à fort potentiel comme le bois, le coton, le textile et le tourisme », confie-il. « Nous allons également mener une politique plus ambitieuse d'attraction des investissements directs étrangers, dans les domaines notamment de l'exploitation minière et de la transformation des minerais, mais aussi dans l'agro-industrie, l'énergie, le bâtiment et la construction des grandes infrastructures, bref dans les domaines nécessitant une forte intensité en capital. Nous disposons pour ce faire désormais d'un cadre juridique approprié pour développer ces partenariats publics/privés », ajoute le ministre Motazé.
Conformément au schéma défini dans le Dsce, des investissements massifs vont se poursuivre dans les domaines des infrastructures routières, portuaires, ferroviaires, énergétiques et technologiques. Porteur d'espoir, le projet de construction du complexe portuaire de Kribi est en train de se matérialiser. Pour le gouvernement, l'aboutissement de ces travaux qui ont déjà commencé par les terrassements généraux vont révolutionner la vie économique du pays.
Grands projets
Le complexe portuaire de Kribi est en effet un des projets infrastructurels phares du gouvernement, et son aboutissement heureux conditionne le démarrage de nombreux autres grands projets, notamment dans le domaine industriel, minier et agroindustriel, comme le souligne le ministre de l'Economie, président du comité de pilotage et de suivi de la construction de ce port. Ce projet, explique Louis Paul, «ambitionne de jouer un rôle catalyseur dans l'accélération de la croissance au Cameroun avec plus particulièrement pour but de développer le Cameroun à travers l'exploitation des ressources minéralières: bauxite, fer, cobalt, nickel, etc.; satisfaire le besoin constant pour le Cameroun de disposer d'un port en eau profonde, palliant ainsi les limites de nos installations portuaires actuelles pour l'accueil des grands navires; disposer du port d'éclatement de conteneurs sur la Côte Ouest Africaine, véritable plateforme de transbordement et de redistribution des marchandises; dynamiser l'intégration sous-régionale par la réalisation du corridor de transport et de développement Kribi (Cameroun) - Bangui (RCA) - Kisangani. (RDC) et bretelles vers les autres pays de la CEMAC (Guinée Équatoriale, Gabon, Congo) ».
La construction de ce port, d'un coût de 282 milliards de Fcfa a effectivement commencé et permettra de pallier les limites du port de Douala. La densification des infrastructures énergétiques figure parmi les priorités du gouvernement. Outre la mise en place de la centrale thermique à fuel lourd à Limbe et Yassa (62 milliards de Fcfa), le projet de construction d'une centrale thermique à Gaz à Kribi, d'une capacité comprise entre 150 et 330 MW et dont le coût global de construction est estimé à plus de 200 milliards de Fcfa. Tout cela devrait permettre au Cameroun de valoriser son potentiel gazier. Dans ce domaine, plusieurs projets d'envergure ont commencé. La construction du barrage réservoir de Lom Pangar a commencé l'année dernière par le lancement des travaux anticipés. Ce projet comprend la construction d'un barrage-réservoir d'une capacité utile de 6 milliards.
Pour ce qui est de la construction du second pont sur le Wouri, très attendu par la communauté des affaires pour désengorger le trafic à l'intérieur et autour de la capitale économique, la coopération française a signé avec le ministre de l'Economie un accord pour le financement des travaux à hauteur de 119 milliards de Fcfa.