Lacis de rues étroites, de vieilles maisons aux façades chaudement colorées et couvertes de tuiles, de quartiers modernes, Issoire, située au sud du département du Puy de Dôme, conserve un charme de cité méridionale et ensoleillée qui lui vaut de porter l'appellation de " Porte du soleil ".
Issoire - Place de la République
Issoire, que Voltaire disait " fameuse dans tout l'univers par son collège et par ses chaudrons ", s'enorgueillit de son ex-abbatiale en arkose blonde de Montpeyroux - la plus vaste et la plus achevée des " églises majeures " de la Limagne romane - se souvient d'avoir été une " petite Genève " au début du protestantisme et d'en avoir souffert. Devenue capitale industrielle, la ville accueille une presse hydraulique de 65.000 tonnes, la plus puissante du monde occidental, construite par des techniciens de l'ex-Union soviétique pour Interforge. Elle travaille l'aluminium et les alliages légers, fournit l'aéronautique, l'armement, l'automobile, la chaudronnerie. Symboliquement, un marteau pilon s'élève à l'entrée septentrionale de la ville.Bien des planeurs survolent cette cité de Limagne, portés par ces exceptionnels ascenseurs que sont les courants atmosphériques locaux. Au sud-est de l'agglomération, le centre de vol à voile d'Issoire-le Broc est connu de tous les vélivoles d'Europe, non loin des casernes du 28è RT, l'un des plus importants régiments de l'Armée de Terre française.
Légendes s'entremêlant, étymologies contradictoires, nul ne sait véritablement d'où provient le nom d'Issoire. Dénommée " Yciodorencis ", " Issoire la belle " conserve dans son vocable, les traces d'un passé gallo-romain. Le premier document écrit attestant d'une cité à cet endroit date du VIè siècle.
Dans le centre ville, se retrouvent au détour des ruelles les traces d'un riche passé, jusqu'au pont de Charlemagne, construit par l'Empereur s'en allant combattre en Espagne. Le vieil Issoire, à peine tangeant à la couze Pavin, est enfermé dans l'ovale des boulevards périphériques reflétant le tracé des anciennes fortifications. Les petites rues irrégulières convergent vers la place de la République, qu'anime, au pied de la tour de l'Horloge, le marché hebdomadaire du samedi matin. La flânerie laisse découvrir des arcades, des hôtels aux insolites cours intérieures, des fenêtres à jolies ferronneries du XVIIIè siècle. La maison des Échevins, rue des Fours, abrite l'Historial qui présente une galerie de personnages en cire évoquant l'histoire de la cité.
Des secousses à l'apaisement
Promue " Bonne ville d'Auvergne ", Issoire s'ouvrit aux échanges et s'enrichit au Moyen Âge. Les artisans et la bourgeoisie commerçante, voire certains religieux, furent tôt tentés par la Réforme. En 1540, un moine allemand convertit les consuls aux idées luthériennes et fit de nombreux adeptes. Issoire paya cher son penchant pour le protestantisme : les rixes s'y succédèrent, de nombreux luthériens furent martyrisés. Le terrifiant capitaine Merle, soldat protestant cupide et fanatique, s'empara de la ville en 1575, massacra de nombreux catholiques et moines, pilla le monastère et tenta de détruire l'abbatiale. Les catholiques rivalisèrent d'ignominie lorsqu'ils reprirent la ville, en 1577. Sur les amoncellements de ruines fut planté un écriteau sur lequel était écrit : " Ici fust Issoire... ".
Longtemps fiévreuse, Issoire s'apaisa, profita de sa situation dans un pays au sol riche planté de vignes, où de grandes foires aux bestiaux et le marché des céréales attiraient biens des chalands. Connue pour son marché d'huile de noix et pour l'activité de ses chaudronniers, Issoire bénéficia, dès 1855, de l'arrivée du chemin de fer qui la plaça dans la mouvance clermontoise. L'aménagement d'une voie routière rapide, devenue de nous jours, portion de l'actuelle autoroute A 75 entre Montpellier et Clermont-Ferrand, renforça ses liens avec la capitale auvergnate. L'implantation d'industries puissantes, depuis la Libération, a changé le visage de la ville, dont la population a triplé en un demi-siècle, la cité étant encore l'une des rares en Auvergne, a échapper à l'effritement démographique.
Symboles issoiriens
Abbatiale saint Austremoine : il est probable qu'un premier monastère ait été fondé à Issoire par l'évêque saint Austremoine, évangélisateur de la région, vers le milieu du IIIè siècle. Placée sous le vocable de saint Pierre et saint Austremoine, l'ancienne abbatiale bénédictine demeure un exemple splendide et complet de l'art roman en Auvergne. De vastes dimensions, aux proportions harmonieuses et aux couleurs polychromes, saint Austremoine est à l'image des autres " églises majeures " auvergnates déjà édifiées.
La Tour de l'Horloge fut construite entre 1470 et 1480. Austremoine Bohier, son initiateur, qui fut conseiller des finances et intendant du roi Charles VII, souhaita montrer, par cette construction, qu'il n'oublia pas sa ville natale dans laquelle il voulut laisser un souvenir architectural. Dans les années 1830-1840, l'édifice restauré change de destin et devient salle de théâtre avec, configuration oblige, des décors se déplaçant verticalement. Aujourd'hui, la Tour de l'Horloge, emblème historique d'Issoire a trouvé une nouvelle vocation par l'installation, sur trois niveaux, d'une scénographie vivante qui s'attache à faire revivre l'histoire de la ville.