Qu’en est-il deux ans après la promulgation de la Loi ?
Le Premier ministre a confié à deux parlementaires une mission d’évaluation du rattachement de la gendarmerie au ministère de l’Intérieur. Le député UMP de l’Isère Monsieur Alain Moyne-Bressand et Madame la sénatrice RDSE de l’Aveyron Anne-Marie Escoffier.
Les deux parlementaires ont été chargés de cette mission par un courrier du 25 mai 2011 et doivent rendre leurs conclusions pour le 30 juillet. Tenant compte de ce délai particulièrement court on a des difficultés à imaginer que les deux élus puissent aller au fond des problèmes induits par cette mutation du ministère de la Défense au ministère de l’Intérieur.
L’Association Gendarmes et Citoyens, qui milite pour un droit d’association et d’expression des gendarmes, s’est toujours impliquée pour faire ressortir les incohérences de ce transfert. Elle a adressé un courrier aux deux parlementaires en exposant le ressenti de ses membres, gendarmes et citoyens, après bientôt deux années d’expérimentation de la Loi.
Je vous propose le contenu de cette lettre qui résume très succinctement le constat qui a été fait.
« Par un courrier du 25 mai 2011, le Premier Ministre vous a missionné (e) pour évaluer les modalités concrètes du rattachement organique et budgétaire de la Gendarmerie nationale au ministère de l’Intérieur.
Notre association ne peut que se féliciter de l’intérêt que porte le premier Ministre aux conséquences de la loi du 3 août 2009.
La direction de la Gendarmerie Nationale ne manquera pas de vous brosser un tableau aussi fidèle que possible des conséquences de la loi. Nous voulons cependant nous permettre de vous indiquer quel est le sentiment d’un grand nombre de gendarmes, sentiment qu’il vous est possible de vérifier en consultant le forum « gendarmes & citoyens » qui est un excellent baromètre du ressenti des personnels de l’arme. Actuellement ce baromètre serait plutôt sur la position orage.
La Loi du 3 août 2009 n’a pas apporté de modification majeure à l’ organisation interne. La Gendarmerie s’était lancée dans la création des communautés de brigades et il ne semble pas que ce soit l’idéal pour obtenir un maillage satisfaisant et un service plus efficace. En tous cas le contact avec la population y perd très largement en qualité avec deux brigades sur trois qui n’ouvrent que deux demi-journées par semaine. Ce système pourrait être efficace si les effectifs étaient suffisants ce qui est loin d’être le cas que ce soit en nombre ou en qualité car, outre les suppressions, beaucoup de postes de sous-officiers sont remplacés par des gendarmes adjoints volontaires et il est de plus en plus fait appel aux réservistes pour assurer les missions.
Le gendarme est de moins en moins présent dans nos campagnes, soit il est cantonné à des tâches particulières comme la police de la route soit il est accaparé par ses missions prioritaires comme les enquêtes judiciaires ou les nombreux dossiers à traiter à la demande des administrations.
La dissolution de quinze escadrons de gendarmerie mobile impose un rythme de travail très soutenu pour les militaires de cette subdivision d’arme et pourrait être préjudiciable en cas de troubles majeurs et simultanés à l’ordre public.
Par obligation, le contact avec la population n’est plus une priorité. Il est évident que dans ce cas l’efficacité en matière de sécurité et d’ordre publics n’y trouve pas son compte et la politique du résultat laisse de sérieux doutes quant aux méthodes de recueil des chiffres qui sont régulièrement annoncés.
La mutualisation des moyens entre police et gendarmerie est une utopie, tous les services de sécurité travaillent à flux tendu et chacun utilise au mieux ses propres moyens et constate qu’ils vont en se raréfiant ou en vieillissant en raison des restrictions budgétaires qu’impose la RGPP.
S’agissant de la parité globale entre les deux forces de sécurité, il s’agit d’un leurre auquel les gendarmes ne croient plus. Ils se rendent compte que le regroupement des policiers et gendarmes dans un même ministère a tout du mariage de la carpe et du lapin. Ils ont compris depuis longtemps que les différences ne peuvent être effacées tant que devront coexister sous un « même toit » des civils au temps de travail hebdomadaire contingenté qui peuvent s’ exprimer au travers de leurs syndicats et des militaires sans limites horaires de travail à qui on propose un droit d’expression qui n’a rien de réel car toujours sous la censure de la hiérarchie. Un exemple flagrant est celui de la dissolution de l’escadron de Rennes annoncé brutalement à ses personnels alors que le soir même, suite à un entretien avec les syndicats de police, le ministre de l’Intérieur renonçait à la suppression de deux compagnies républicaines de sécurité. Le statut militaire est surtout mis en avant pour toujours profiter d’une force de sécurité soumise, silencieuse et très disponible. Il semble que ce leurre n’est plus attractif et que le recrutement s’en ressente sérieusement. Quoi qu’il en coûte il est absolument nécessaire de revenir à une Gendarmerie composée en grande majorité de sous-officiers car ce sont eux la cheville ouvrière de l’institution.
Je reste à votre entière disposition pour répondre aux éventuelles questions que vous souhaiteriez me poser.
Je vous prie de bien vouloir agréer, (Madame la Sénatrice, Monsieur le député), l’ expression de ma haute
considération »
Christian CONTINI,
Président de l’association Gendarmes et Citoyens
Christian CONTNI, né le 6 février 1947 à Passavant (70).A effectué une carrière de 35 ans en Gendarmerie terminant avec
le grade de de major à la fin d’un parcours qui l’a mené des Vosges au Loir et Cher en passant par l’Orne, l’Indre et Loire, l’Eure et Loire et le Loiret. Il est président de l’Association
Gendarmes et Citoyens qui a pour but d’obtenir un droit d’expression et d’association pour les gendarmes mais aussi de maintenir le lien avec les citoyens.
Merci à Section du Parti socialiste de l'île de ré