Graoulliennes, Graoulliens, amical bonjour de la pointe Bretagne ! Meuh non, je n’oublie pas cette rubrique consacrée à la presse écrite, mais bon, vous savez ce que c’est, on n’a pas toujours le temps de faire tout ce qu’on veut… Sans déconner, la gauche ratisserait large si elle proposait des jours et des nuits deux fois plus longues qu’elles ne le sont aujourd’hui ! Bon, assez déconné – bien qu’on soit un peu là pour ça…
Psikopat n°232 (Juin 2011) : Perdu. La dernière fois que j’avais parlé du Psikopat ici, j’avais parié que son prochain numéro consacrerait son dossier mensuel aux terroristes, mort de Ben Laden oblige. Finalement, avec le feuilleton DSK, l’actualité était suffisamment riche pour que le journal de Carali nous évite une facilité de ce genre et préfère se pencher sur le retour des frontières, c’est-à-dire l’assouplissement des règles de Schengen réclamé à l’Europe (et obtenu) par Sarconi et Berluskozy afin de concrétiser leurs délires xénophobes ; en grande partie en raison de ses origines, Carali ne pouvait pas manquer d’être sensible à ce grave recul de la construction européenne qu’il considère ouvertement dans son « Zlata » comme une mesure archaïque prise par des fossiles qui font mine de ne pas savoir que la disparition totale des frontières n’est plus qu’une question de temps. La mondialisation, ce n’est pas que le monde livré sur un plateau d’argent aux puissances du grand capital, c’est aussi le recul des nationalismes poussiéreux des « imbéciles heureux qui sont nés quelque part » pour reprendre l’expression chère à Brassens,, c’est aussi l’émergence de solidarités entre les hommes qui ne sont plus limitées par les différences culturelles, religieuses et linguistiques, bref, c’est aussi la fin du vieux monde où « l’Adam slave luttait contre l’Adam germain » comme l’a dit Victor Hugo, anticipant le rêve de John Lennon dans Imagine. À cet égard, le retour des frontières n’est pas seulement le report d’une utopie en voie de concrétisation, c’est aussi une protection que les exploiteurs se donnent contre ce qui ne les arrange pas dans la mondialisation, avec le soutien de ceux qui, parmi les exploités, refusent de prendre acte de la réalité d’un monde qui change ; je le dis très sérieusement, mais c’est pour expliciter ce que les humoristes de Psikiopat parviennent à dire en quelques coups de plumes hilarants : derrière le rire se dissimule une vision claire de la société qui n’a rien à envier à celles des « politologues » surformatés qui occupent l’antenne des radios et télés. Du coq à l’âne : les « mémoires d’un croque-mort » signées Lens O’Driscoll racontent-elles des histoires vraies ? Je le demande parce que j’ai parfois un doute, même si l’épisode contenu dans ce numéro est trop énorme pour être une pure fiction…
Charlie Hebdo n°987 (18/05/2011) : Un an que je n’avais plus acheté Charlie hebdo ! J’avais bien failli acheter le numéro paru après l’annonce de la mort de Ben Laden, mais je me suis abstenu, franchement déçu par la couverture du journal avec un dessin de Charb légendé « Ben Laden est vivant ! » et représentant trois bonshommes mi-Elvis mi-Ben Laden… Navrant ! L’événement aurait mérité mieux, non ? D’autant plus que j’avais auparavant acheté chez un bouquiniste des Charlie des années 70, avec des « unes » grandioses de Gébé, Reiser et les autres : la boutade de Charb, qui peut pourtant être excellent quand il fait l’effort, ne tenait pas la comparaison ! Et en feuilletant le journal, j’avais parfois l’impression d’avoir entre les mains L’express ou Télérama ! Je décidai donc d’attendre une autre occasion qui est donc venue avec cette « une » de Luz classant Strauss-Khan parmi « nos otages » au même titre que les malheureux Ghesquière et Taponier : excellent résumé de la perception que certains de nos compatriotes n’ont pas manqué d’avoir de l’affaire Strauss-Khan, Luz est très fort pour ce genre de choses. Pour le reste ? Je ne peux pas, à moins d’être de mauvaise foi, dire qu’il n’y a rien à sauver dans le Charlie des années 2010 : déjà, il est débarrassé de l’infâme Philippe Val, qui travaille désormais à de plus sombres tâches, ce qui n’est pas négligeable. Ensuite, les dessins sur DSK sont bien meilleurs que ceux qui avaient été faits sur Ben Laden ; Bernard Maris nous a aussi pondu un texte sur le sujet qui n’est pas nul, ne serait-ce que parce qu’il suggère que Strauss-Khan aurait pu se laisser prendre pour sauver la gauche ! Ça, il fallait y penser. Satisfecit aussi pour Jean-Yves Camus qui démonte soigneusement le discours des « nouveaux réacs » qu’on voit partout pour se plaindre qu’on ne les laisse pas s’exprimer librement… Bon aussi le texte de Charb (qui est capable du meilleur comme du pire) sur la polémique suscitée par la réforme de la sécurité routière ainsi que l’article de Luz relatant une rencontre avec le grand dessinateur espagnol Carlos Giménez… Mais rien à faire ! Même sans l’abcès Philippe Val, on a beau prendre le journal dans tous les sens, pas moyen d’y retrouver le souffle de liberté sauvage et irrévérencieuse qui rendait si grandioses les pages du Charlie hebdo des seventies et celles de Siné hebdo. À part Cavanna, Kamagurka et Willem qui restent les mêmes et Tignous et Riss qui sont vraiment les dignes successeurs de leurs aînés, le Charlie hebdo moderne est très en-deçà du journal mythique dont il porte, de façon quelque peu usurpée, le titre et semble être fabriqué par des socialistes tendance Libération qui s’encanaillent (à peine). Ce n’est pas un mauvais journal, mais les vrais amateurs d’humour « bête et méchant » en sont pour leurs frais ; vivement Siné mensuel !
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Jeune Afrique n°2630 (05/06/2011) : Vous gardez vous aussi en travers de la gorge le tristement célèbre discours de Dakar de notre Nabot-léon national ? Moi aussi ! Dire que l’homme africain n’était pas entré dans l’Histoire, il fallait oser ! C’était d’autant plus indécent et ridicule que, pour avoir lu Jeune Afrique, je peux témoigner que le continent noir n’a absolument rien à envier à l’Europe de ce point de vue-là ! Leurs hommes politiques, par exemple, pourraient rivaliser avec les nôtres dans le domaine de la mauvaise foi en béton armé, à l’image du « général de la rue » de Laurent Gbagob, le sinistre Charles Blé Goudé, qui a accordé une interview exclusive à Jeune Afrique et qui, à la question « Vous n’avez jamais appelé à la violence ? » répond : « J’ai appelé à la résistance aux mains nues lors de mes meetings. C’est cela que vous appelez de la violence ! Quand certains utilisent des kalachnikovs, vous ne parlez pas de violence… Les jeunes patriotes ont organisé des sit-in comme les jeunes espagnols en ce moment à Madrid. Mais puisqu’il sont africains, on considère qu’ils sont violents. » N’im-por-te-quoi ! Non seulement les jeunes espagnols dont il parle ne sont pas armés, mais en plus, la problématique n’est pas du tout la même, puisqu’il n’est pas question, en Espagne, de remettre en cause le résultat d’un scrutin ! Autant comparer les grèves de 1995 avec le coup d’état chilien de 1973 ! Et ce n’est qu’un petit exemple : encore faut-il que ce Blé Goudé accepte de répondre aux questions et ne dise pas « joker » aux journalistes ! L’Afrique n’a rien non plus à nous envier concernant les gué-guerres entre grandes gueules politiques, comme en témoigne l’opposition sénégalaise incapable de trouver un accord susceptible de la mettre en mesure de faire chuter le président Wade – comment ça, ça vous rappelle quelque chose ? – ou le président du Bénin qui, pour être sûr de rester seul maître à bord, a nommé premier ministre un certain Pascal Irénée Koupaki, totalement transparent, incolore et inodore – ça aussi, ça vous rappelle quelque chose ? Que dire sinon ? Ah oui, ce numéro de Jeune Afrique nous a gratifie d’un dossier de 24 pages sur le développement des infrastructures en Guinée équatoriale en vue de l’organisation du sommet de l’Union africaine ce mois-ci et de la coupe d’Afrique des nations de football : au vu des pages de pub pour les entreprises implantées dans ce petit État pétrolier dont ce dossier est littéralement truffé, on se doute que ce n’est pas désintéressé de la part de l’hebdomadaire ! Une preuve supplémentaire que l’Afrique est bel et bien entrée dans l’Histoire…
Pour mémoire, la chute de Gbagbo... Cliquez pour agrandir.
Causette n°14 (mai 2011) : Je croyais que j’avais été seul à repérer le piège à cons doublé d’une terrible régression que représente la création du Défenseur des droits qui exercera les fonctions occupées jusqu’à présent par le Défenseur des enfants, le médiateur de la République, la CNDS, la Halde et le contrôleur des prisons ; je croyais aussi que j’étais seul à voir que le soi-disant « combat pour la liberté » du fondateur de Skyrock n’était en fait que la réaction d’un margoulin qui veut continuer à se faire du fric en prenant les jeunes pour des cons. Et bien non ! Ces deux mirages ont aussi été repérés par la réaction de Causette, le magazine féminin qui ne parle pas aux femmes comme à des connes – il y a d’ailleurs cinq pages dans le page qui, sous le titre « on nous prend pour des quiches » s’emploient à dénoncer le discours débilitant que l’on s’obstine à servir à la moitié de l’humanité. On m’avait assuré que ce magazine peut aussi être lu par des hommes, et je confirme que les pages de Causette m’on presque autant fait vibrer que l’auraient fait les pages du Charlie hebdo des seventies : tous les articles sont écrits avec talent, intelligence et drôlerie, il n’y a que deux pages de publicité sur les cent que comprend le périodique, ce qui est dérisoire par rapport à la plupart des magazines, on trouve plein d’informations peu relayées par les media dominant et cependant importantes (ceci explique d’ailleurs cela…) : j’ignorais par exemple que 80% des prostituées présentes en France sont sous la coupe des réseaux de proxénétisme ; je ne savais pas non plus à quel point les femmes de Misrata font actuellement preuve d’un moral de fer pour survivre en temps de guerre. En clair, si vous voulez savoir comment perdre vos « kilos superflus » (superflus au nom de quoi, d’ailleurs ?) avant l’été, n’achetez pas ; en revanche, si vous avez un mal de chien à trouver une place en crèche pour votre petit enfant, achetez, on vous expliquera de A à Z comment le gouvernement s’emploie à affamer les structures d’accueil pour les petits… De même, si voulez savoir quoi porter pour être « fashion » et comment cuisiner pour garder l’être aimé à la maison, n’achetez surtout pas ! Mais si vous ignorez qu’il existe des organisations pouvant vous aider à jouer un rôle actif dans la société, si vous ignorez à quel point le rire est important ou à quel point les gynécologues sont incompétents pour s’occuper des lesbiennes, si vous vous demandez pourquoi la jeune et jolie étudiante que vous courtisez ne peut pas sortir avec vous parce qu’elle doit s’occuper d’une vieille dame impotente, alors là, oui, achetez, vous vous coucherez moins con ! Enfin, quand je dis « vous vous coucherez », c’est une façon de parlez parce que, pour ma part, je n’aurais pas dû le lire avant d’aller dormir : il y a dans ce numéro trois pages de politique-fiction imaginant à quoi ressemblera la France dans un futur proche en cas de réélection de notre demi-conducator après un second tour Sarkozy-Le Pen… Frissons et regain de l’envie de lutter garantis ! Bravo, les filles, vous êtes formidables !
Si vous êtes comme ça téléphonez-moi, si vous êtes comme ci... Enfin, bref, cliquez pour agrandir.
Bikini n°2 (juin 2011) : Je vous ai déjà présenté ce journal breton gratuit consacré à la société et à la « pop culture » (je vous envoie un exemplaire contre deux timbres). Arrivée de l’été oblige, le deuxième numéro est consacré aux festivals qui ne vont pas manquer de pleuvoir sur la Bretagne – espérons que ce soit à défaut d’autre chose… À les lire, si j’ai bien compris, j’aurais plutôt intérêt à aller au Pont du Rock (Malestroit) pour voir Katerine et rigoler un petit peu puis aux Vieilles Charrues (Charaix) pour assister au concert de Lou Reed et essayer de draguer une MILF. Niveau alimentation, pour tenir le coup, il faudra privilégier la tartiflette, qui est roborative et éponge l’alcool, ou le kebab, qui cale bien sans trop faire grossir. Je dis ça, mais je n’ai pas l’habitude d’aller dans les festivals, n’aimant ni le bruit, ni la foule ni la chaleur, il y a donc peu de chances pour que j’applique les recommandations de la rédaction de Bikini à ce sujet… Cela dit, j’ai personnellement apprécié le reportage de Julien Marchand sur la vie nocturne des aires de repos le long des routes ainsi que l’article de Régis Delanoë sur les musiques que l’on passe dans les supermarchés : dans les deux cas, on en sait enfin plus sur des choses qui font désormais partie de notre vie quotidienne mais sur lesquelles nous ne savons rien vu que nous ne prenons que rarement le temps de nous arrêter pour les connaître, tant nous en usons comme des biens de consommation – ce qu’elles sont d’ailleurs. Ajoutez à cela que Bikini m’a appris l’existence de Krismenn qui fait du hip-hop en breton et la sortie de La vie sexuelle des super-héros par Marco Mancassola, et vous aurez toutes les clés pour comprendre le satisfecit que je donne à ce magazine. En revanche, je ne suis pas d’accord avec eux quand ils jettent Jean-Louis Aubert et Cœur de Pirate dans la même corbeille que des tronches de cake comme Yannick Noah et Nolwenn Leroy ; en même temps, les goûts et les couleurs, hein…
Puisqu'on parle de festivals, n'oubliez pas le concert de soutien au Graoully déchaîné le 5 août prochain ! Cliquez pour agrandir le dessin.
Fluide Glacial n°421 (juillet 2011) : Ce numéro du mensuel d’umour et bandessinée sera le dernier à être « rédacteurencheffisé » par Thierry Tinlot ; les marges de la gazette prennent déjà acte de l’arrivée de Christophe Goffette. On verra bien ce que ça va donner… Tinlot, en tout cas, aura pris soin de profiter jusqu’au bout de son passage à la tête de Fluide : deux mois à peine après le « spécial séries télé » et un mois après le dossier spécial Sud, voilà qu’il nous sort un « spécial pinard ». Pourquoi pas ? Là au moins, je connaissais un peu (j’ai dit « un peu » !) le sujet et je ne pouvais pas appréhender de ne rien comprendre… Comme toujours, la variété des points de vue rend difficile un résumé pertinent de tout le bazar difficile ; notez déjà que m’a spécialement marqué, dans la rubrique de Léandri, la crainte qu’exprime ce dernier de voir le vin traité comme l’est actuellement le tabac, suite aux coups de boutoir de l’hygiénisme ambiant et des pères-la-morale de tous pays (désunissez-vous !) : un risque qu’il ne faut pas exclure, quand on voit certains des « jeunes » collaborateurs du journal envisager en priorité les risques pour la santé : je pense à Fabcaro, Cablat, James, Boris Mirroir et Leborgne pour qui le vin est manifestement d’abord synonyme de cuite, de cirrhose voire de cancer… Bon, ils voulaient peut-être tout simplement rigoler, mais je trouve quand même que les blagues autour des œnologues de Monoprix qui jouent les esthètes ou des grosses boîtes qui nous gavent de vins standardisés sont davantage bienvenues. De toute façon, sans trop de surprise, les pages qui m’ont le plus fait marrer sont celles d’Édika, celui que Desproges adorait, dont le dernier album est d’ailleurs sorti, l’occasion pour le journal de consacrer deux pages aux archives jusqu’alors secrètes de ce grand humoriste, ce génie discret dont on en sait enfin davantage grâce à l’interview qui lui est consacrée sur le blog de Fluide – j’arrête là, il va rougir. J’ai aussi apprécié la page consacrée aux nouveaux albums de chez Fluide, illustrée par Relom qui s’est permis de faire de l’humour noir avec les deux deniers tomes des « petits péchés mignons » de De Pins et Mazaurette : ça, c’est de la dérision « bête et méchante » comme je l’aime ! Merci, le punk ! Allez, kenavo !
Quelqu'un pourrait-il m'expliquer pourquoi parler de vin me fait penser à Borloo ? Cliquez pour agrandir.