L’OCDE soulignait récemment dans son rapport « Stratégie pour une croissance verte » l’importance de réformer les politiques et pratiques agricoles pour limiter la surexploitation des ressources naturelles. Différents défis apparaissent alors : Comment lutter contre la raréfaction des terres arables ? Comment permettre aux habitants des grandes métropoles de consommer des fruits et légumes frais et locaux? Comment réduire la consommation d’eau et d’énergie de l’agriculture ? Les fermes Lufa, nouveau concept d’agriculture au Québec, apportent une solution innovante à toutes ces questions.
- Les fermes Lufa : des serres agricoles en milieu urbain
Cette solution innovante consiste à produire des fruits et légumes sans pesticides ni OGM, au cœur des grandes métropoles en implantant ces cultures sur les toits de la ville. En effet, Mohamed Hage, créateur du concept et fondateur des fermes Lufa, a imaginé avec l’aide de toute son équipe, une serre pouvant être placée sur les toits de bâtiments industriels et permettant la culture de fruits et légumes avec une utilisation optimale de l’eau et de l’énergie. Actuellement, les serres fournissent de la laitue, des tomates, des concombres, des poivrons, ou encore des herbes fraîches.
- Une réelle innovation technique
Ces serres ne sont pas communes, elles ont nécessité 2 millions de dollars d’investissements et quatre ans de recherche et développement avec une équipe d’ingénieurs, d’agronomes, de nutritionnistes et d’autres experts de l’université McGill.
Les serres des fermes de Lufa permettent ainsi :
- De s’adapter aux toits des bâtiments en respectant les codes civils en vigueur,
- De supporter l’éventuel poids de la neige en hiver grâce à une structure solide,
- De recréer des climats propices à la culture de chaque espèce cultivée,
- De récupérer l’eau de pluie pour un arrosage des plants au goutte à goutte,
- De minimiser la consommation d’énergie en absorbant la chaleur de l’édifice, en plaçant des rideaux énergétiques la nuit pour conserver la chaleur…
- D’utiliser des insectes utiles, comme la coccinelle, pour lutter contre les insectes nuisibles et éviter ainsi l’utilisation de produits chimiques.
Cette culture est aussi une innovation technologique puisque presque tout y est automatisé et peut être commandé à distance.
- Les avantages
Les avantages de cette serre sont nombreux.
Tout d’abord l’implantation de ces serres sur les toits des villes permet de pallier au manque de terres que connaît actuellement l’agriculture et d’optimiser l’utilisation des toits en ville.
Cela permet également de cultiver fruits et légumes directement en ville, proche du consommateur. Les clients bénéficient ainsi de produits locaux et frais, qui ont été cueillis mûrs et n’ont pas voyagés pendant plusieurs jours. La vente des fruits et légumes se fait directement des producteurs à l’acheteur sur le modèle des paniers bio. Le client s’engage à acheter régulièrement des paniers, qu’il peut récupérer directement à la serre ou se faire livrer à un point relai. Cela a le double avantage de limiter la pollution causée par le transport, et de fournir aux citadins des produits frais, nécessaires à la santé.
Mohamed Hage ne peut obtenir de certification Bio, puisque sa ferme est hors sol. Néanmoins, ses fruits et légumes sont pour lui, totalement naturels, puisqu’il n’utilise ni herbicide, ni fongicide, ni pesticide. De plus, sa culture s’inscrit dans une démarche de développement durable puisque la culture est raisonnée pour minimiser la consommation de ressources naturelles. Les produits étant destinés à une consommation locale et rapide, ils n’ont pas besoin d’engrais chimiques ou d’OGM pour être plus robustes et résistants.
Installer une serre sur son toit semble également intéressant pour les propriétaires d’un bâtiment puisque la végétation et la serre offrent une isolation supplémentaire aux infrastructures supports. Cela permettrait de diminuer les coûts de chauffage de 20% pour les propriétaires du bâtiment selon Mohamed Hage.
- Des efforts récompensés
Plusieurs projets de serres sont encore à l’étude et l’on devrait voir ce type d’agriculture se développer sur le continent Américain.
En tout cas, l’inauguration de la première ferme de Lufa, en avril 2011 à Montreal, a été couronnée de succès, plusieurs restaurateurs y étaient invités et sont sortis convaincus par la qualité des produits. Les consommateurs semblent aussi enthousiasmés par ce concept puisque la ferme de Lufa reçoit pour l’instant plus de demandes qu’elle ne produit de fruits et légumes, expliquait Mohamed Hage.
La serre d’environ 3000 m² est conçue pour approvisionner 2000 personnes en fruits et légumes chaque semaine.
- L’avis de Séquovia
Verra-t-on des serres pousser sur les toits de nos villes, comme le souhaite Mohamed Hage?
Ce mode d’agriculture hors sol peut laisser sceptique et l’on peut se demander si la pollution de la ville ne risque pas d’affecter la qualité des fruits et légumes cultivés. Néanmoins les serres de la ferme Lufa ont le mérite de proposer une solution concrète à plusieurs problématiques posées actuellement par le développement de notre société. Pour aller plus loin, et ajouter le pilier social du développement durable à leur concept, les fermes pourraient aussi s’engager dans une démarche d’insertion sociale.