Les listes noires du Parti Communiste Français désignent les listes de noms que la direction du parti publia de 1933 à 1945. Elles y listaient les anciens militants communistes, jugés traîtres à la cause pour avoir fréquenté les mauvaises personnes ou divergé de la ligne du parti. 2.300 personnes furent inscrites sur ces listes et nombre d’entre elles furent assassinées à ce titre pendant la seconde guerre mondiale. Comme le résume Rémi Kauffer :
«Deux mille trois cents noms et 22 listes noires de supposés « traîtres » ou « provocateurs », jetés en pâture par le PCF entre 1933 et 1945. Le but, parfaite application des dogmes léninistes : mettre au pilori les « ennemis de classe » au sein du « mouvement ouvrier ». Une terreur quotidienne, qui trouvera son aboutissement pendant la Seconde Guerre mondiale, avec les « liquidations physiques » de dissidents mis dans le même sac que les collaborateurs. »
— Rémi Kauffer, Le Figaro Magazine, 14 novembre 2008
Ces listes noires étaient un des moyens utilisés par l’appareil du PCF pour montrer aux chefs de section le sort qui les attendaient s’ils sortaient du rang. Le Parti entendait explicitement écraser l’individu en lui rappelant que seul compte le Parti. Le journal L’Humanité d’écrire ainsi [1] :
«Dans notre Parti que la bataille révolutionnaire n’a pas complètement épuré du vieux fond social-démocrate, l’influence des personnalités joue encore un trop grand rôle. [...] C’est dans la mesure où toutes les survivances petites-bourgeoises du « Moi » individualiste seront détruites que se formera l’anonyme cohorte de fer des blocheviks français. [...] s’il veut être digne des traces glorieuses du Parti Russe, le Parti communiste Français doit briser sans faiblesse tous ceux qui, dans son sein, refuseraient de se plier à sa loi! »
— , L’Humanité, 19 juillet 1924
Elles sont également une illustration des rapports du communisme avec la trahison, comme l’ont souligné Sylvain Boulouque et Franck Liaigre dans Les Listes noires du PCF paru en 2008. Dans leurs propres mots, « la hantise du traître est constitutive de la représentation du monde telle que Lénine l’a lui-même défini. Le monde est en guerre, il n’y a que deux clans : qui n’est pas avec nous est contre nous ». Là où le libéralisme propose une société ouverte, fondée sur l’échange libre et la diversité, le modèle communiste est l’opposition guerrière dans une perspective de lutte des classes.
Ces listes ne furent plus diffusées à partir de 1945; le PCF, tenant à se présenter comme l’unique figure de la lutte antifasciste ne pouvait pas reconnaître que certains de ses membres avaient collaboré.