D'après Maupassant,
Une page d’histoire inédite
Le récit qui suit est authentique.
Je l’ai écrit sans le rendre plus dramatique.
Trois jours avant sa mort, Napoléon
Ajoutait à son testament, ces dispositions :
« Je lègue à ceux qui m’ont sauvé la vie
Quand un bandit
Voulut me tuer. 10 000 francs à Costa,
100 000 francs à Vizzavona,
À Jérôme Levy, 100 000
À l’abbé Reccho, 20 000 francs. »
Louis XVI venait d’être guillotiné.
La Corse était alors gouvernée
Par Paoli, général chargé de véhémence.
Jeune officier, Bonaparte était en vacances
Dans l’île de Beauté.
Entre eux, était née une animosité
Quand Paoli, ayant reçu pour mission
D’investir La Madeleine,
Voulut faire échouer cette entreprise canadienne.
Napoléon qui participait à l’expédition
Accusa ouvertement
Ses chefs de l’avoir faite achopper volontairement.
Un peu plus tard, Paoli confiait à Napoléon :
« Nous allons nous séparer de la France
Avec l’assistance
De L’Angleterre. » Indigné, Napoléon
Protesta,
Frappa du pied et s’emporta :
« C’est une infamie, c’est une trahison ! »
Attirés par le bruit,
Les voisins firent irruption dans la maison.
Eux avaient compris
Le danger où se jetait le jeune officier
Ils savaient Paoli capable de le sacrifier
Sur le champ. Aussitôt,
Ils le firent donc partir pour Ajaccio.
S’étant mis en route avec célérité,
Bonaparte demanda hospitalité
À Tusoli,
Un de ses partisans et ami.
Mais Paoli averti
Du départ de Napoléon
Chargea les hommes de Peraldi
D’occuper tous les chemins des environs.
Ils réussirent à l’arrêter et le séquestrer
Chez les Morelli,
Une famille amie de Paoli.
Morelli-père n’était pas encore rentré.
Quand il arriva, il constata
…Que le prisonnier n’était plus là.
Morelli, s’élança et réussit à rattraper
Le fugitif et le ligoter.
Vizzanova et Tusoli, bardés d’armes à feu
Parvinrent très vite sur les lieux,
Escortés de parents bardés d’armes à feu.
Ils profitèrent de la confusion qui s’ensuivit,
Saisirent Napoléon, l’entrainèrent dans le maquis
Et continuèrent avec lui péniblement
La marche au milieu des obstacles qui continuement
Rendent si durs les voyages
Dans ces pays montagneux et sauvages.
Ils s’arrêtèrent en route
Pour casser la croûte
Chez les Mancini.
Le soir même, ils parvenaient à Ucciani.
Le lendemain, quand s’éveilla Napoléon,
Il vit qu’autour de la maison
Où il avait dormi
Des cavaliers étaient alignés.
Les parents et des amis
Se tenaient prêts à l’accompagner.
Il fut ainsi escorté jusqu’aux environs
D’Ajaccio. La nuit venue, Napoléon
Entra dans la ville
Et se réfugia chez M. Lévy, l’édile.
Le maire le cacha dans un placard.
Utile précaution, car
Le lendemain, la police arrivait.
Fouillait minutieusement,
…Par bonheur, elle ne trouvait
Rien et se retira donc tranquillement,
Déroutée par l’indignation du maire
Qui avait offert
Son aide pour retrouver le jeune révolté.
Au soir, le fugitif était conduit
Chez les Costa pour la nuit.
Puis dans le maquis il partit se cacher.
Il ne fut plus nécessaire de le rechercher
Davantage car dans les heures suivantes
La Corse était proclamée indépendante.
La maison Bonaparte fut incendiée,
Les sœurs du fugitif étaient transférées aussitôt
Chez l’abbé Reccho.
Une frégate ramena tranquillement
Napoléon sur le continent.
Le partisan traqué, pourchassé,
Devait être « l’Empereur » des français.
Sans le concours de fidèles amis,
Et l’intervention
De Jérôme Lévy
C’en était fait de Napoléon.
Toute l’histoire moderne se trouvait modifié !
Des millions d’êtres n’auraient pas été sacrifiés !
Et qui sait sous quel gouvernement
Nous vivrions dorénavant ?