Mort tragiquement et prématurément en décembre 2001 dans un accident de circulation en Angleterre, pays où il résidait et où il était professeur de Littérature européenne à l’Université d’East Anglia depuis 1970, l’allemand W.G. Sebald (Wertach im Allgäu, Bavière, 1944) a été probablement l’un des écrivains européens les plus fascinants de la seconde moitié du 20ème siècle.
Dans l’un de ses livres les moins connus, Sur l’Histoire Naturelle de la destruction, il analyse avec son style inoubliable et une capacité de pénétration bouleversante, la signification d’un fait relatif à la Seconde Guerre Mondiale très souvent évité et étouffé, spécialement en Allemagne. Nous faisons référence aux bombardements systématiques et indiscriminés des villes et populations civiles allemandes par les armées alliées. Depuis 1942 les alliés ont lancé plus d’un million de tonnes de bombes sur les villes et les populations civiles allemandes, malgré le fait que depuis le début d’importants personnages publics comme Lord Salisbury et Georges Bell, l’évêque de Chichester ont exprimé énergiquement, autant au parlement qu’en public, qu’une stratégie d’attaque qui avait pour principal objectif la population civile ne pouvait être défendue ni au niveau moral ni au niveau des lois les plus élémentaires de la guerre. Et en plus d’être atroce cette opération serait inutile d’un point de vu strictement militaire car il serait beaucoup plus efficace de centrer l’offensive aérienne sur des attaques sélectives sur des usines, des réserves de combustible, des voies ferroviaires et les principales artères du système de transports, ce qui pourrait paralyser très rapidement le système de production allemand.
Le résultat, a part de l’enrichissement obscène de l’industrie de la destruction qui a prospéré sans modération pendant ces années, a été la dévastation, dans certains cas l’annihilation presque complète, d’une bonne partie des villes historiques allemandes, la mort de douzaines de milliers de personnes et le désespoir des survivants qui ont du apprendre à vivre au milieu des décombres et de la mitraille.
Berlin a été l’une des villes les plus touchées. En une occasion, pendant un bombardement, les animaux du Zoo se sont échappé et ont déambulé épouvantés en faisant un bruit effrayant dans les rues en ruines. Sebald se centre, sur le souvenir de cet épisode, sur l’image d’individus qui contemplent la cage thoracique d’un éléphant admirant la ressemblance de sa structure avec celle des bâtiments détruits.
En 1945, Hein Gonry, un photographe allemand de quarante et un ans, a reçu l’aide de son collègue américain Adolph C. Byers pour réaliser une série de voyages aériens grâce auxquels il a développé le troublant projet de documenter dans une série d’images artistiques prises du ciel, l’état de cette ville complètement ravagée.
Il s’agit d’une série d’impressions en petit format réalisées en trois voyages différents dont les originaux peuvent être vus maintenant sous le titre d’Hommage à Berlin, au coté d’une autre série de photos prises par Gonry depuis la rue, dans la Galerie Regard de Berlin (Streinstrasse 12, 10115 Berlin) jusqu’au 10 octobre prochain.