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Deux poèmes d'Ernest PEPIN (Guadeloupe).

Par Ananda

STATUE DE MILES DAVIS

Miles

Dentelle de l’infini

Le ciel semble plus proche

Et le souffle aigu d’un lamento caresse la ferveur du son

J’écoute

Il faut tant de souffrances pour extraire la beauté

J’écoute

Une note bleue arrime l’horizon

La trompette m’enchante et me transporte

Dans ce pays des cathédrales noires

Où jouer est prier

Où prier est une révolte

Où toute révolte enfante l’amour

Miles

Mon frère

Mon soldat

J’écoute

Tu fouilles l’harmonie d’un cosmos déchiré

Bec d’aigle noir

Soulevant l’étoile gardienne de toutes les nuits

J’écoute

Je te salue

Cadence des spirales intimes

Bouche humide d’un étang de lumière

Je te salue Miles

Rythme

Rut

Oiseau à crête d’aube

Cri vorace d’une histoire jamais finie

Syncopée

Balbutiée

Quand respire en nous le tourbillon ailé

L’ondulante vibration du serpent nu

L’esprit même de la musique

Je te salue Miles

En grand cérémonial de jungle et de jazz

De barrissement d’étoiles

Trompette  oblique et fière

Je te salue

28 Juin 2011

CE SONT MES FRÊRES !

C'est un pays de coups de langue

Un pays de paroles en travers

de tue-qui-peut

de lynchages quotidiens

On dit bonjour avec un couteau entre les dents

On dit bonsoir avec une corde entre les mains

D'étranges lianes pendent au cou du soleil

d'étranges fleurs éclosent à la place du cœur

Personne de dit mot

Tout le monde rit du coup de fouet

Pendant ce temps

des dictateurs retournent impunis

les droits des hommes servent de chiffons

la jeunesse n'a pas d'avenir

des îles tremblent et agonisent

Personne ne dit mot

Ils ont des mots pour déchirer

pour humilier

pour crucifier

Et pourtant ce sont mes frères

Pardonnez-leur

ce sont mes frères

Ils sont ce que l'on a fait d'eux

Je n'ai pas honte d'eux

J'ai honte de leur propre souffrance

qui dit bonjour avec un couteau entre les dents

qui dit bonsoir avec une corde entre les mains

qui vient chez moi pour me juger

Et vous qui riez

Riez de vous

Nous habitons la même croix

d'un pays de coups de langue

un pays de paroles en travers

et de chansons  belles comme des clous d'étoiles

Vous qui riez pardonnez-leur

car ils sont ce que l'on a fait d'eux

Ce sont mes frères

Le 21 Janvier 2011


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