DECEMBRE 2009, SAKARA.
C’est une ville qui s’étire le long de la nationale. La première rangée de bâtiments est commerciale : restos, épiceries et collecteurs
de pierres précieuses. Une ruelle ensablée m’emmène dans son ventre où les maisons de riches et leurs antennes paraboliques sont des prolongements des commerces. Viennent ensuite des clôtures de
branches sèches à l’intérieur desquelles des femmes font leur lessive et des gamins se pourchassent autour des petites bâtisses recouvertes de tôles ondulées… encore quelques dizaines de pas et
la savane reprend ses droits, je continue, j’avance hypnotisé par ces pics qui martèlent ces plaines ridées de sillons, en vagues, tels des marteaux sur les cordes d’un piano, accrochés à des
corps noirs et luisants, rythmés par un métronome invisible. Je me mets sur une petite hauteur, amas de gravas, tripes de la terre.
On creuse dur. Parfois on s’arrête et on examine un caillou de près, on souffle dessus, on l’essuie, crache dessus pour voir les
transparences qui pourraient s’y cacher, on se trompe souvent, souvent, tellement souvent que l’on s’y habitue et on rejette le caillou en reprenant la fouille, sans même être dépité, on cherche
encore. On cherchera jusqu'à trouver. Sinon on reviendra demain, chercher encore. On trouvera sûrement demain. Ou après demain. Tant qu’on cherche on peut espérer de trouver. Et quand on
trouvera, on s’arrêtera de chercher, pour un jour ou deux, ou plus, dépendant de la taille du caillou bleu et de sa pureté. Mais on reprendra la mesure, alea jacta est. On est des mpitrandraka
safira . On l’est jusqu'à ce que des pics creusent non pas pour chercher mais pour enfouir l’instrument qui actionnait les pics, quand il ne marchera plus.