Mais qu'importe.... La campagne est bel et bien lancée. Et tous les coups sont permis. Mêmes les plus durs...
La Grèce, sinon rien.
L'Europe l'a échappé belle. Ou pas... En début de semaine, le monde tremblait à l'idée que la Grèce ne fasse faillite. Jugez plutôt : 350 milliards d'euros de dette pour un PIB de 230 milliards environ; un parlement qui, sous la contrainte de la rue, refuse de voter un plan de rigueur unilatéral. La veille, les ministres des finances de la zone euro n'avaient pu se résoudre à lâcher une nouvelle tranche de prêts à l'Etat hellénique sans davantage de contreparties de rigueur. Mardi, un nouveau gouvernement, toujours dirigé par George Papandreou, était investi en Grèce. Et vendredi, le conseil européen réunissait les chefs d'Etat de l'UE pour avaliser enfin quelques mesures de soutien.
La Grèce paiera, les Grecs aussi et surtout. Les autres Européens, fournisseurs de juteux contrats (d'armements comme la France) ou de prêts tout aussi profitables (comme les banques françaises, premières exposées en Grèce, avec 64 milliards de créances), lui prêteront à 6% ce qu'ils empruntent à 3,5%. Voici la solidarité européenne ! On oublierait presque que ces membres de la zone euro savaient depuis longtemps que les comptes de la Grèce étaient agréablement truquées pour mieux intégrer le pays dans la fameuse devise.
Sarkozy, d'ailleurs, s'est encore illustré, ce vendredi à Bruxelles, en matière de construction européenne. On le sait, l'une des grandes faiblesses de la zone euro est l'absence de gouvernement économique unifié alors que la monnaie est commune. A gauche, on réclame des « euro-bonds », des emprunts à l'échelle européenne. Mais à Bruxelles, le petit monarque français s'est déclaré sceptique sur l'idée d'un ministre européen des finances.
Au passage, un remplaçant de Jean-Claude Trichet a été nommé à la présidence de la Banque Centrale Européenne, un Italien du nom de Mario Draghi, favori de Berlusconi et de Sarkozy. Ce Draghi est un ancien de la banque d'affaires Goldman Sachs, celle qui conseillait l'Etat grec comment maquiller ses statistiques budgétaires à l'aube des années 2000. Draghi, actuellement gouverneur de la Banque d'Italie, a été vice-président de Goldman Sachs entre 2002 et 2006. Il a dû expliquer qu'il était arrivé après toutes ces magouilles.
Les scandales à venir
Nicolas Sarkozy l'a échappé belle. A moins qu'il n'ait eu du nez ou quelques informations privilégiées. En éjectant George Tron, son ministre de la fonction publique, du gouvernement fin mai, soupçonné depuis quelques jours alors d'agressions sexuelles contre deux employées municipales de sa mairie de Draveil, le Monarque s'évitait un gigantesque pataquès à venir. Cette semaine, le maire de Draveil a passé deux jours d'affilée en garde à vue - la durée maximum - avant d'être déféré devant le parquet d'Evry et mis en examen pour viol.
Autre scandale, l'affaire Tapie. Christine Lagarde, notre déjà ex-ministre des finances (elle fait campagne depuis près d'un mois) a défendu sa candidature, trois heures durant ce jeudi, devant le conseil d'administration du FMI. En France, le parquet a décidé d'ouvrir une enquête contre deux hauts fonctionnaires qui, sous les ordres de Mme Lagarde, aidèrent Tapie à obtenir ses millions d'euros d'arbitrage contre le Crédit Lyonnais...
Le coup de la Cour
Sarkozy n'avait pas vu le coup venir. Mercredi, la Cour des Comptes a publié son rapport sur la situation des finances publiques. Le constat est encore une fois sévère. On savait la situation peu brillante. Mais à force de répétition des mêmes arguments, on avait fini par s'habituer au story-telling présidentiel : Nicolas Sarkozy aurait été ce Très Grand Homme qui a sauvé la France du désastre ; la crise - la plus grave depuis la disparition des dinosaures - serait responsable de tous nos maux ; grâce à notre Monarque, elle aurait été moins grave qu'ailleurs en Europe ; notre redressement des comptes serait assuré, nos dépenses publiques maitrisées.
La Cour des Comptes rappelle combien tout cela n'était que bobards : L'aggravation du déficit et de la dette publics est bien structurelle : la crise (baisse des recettes, plan de relance, etc) ne compte que pour 38% du déficit. Si l'inflation des dépenses publiques a bien été contenue en 2010, c'est aux deux tiers grâce ... aux collectivités locales que les ténors de Sarkofrance se plaisaient à accuser de tous les dérapages.
La situation française est « plus dégradée que dans le reste de l’Europe » : malgré la reprise (moins forte qu'ailleurs), le déficit public français est resté supérieur aux moyennes communautaires, et l’objectif de maîtrise des dépenses publiques jusqu'en 2013 sera « difficile à atteindre » car le déficit actuel reste trop élevé, les mesures d'économies insuffisantes. Pire, la Cour des Comptes souligne que l'amélioration du déficit budgétaire en 2010 par rapport aux prévisions initiales est surtout du à ... une imprécision de l'outil statistique gouvernemental !
Quel coup dur !
Le coup des classes
Cette semaine, notre monarque croyait se réconcilier avec l'école, ses enseignants, ses élèves et leurs parents. En déplacement en province (Lozère mardi, Yvelines jeudi), le Très Grand Homme promit le gel des suppressions de classes primaires après sa réélection (septembre 2012) et la personnalisation des parcours scolaires au collège. Il fut photographié visitant des enfants et adolescents souriants.
Las... personne n'écoute plus. 1.500 classes seront supprimées à la rentrée prochaine. Sarkozy fait des promesses pour après, s'il devenait président en mai 2012. Il a juste oublié, sans doute, qu'il l'était depuis bientôt 5 ans. Ce mardi, il a répété qu'il continuerait, en 2012, à supprimer des postes de fonctionnaires, y compris dans l'Education nationale. Son ministre de l'Education nationale, Luc Chatel, est empêtrée dans une triche au bac (la publication d'une épreuve sur 3, sur Internet, la veille de l'examen). Chatel refuse de faire repasser l'épreuve. C'est normal, il n'y a plus assez de professeurs disponibles !
Le coup électoral
Depuis quelques jours, Jean-François Copé avait réactivé une bonne polémique, minable à souhait. Le secrétaire général de l'UMP s'amusait à agiter la menace d'un gigantesque fichage politique que le Parti socialiste aurait décidé à l'occasion de ses primaires. Question fichiers, il s'y connaît le Copé. En cherchant bien, il trouvera bien celui des restaurateurs qu'avait utilisé son prédécesseur Xavier Bertrand pour envoyer un courrier d'auto-félicitation après la baisse de la TVA. Pendant les dernières élections régionales, l’UMP francilienne racolait les électeurs au téléphone et utilisait un fichier de police pour discréditer un opposant socialiste.
Mercredi, l'UMP croyait tenir son dossier : un rapport parlementaire de la Mission d'évaluation de l'assurance sociale livrait quelques estimations sur l'ampleur de la fraude sociale. Début juin, le ministre du Travail et de la Santé s'était félicité des 458 millions d'euros (+20%) de fraudes sociales détectées par les Urssaf en 2010. Cette fois-ci, on nous parle de 10 à 19 milliards chaque année, quasiment le déficit de la Sécu ! Et nous eûmes droits, sur quelques journaux télévisés du soir, aux inévitables commentaires médiatiques sur ces assistés-fraudeurs.
Le hic, c'est que la mission parlementaire contredit, ici aussi, l'argument sarkozyen : primo, 80% de la fraude sociale provient du travail dissimulé (entre 6 et 12 milliards) et des erreurs ou des omissions de calculs de cotisations (2 milliards). La triche (ou les erreurs) commises par des allocataires est estimée à 3 milliards d'euros au maximum. Secundo, les efforts déployés pour traquer la fraude ou les erreurs des entreprises restent dérisoires : 767 sections d'inspecteurs du travail (pour 18,3 millions de salariés), 220 contrôleurs et 1.550 inspecteurs pour vérifier les cotisations sociales de 40.000 établissements. A l'inverse, la traque aux assistés qui abusent dispose de moyens conséquents pour des résultats ... finalement maigres : en 2010, 264 000 contrôles sur place ont été réalisés pour détecter, finalement, 13 114 fraudes représentant 90 millions d'euros.
La semaine prochaine, Sarkozy s'était calé une conférence de presse. Officiellement, il s'agissait de parler du Grand Emprunt et des « investissements d'avenir ». En réalité, il s'agissait de contrer médiatiquement l'annonce de candidature de Martine Aubry. Nicolas Sarkozy ne pense qu'à ça.
Sa campagne, déjà commencée depuis 18 mois, peut-être 4 ans.
Gouverner ne l'intéresse pas.
Ami sarkozyste, où es-tu ?