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La date de l'appréciation de la lésion

Publié le 28 juin 2011 par Christophe Buffet

Un cas qui est ... surprenant, voyez les valeurs avant et après le compromis, du fait d'un changement des rècgles d'urbanisme :

"Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 9 décembre 2009), que les consorts X... qui avaient, par acte sous seing privé du 23 mars 1994, consenti à la société Ocodim, aux droits de laquelle vient la société OCDL, et à la société Locosa, sous condition suspensive de la purge du droit de préemption urbain, une promesse synallagmatique de vente d'une parcelle de terre, ont, en 2006, assigné ces sociétés en rescision pour lésion ;

Attendu que les consorts X... font grief à l'arrêt de les débouter de leur action en rescision pour lésion, alors, selon le moyen, que pour savoir s'il y a lésion de plus des sept douzièmes, il faut estimer l'immeuble suivant son état et sa valeur au moment de la vente ; que si la lésion doit ainsi, en principe, s'apprécier au jour de la signature de la promesse, il en est autrement s'il y a une modification de l'objet de la vente entre l'acte sous seing privé et l'acte authentique, la lésion n'étant alors estimée que le jour de la demande de réitération de la vente par acte authentique ; que constitue une modification de l'objet de la vente, la modification du caractère constructible ou non du terrain vendu ; qu'en l'espèce, les consorts X... avaient, par acte sous seing privé du 23 mars 1994, vendu une parcelle de terre non-constructible d'une valeur de 31 961,70 euros ; que suite à une révision du POS, approuvée en 2004 puis en 2006, le terrain est devenu constructible et sa valeur est estimée à la somme de 3 913 560 euros ; que suite à cette modification de l'objet de la vente, les sociétés Omnium et Locosa ont demandé la réitération de la promesse par acte authentique ; qu'en retenant la date du compromis de 1994 comme date à laquelle doit être estimée la lésion sans tenir compte de la modification de la chose vendue entre la date de la promesse et de celle de sa réitération par acte authentique, la cour d'appel a violé l'article 1675 du code civil ;

Mais attendu qu'ayant exactement retenu que "le moment de la vente" visé par l'article 1675 du code civil était celui de la rencontre des volontés sur les éléments essentiels du contrat, à savoir, la chose et le prix, ce qui correspondait normalement à la date de la promesse de vente, même en présence d'une condition suspensive, et constaté qu'il était justifié du paiement de l'intégralité du prix de vente lors de la signature du "compromis" de 1994, la cour d'appel en a déduit à bon droit que la date du "compromis" était celle à laquelle devait être appréciée la lésion ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne les consorts X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne les consorts X... à payer aux sociétés Omnium de construction développement locations et Locosa lotissement et construction, ensemble, la somme de 2 500 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente mars deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt.

Moyen produit par la SCP Bénabent, avocat aux Conseils, pour les consorts X....

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement entrepris en ce qu'il avait débouté les consorts X... de leur action en rescision pour lésion ;

AUX MOTIFS QUE «les parties s'opposent … sur la date d'estimation de la lésion. L'article 1675 du Code civil dispose que pour savoir s'il y a lésion de plus de sept douzièmes, il faut estimer l'immeuble suivant son état et sa valeur au moment de la vente ; en cas de promesse unilatérale elle s'apprécie au jour de la réalisation, hypothèse qui n'a pas à être examinée en l'espèce, compte tenu du caractère synallagmatique de la promesse, réaffirmé ci-dessus ; il est de principe que le moment de la vente visé par l'article ci-dessus est celui de la rencontre des volontés sur les éléments essentiels du contrat, à savoir, la chose et le prix, ce qui correspond normalement à la date de la promesse de vente, même en présence d'une condition suspensive ; en l'espèce il est justifié du paiement de l'intégralité du prix de vente lors de la signature du compromis de 1994 et non comme il est usuel d'une fraction de ce prix à titre d'immobilisation du bien ; par ailleurs, la vente contenait une seule condition suspensive, à savoir la purge du droit de préemption urbain de la commune de Cesson-Sévigné, dans ses conditions la réalisation ou la défaillance de cette condition ne créait aucun aléa pour les consorts X... quant à la poursuite de la vente et n'impactait pas sur obligation à ce titre, mais avait pour seule conséquence de modifier éventuellement la personne de l'acquéreur. Il s'en déduit que dès 1994, la vente présentait un caractère définitif pour les vendeurs, que l'accord des parties sur la chose et le prix était parfait, analyse corroborée par le fait qu'à l'occasion de la signature de l'avenant en 2001, les vendeurs ont accepté une modification de leur possibilité de renoncer à l'opération en contrepartie de la prise en charge par les intimées du paiement de l'intégralité des impôts existant sur le bien vendu et par la déclaration de succession établie suite au décès de Monsieur Charles X... en 2004, qui rappelle pour mémoire la parcelle de terre et la vente, sans cependant la valoriser à la date du décès, ce qui démontre que ce bien était considéré comme sorti du patrimoine du de cujus. Ces particularités conduisent à retenir la date du compromis comme date à laquelle doit être estimée la lésion, nonobstant le fait que le bien vendu est devenu constructible douze ans plus tard, en 2006 ; les intimés produisent aux débats des actes de cession de la même époque, relatifs à des biens voisins de même nature, qui établissent que l'achat aux consorts X... a été réalisé à des conditions financières satisfaisantes pour les vendeurs. Ces derniers ne produisent aucun élément contraire et ne rapportent donc pas la preuve de faits vraisemblables et graves faisant présumer d'une lésion. En conséquence le jugement sera confirmé sur ce point» (Arrêt pages 6-7).

ALORS QUE pour savoir s'il y a lésion de plus de sept douzièmes, il faut estimer l'immeuble suivant son état et sa valeur au moment de la vente ; que si la lésion doit ainsi, en principe, s'apprécier au jour de la signature de la promesse, il en est autrement s'il y a une modification de l'objet de la vente entre l'acte sous seing privé et l'acte authentique, la lésion n'étant alors estimée que le jour de la demande de réitération de la vente par acte authentique ; que constitue une modification de l'objet de la vente, la modification du caractère constructible ou non du terrain vendu ; qu'en l'espèce, les consorts X... avaient, par acte sous seing privé du 23 mars 1994, vendu une parcelle de terre non-constructible d'une valeur de 31.961,70 € ; que suite à une révision du POS, approuvée en 2004 puis en 2006, le terrain est devenu constructible et sa valeur est estimée à la somme de 3.913.560,00 € ; que suite à cette modification de l'objet de la vente, les sociétés OMNIUM et LOCOSA ont demandé la réitération de la promesse par acte authentique ; qu'en retenant la date du compromis de 1994 comme date à laquelle doit être estimée la lésion sans tenir compte de la modification de la chose vendue entre la date de promesse et de celle de sa réitération par acte authentique, la Cour d'appel a violé l'article 1675 du Code civil."


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