L'ARBRE LE BANC ET LE VIEUX LOUP
L’ARBRE le BANC
Et le VIEUX LOUP
L’hêtre dans le seau de la magnifique rivière
Laisse ses racines d’arbre majestueux
Pomper leur substance vive sous la terre
Émergées, avec un plaisir délicieux
Elles savourent l’automne qui naît en septembre,
L’arbre est soudain heureux sous la pluie d’octobre…
Son bois dans un temps ancien a permis à l’homme,
La fabrication brute d’un robuste et joli banc ;
Il est protégé d’un léger vernis et son bois blanc
A été usé par le temps d’une mousse sombre ;
Le promeneur, le peintre ou les amoureux dans l’ombre,
Apprécient la beauté encore sauvage du lieu…
Les animaux solitaires aiment aussi venir se repaître et boire.
L’homme, le climat, l’époque, tout respecte ce sanctuaire,
Ce lieu comme par magie, vit serein du matin au soir,
Passe le printemps, l’été puis l’automne jusqu’à l’hiver,
Le blaireau, le lapin, le faisan, la poule d’eau, le canard,
Sont tous passés aussi sur cette berge, même un vieux loup…
Le vieux loup est trop heureux d’avoir découvert cette terre,
Cette berge riche, où il peut, manger, boire, dormir et passer l’hiver;
Pour le vieux loup, il se dit que peut être il vivra son dernier hiver,
Les blessures de la vie ont fait trop mal au cœur du vieux solitaire.
Il vit, marche, sur les champs, les sentiers, comme un pauvre hère,
Voilà des semaines, des mois, des années sa compagne de cœur lui a fait misère…
Sa vie a scintillée comme un astre brille dans l’espace ;
Une étoile brillante magnifique devenue filante a brisé le cœur du vieux loup
Pourtant habitué à attendre des heures et des jours que passe
Sur ses sentiers de vieux guerrier serein, sa moitié, il a réservé une place
Pour accueillir le jour venu, son amie, sa compagne, son tout,
L’autre partie de son âme, l’autre moitié de son cœur, pour elle, devenir fou…
Le vieux loup épuisé par son combat pour la vie,
S’est posé sur l’ancien banc dégarni,
Il observe les canards s’ébrouer sur l’eau salie
Car la mousse de surface est remuée par les oiseaux gris
Au col vert, ils barbotent sans crainte d’êtres pris ;
Le vieux loup fatigué leur semble si las, leur coincoin en ri…
Le valeureux jeune loup, noble, vaillant et jadis si fier,
N’a pas vu arriver toutes les années, passionné dans ses guerres,
Trop préoccuper à repaître et à nourrir ses congénères,
Ecraser soudain, dans son élan fraternel pour ses pairs,
Par un engin monstrueux, brisé, casser, broyer comme la poussière,
Le malheureux bougre s’est senti repousser de la terre pour aller en enfer…
Banni, blessé, l’âme perdue, le cœur solitaire,
Le vieil animal, a cherché un autre monde, une autre tanière
Sur ce banc ancien et aussi usé que son corps de pauvre hère,
Il conserve précieusement le souvenir de cette jeune louve brune, altière,
Aux grands magnifiques et brillants yeux noirs remplis de mystères ;
Pour elle, il donnerait toujours sa vie, lui vouerait un éternel magister…
Posé sur ce banc ancien, le vieux loup attend,
Il attend sans jamais savoir ce qui l’attend ;
Amitié, haine, amour, peine ou chagrin,
Il attend en sachant qu’il peut attendre jusqu’à la fin
De ses jours, de sa vie, cette louve à l’âme si froide,
Il sait en vieux et sage loup pouvoir l’attendre à en devenir mort, roide…
Posé sur ce banc ancien, le vieux loup attendra
Le moment propice, précis et opportun,
Pour hululer à la mort tout son chagrin
De n’être pas rejoint par l’autre partie de son âme,
Cette diablesse veut vivre sa vie de femme
Sans supporter, de lui, tout son état d’âme…
Il sait le vieux loup que son indifférence le condamnera…
A tout jamais son dédain arrogant le détruira…Il en mourra…
Georges Adrien PARADIS à Limoux le 03 décembre 2010 à 01h30