Qui a dit que Belges et Français ne pouvaient pas cohabiter? Applause, c’est la rencontre de Nicolas Ly, chanteur parisien avec quatre musiciens belges que l’on a connu dans la fanfare du Belgistan ou encore dans Orange Kazoo. Bulle Sonore est parti rencontrer Nicolas Ly (chant) et David Picard (piano) pour en savoir plus sur leur album, Where It All Began mais aussi leurs parcours, leurs influences, …
WHERE IT ALL BEGAN est le premier album du groupe Applause, à croire qu’on a affaire à un band qui débute … Et pourtant , vous avez des années de scène et de musique derrière vous.
Nicolas Ly : Pour mon cas, ça va faire 6 ans que j’ai commencé à faire de la musique de manière très informelle, sans monter de groupe mais en me laissant aller de rencontres en rencontres et de différents petits projets à petits projets. J’ai été choriste y a 5 ans dans des groupes de soul, bassiste aussi … C’est des expériences très diverses mais en ayant un désir caché d’être un leader dans un groupe de rock (sourire). Et y a 5 ans, on m’avait parlé d’un groupe belge qui cherchait un chanteur et comme ils tournaient à Paris, je suis parti les voir à la Maroquinerie et je suis tombé sur eux (grand sourire, en pointant du doigt David).
Le feeling s’est bien passé ?
Nicolas : J’ai vu leur concert et j’ai été hyper impressionné par leur son sur scène et l’univers qu’ils dégageaient. Tout de suite après, je suis parti à leur rencontre et je leur ai donné des maquettes à moi et leur ai proposé de travailler avec eux.
On vous pose souvent comme question « Vous êtes qui ? », « Applause, un groupe belge ? Franco-belge ?». C’est un peu fatiguant, non ?
Nicolas : A la formation de ce groupe, je n’ai pas eu d’interrogation « d’où viennent ces belges ? », « d’où je viens moi ? ». Applause, un groupe franco-belge constitué d’un parisien et de 4 bruxellois … Pour moi, c’est de la poussière tout ça, ce n’est pas important.
David Picard : On nous pose souvent ces questions là et c’est normal que les gens veulent savoir qui nous sommes. Mais pour nous, on est déjà plus loin, cette rencontre s’est faite y a 4 ans et demi. Aujourdhui, c’est Applause, une entité forte et solide et non Nicolas le français et 4 belges qui font de la musique.
Nicolas, Applause reste et est ton projet le plus important ?
Nicolas : C’est un peu le projet de ma vie ! Une expérience très forte qui dés le début s’est exprimée très intensément. On a travaillé tout de suite, on a mis un an pour monter un répertoire et au bout de ces douze mois, on a commencé à chercher des concerts mais y a eu cette problématique de concert qui s’est imposée, c’est à dire de mettre en place un show, et c’était très intense.
Dans ET On The Beach, un de tes projets musicaux, Nicolas tu chantes en français des textes souvent personnels , très imagés et pas loin d’un univers de musique de film.
Nicolas : Ce n’est pas parce que je chante en français que c’est plus personnel. J’ai toujours écrit en français, j’aime beaucoup la chanson française et avec ET On The Beach, j’ai pu développer ce goût là. Avec Applause, on a quand même des chansons en français mais on les a mis de coté pour le moment (sourire).
David : Peut-être qu’un jour, on verra des chansons en français d’Applause.
Bon, du coup je vais zapper la question bateau « Pourquoi chanter qu’en anglais? » …
Nicolas : Par rapport à mes envies, de rock de soul, y a vraiment que la langue anglaise qui s’adapte à cela, qui est la plus parfaite. Peu importe la langue, le plus important c’est le propos.
Applause est vraiment un mélange de plein de styles différents qui se marient super bien. C’est un peu l’effet de vos parcours à vos 5 ?
David : Bien sûr, c’est la résultante des influences personnelles de chacun et une envie d’explorer ces palettes sonores très différentes. On n’a pas envie de se limiter et d’être prisonnier dans un style spécifique. Au risque de se perdre là-dedans, on avait envie de voir loin, voir large et je ne pense pas que ça a empêché que l’album soit cohérent.
Je vous rassure l’album est très cohérent malgré cette diversité stylistique (sourire). Donc, vous pouvez vous permettre beaucoup de choses et être très créatif
David : Exactement !
Avant de débuter l’interview, on parlait de Jeff Buckley. Nicolas, on vous compare souvent à lui. Ça doit être très flatteur mais en même temps ça doit te faire peur.
Nicolas : (sourire) Oui, j’ai un peu peur des fois…
David : Par rapport à ça, je pense qu’il y a une démarche sincère dans la démarche personnelle de Nico -parce que je commence à le connaître depuis quelques années- et on s’en fout en fait. Bien sûr ça fait plaisir et c’est très flatteur, c’est une référence magnifique mais … d’ailleurs Nico, je ne pense pas que tu aies écouté énormément Jeff Buckley ? On a eu des influences certes, mais à chaque fois on a eu envie de dépasser les choses, de se dépasser nous même. Je ne sais pas à quoi ressemblera le deuxième album d’Applause mais ce qui est sûr c’est qu’il ne ressemblera pas au premier. On a envie de se renouveller, d’être en mouvance constament.
Vous vous baladez entre les styles, se détachant un peu du rock dépressif
Nicolas : L’EP était dans cette branche là, parce que c’était le début de la formation. On venait de se rencontrer et on commencait à peine à se connaître. On venait avec des influences très brutes (de la soul, ou la trip-hop dépressive de Portishead par exemple). Donc y avait cela et au fur et à mesure qu’on travaille ensemble, on éclaire tout cela. On arrive finalement à quelque chose de plus pop.
David : Selon moi, ce n’est même pas ça. C’est qu’on garde ce qu’on avait au début et toutes ces influences, mais on a un peu élargi et étoffé le répertoire. On ne les renie pas ses influences, elles y sont encore mais c’est juste qu’on les a enrichi. Notre producteur Daniel Presley (The Breeders, Faith No More, Dionysos, etc…) nous a beaucoup aidé, il nous a poussé vers cette direction là et il avait raison de le faire. Finalement, il suffisait juste de déclencher le truc pour qu’on se laisse aller dans des directions plus lumineuses et se détacher un peu de ce « Rock dépressif » comme tu dis (sourire). Mais on adore le rock dépressif (rires).
Nicolas : Humainement, nous ne sommes pas dépressifs (rires). On aime bien rigoler, faire des blagues, etc. Au bout d’un moment, notre musique commence à nous ressembler vraiment.
En parlant de Daniel Presley, est-ce qu’il a mis un peu de sa magie sur la chanson « The Woods », que je considère comme le chef d’œuvre de l’album.
David : Raté ! Ce n’est pas cette chanson (rires).
Nicolas : Cherches encore, alors à ton avis c’est laquelle (sourire) ?
Joker !
David : « The Woods », c’est vraiment une chanson à nous, qu’on a arrangé nous même, etc. Après, y a toutes les cordes et là on avait demandé à un ami de nous faire cela. On avait envie d’un passage instrumentale avec une envolée lyrique. Il fallait que ça soit très mélodique.
Nicolas : La touche Daniel Presley, elle n’est pas plus sur un morceau que d’autres. J’ai l’impression qu’il a mis quelques touches très disparates.
David : Avant, on avait peur de certaines choses. Et avec Daniel, il a suffit qu’il nous dise « Mais laissez-vous aller » et mine de rien, il nous a décomplexé. Le plaisir est là et ça a du sens.
Allez encore une question sur les influences, mais « Road To Nowhere » sonne vraiment comme une vieille chanson de Muse -époque quand le groupe faisait de la belle musique-. Cette chanson très entraînante est fascinante avec son piano obsédant.
David : Cette chanson, à la base ça vient d’une idée à moi (sourire). On a commencé à cumuler des titres, on s’est dit que c’était hyper chouette mais ça manquait de morceau … rapide ! Je me suis dit que j’allais écrire un morceau dans ce sens là. J’ai proposé mon idée avec le piano, comme tu dis « obsédant », Nicolas le lendemain a ramené une mélodie et la conception du morceau s’est faite rapidement.
Nicolas : Après, je ne crois pas que David ait pensé à Muse en écrivant cette chanson …
David : (se défendant) Ah non, absolument pas ! C’est rigolo, j’avais en tête que le truc du piano et la batterie. Et pour cette dernière, je pensais à Stewart Copeland.
Comme on avait dit plutôt, vous aimez vous balader entre les styles. C’est très entraînant ce coté éléctro dans « Witches ».
David : Jérémie Mossoray, notre batteur, a écouté énormément l’éléctro et Applause c’était le bon cadre pour s’exprimer avec son « amour » pour cette musique. On n’avait pas envie de se limiter donc on lui a dit « Tu as envie de faire de l’éléctro, tu as des idées, ben vas-y ». Et c’était un bon moyen pour qu’il expérimente ces choses là.
La partie délicate consiste aussi à trancher dans ce gros mélange de styles et d’influences. Si chacun ramène ses envies, à 5 vous devriez avoir un gros bordel musical !
David : Nous sommes en démocratie, monsieur (sourire). Applause, c’est un groupe dans lequel l’avis de chacun a le même poids. Ça se discute, ça négocie, on essaye de se convaincre les uns les autres. Et ça bataille dure pour pouvoir imposer ses idées (rires). Et puis faire un groupe c’est aussi l’art du compromis, ça s’apprend, ce n’est pas facile du tout.
Nicolas : La cohésion, elle est telle qu’aujourd’hui on ose imposer nos idées. Et finalement, ce n’est pas une lutte violente entre nous (sourire).
Ça se ressent aussi cette cohésion en live comme sur l’album. Y a pas de « Nicolas et ses musiciens » ou bien « 4 belges dans le vent et leur chanteur français ».
David : ça me fait plaisir d’entendre cela (grand sourire). Au début, on nous disait « On sent vraiment deux entités, Nicolas, les musiciens ». C’est normal, on venait de se rencontrer et le projet avait besoin de grandir. Maintenant, on est arrivé à un stade, avec le disque et avec la scène, où on est devenu un vrai groupe, un tout.
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