Vingt-cinquième film de l'intégrale Kurosawa
Derusu Usara (Dersou Ousala). 141 min. Sorti le 2 août 1975Avec Yuri Salomin (le capitaine), Maxim Munzuk (Dersou)
L'année de tous les dangers pour Kurosawa qui attente à sa vie le 22 décembre 1971. Chercher les causes est une démarche futile que je ne tenterai pas. Mais la rupture déjà annoncée par Dodesukaden se poursuit. Kurosawa tourne le dos aux majors japonais et à sa quête, vaine, de reconnaissance populaire et s'associe à l'Union soviétique pour produire son film quinquennal - comme le plan du même nom. Kurosawa réalisera un film tous les 5 ans jusqu'en 1990.
Avec Dersou Ouzala, tourné en russe avec des acteurs russes, Kurosawa nous présente encore une fois un personnage qui se démarque par sa bonté. Dersou, c'est la bonté faite homme - un être improbable - le "bon sauvage" des tiersmondistes de la belle époque, celui qui est en harmonie avec la Nature. Dersou est un être utopique, on voudrait tant qu'il soit le prototype de l'être humain plutôt que cette bande de soldats russes qui se comportent comme des idiots. Mais Dersou à l'état naturel n'existe pas tant il est vrai que l'homme naît méchant (un paquet de pulsions; excusez monsieur Rousseau) et peut, peut-être, se bonifier aux contacts de ses pairs. Je me rappelle souvent de l'expérience vécue par le grand alpiniste Reinhold Messner qui, lors d'un accident de montagne au Nanga Parbat dans l'Hymalaya en 1970, s'est retrouvé dans un petit village népalais complètement épuisé et à bout de ressources. Les gens du village l'ont dévalisé et l'ont abandonné le laissant pour mort.Cette Nature, Kurosawa en fait son personnage principal, les humains n'étant que des faire-valoir de celle-ci; ce qui nous donne droit à de magnifiques tableaux de la nature sibérienne. Ce film marque la fin, dans sa production cinématographique, de ses grands thèmes sociologiques. Dorénavant, il ne s'intéressera plus aux problèmes de la société japonaise contemporaine.