Dévisagée
Le visage est un théâtre, à preuve : ne dit-on pas Facebook ? Le livre du visage. C'est tiré par les cheveux, si vous voulez. Cette succession de masques que nous arborons, c'est nous. Dévisager quelqu'un, c'est rechercher l'unité parmi la multiplicité de ses visages. On ne démasque rien, car un masque en recouvre un autre, et sans fin, tant un être humain, si simple soit-il, n'est jamais figé, joue plusieurs rôles, se compose à l'infini. Pour composer nos multiples faces, nous avons intégré celles des autres dont nous renvoyons les signes. La plupart du temps, nous sommes comme un masque africain, figé, illisible, indécryptable. Notre inconscient nous décore de sourires, de rictus, de grimaces. Notre visage est une succession de méprises, de signes à moitié maîtrisés, malhabiles. En société, on surjoue de ces signes, comme au théâtre, jusqu'à l'exacerbation sur signifiante. Et quand on se regarde, on ne voit qu'un acteur débutant, peu doué, déroutant, voire lointain. Les vrais acteurs n'ont pas de visage, seulement une galerie de masques, comme les touches d'un piano qu'ils manipulent avec une telle virtuosité qu'on adhère à ce mensonge de l'être, comme s'il était démasqué.